LIVRES À DOMICILE
En scrollant bêtement (pléonasme) sur Facebook, je suis cependant tombé sur une information inspirante, et j’ai alors pensé : « Bon sang, mais c’est bien sûr ! Voilà un moyen de promotion dont toutes les personnes concernées par le livre pays peuvent tirer profit ! » Je m’explique : le reportage montrait l’arrivée dans l’Hexagone de la plus grande chaîne de donuts américaine, la fameuse marque K.K.
Le gras, c’est la vie
Les astuces commerciales pour rendre les clients addicts à cette enseigne sont les mêmes que d’habitude. Par exemple, avant l’ouverture officielle, une distribution gratuite a eu lieu dans les rues de Paris. A l’ouverture, les premiers clients se sont vu offrir un an de donuts gratuits. Plusieurs centaines avaient passé la nuit dans le froid parisien pour gagner leur dose d’acides gras saturés et de sucre. Oui, car rappelons au passage que le donut n’est qu’un vulgaire beignet, une pâte frite dans l’huile, comme on en fait dans le monde entier depuis des siècles, sauf que celui-là possède un trou au milieu (de quoi faire fantasmer les ados d’American Pie) et une poudre blanche dessus, à rendre jaloux Pierre Palmade. On vous rassure : c’est du sucre. Pour le reste, « ça baigne dans l’huile », comme disent les boomers.
Et « le gras c’est la vie » ajoute le grand philosophe Karadoc dans Kaamelott.
La nourriture préférée des Simpson
Mais la cerise sur le Donut, dans ce publi-reportage, ce fut ce commentaire d’une jeune fille (enfin, on a dû mettre les sous-titres car elle parlait la bouche pleine) : « Je mange des donuts parce que c’est le plat préféré de Homer Simpson. ». Argument imparable !
D’accord, me direz-vous, mais quel rapport avec la littérature ? J’y viens. A part le beignet-banane et la gaufre de Liège, vous ignorez probablement les bugnes, les faverolles, les ganses, les croustillons, les bottereaux, les pets de nonne ou les roussettes. Mais le mot seul de « doughnut » vous fait baver…euh, je veux dire saliver de plaisir ! De même, vous ignorez les noms de dizaines d’écrivains dont vous avez parfois lu un livre ou deux, et vous ne retenez que ceux qui font l’objet d’un tapage médiatique intense, publicité outrancière qui ne fait que creuser la différence entre les obscurs, les petits, les discrets, et ces donuts littéraires qui sont parfois indigestes, gras, lourds et même à vomir. Ne m’obligez pas à préciser des noms, je vous laisse choisir vous même.
La recette des livres
Le livre est un sandwich dont l’écrivain est le cuisinier. D’abord, le pain avec sa croûte visible, couverture plus ou moins appétissante qui encourage à aller plus loin, ou pas. La mie, c’est le style, la farine des mots est la même pour tous mais chacun la pétrit différemment, et rajoute les ingrédients à sa guise. La garniture, c’est l’intrigue, le scénario, l’histoire, le mélange des saveurs…et si possible le message. Pour que le livre ne soit pas qu’un simple coupe-faim, il doit laisser une trace dans l’esprit, et pas seulement dans l’estomac.
Mon ami de Facebook Jean-Louis Robert, grand joueur de mots comme Thierry Bertil ou moi-même, a entamé un débat intéressant sur ce réseau social, où il s’interroge sur l’expression « livre péi » utilisée à toutes les sauces. Ainsi le livre « pays », ou livre « réyoné », s’inspire parfois des U.S.A. Comme le donut et autres malbouffes. On peut très bien auto-éditer sur Amazon une romance qui se passe à New York, et, même pas très bien cuisinée, elle pourra connaître un certain succès. Car le fast food littéraire existe bel et bien : il est souvent constitué de « tout à l’ego », mais il se vendra peut-être mieux que nos plus grands auteurs locaux, si l’artiste assène les réseaux sociaux de hashtags #New-York… ou même #Homer Simpson !
Alain Bled