Lettre aux Réunionnais #Kasslachainelaviechère

[LIBRE EXPRESSION]

À toi qui nous lis, nous t’écrivons de Saint-Benoit, L’Étang-Salé et du Tampon. Nous faisons le choix d’une lettre qui t’est adressée à toi : la Maman, le Papa, le fils, la fille, le frère, la sœur, la cousine, le cousin, le Tonton, la Tante, le Pépé, la Mémé, l’ami(e).

De l’ennemi viral invisible au grand méchant russe, les guerres choisies s’enchaînent depuis deux ans. Quand nos vies ne sont pas sonnées par la brutalité des décisions, nous sommes sommés de nous taire, parce que nous ne sommes pas en première ligne, parce qu’il y a toujours pire, parce que “kwé ou vé nu fé “ comme se plaisent à le répéter en chœur trop de bouches, sans vraiment y avoir le cœur. Oui, c’est la guerre. Oui, il y a tous ces morts et ces dommages collatéraux, mais il y a aussi une année électorale importante pour notre péi La Réunion, pour notre pays La France. Or, une campagne est en théorie un moment ou tous les autres sujets reviennent à l’agenda. Sauf cette année.

La réalité c’est que devant nos situations de vie qui se dégradent, l’espoir de voir une vie meilleure s’éloigne encore. Quand la croissance et surtout les crises bénéficient autant aux quelques-uns les plus riches, ce sont les disparités économique, sociale et environnementale qui augmentent. Ce sont aussi les besoins fondamentaux individuels et collectifs qui ne sont pas satisfaits.

La « hausse des prix » ou « la vie chère » ne sont pas de mauvais esprits qui surgissent devant nous par méchanceté pure comme les guerres, ou de la seule cuisse de quelques profiteurs. Non, elles sont les conséquences d’un système d’exploitation qui n’a jamais cessé d’exister ici à La Réunion et dans les outre-mer. Des émeutes du Chaudron aux gilets jaunes rien n’a changé.

Or, derrière les mots de pouvoir d’achat, de panier péi, de bouclier qualité prix, de chariot et autre soubik que les élus répètent en boucle en période électorale, il manque l’essentiel de ce qui nous manque et qui donne du sens à l’existence. Tout être humain aspirant à une vie un peu équilibrée a d’un côté ces besoins immédiats du boire-manger-habiter et, de l’autre cherche un épanouissement de soi où la nourriture est ici faite de dignité, de musique, de sports, de danses, de lectures, de philosophie, de spiritualité et d’amour.

À nous les démunis, à nous les désunis, à nous les peu, à nous les rien, en ces temps où plus personne n’a confiance, où les uns et les autres se replient sur eux-mêmes pour se protéger de l’autre, où les gens se résignent à leur sort, pouvons-nous rester ainsi encore longtemps ? Ne rien faire, c’est être indifférent à l’avenir. L’indifférence est ce poids mort de notre histoire. Elle est ce fer qui nous enchaîne. L’indifférence est la fatalité; elle est ce sur quoi on ne peut pas compter. Depuis des années, les mêmes candidats ne savent poser que des mots quand nous attendons d’eux des actes. Dans ce système où la corruption gangrène chaque jour un peu plus nos vies, à l’approche des élections nous avons le choix. Celui d’inscrire cet enjeu dans les batailles politiques d’ensemble que nous devons mener maintenant dès à présent, pour l’avenir de nos enfants.

La première, parce que pour chacun de nous la vie ici-bas est trop chère, exige pour toi, ta famille, avec nous, ensemble l’application de la loi. Toute la loi, rien que la loi. En 2022, que l’état fasse respecter la loi de régulation économique outre-mer pour démanteler les monopoles et favoriser la concurrence, parce que vivre dans la dignité n’a pas de prix.

Séverine Bénard

Marie-Pierre Paris

Antoine Fontaine

Citoyen.nes associé.es à l’OMPRLettre aux Réunionnais #Kasslachainelaviechère

Chaque contribution publiée sur le média nous semble répondre aux critères élémentaires de respect des personnes et des communautés. Elle reflète l’opinion de son ou ses signataires, pas forcément celle du comité de lecture de Parallèle Sud.

A propos de l'auteur

Articles suggérés