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Ma France

Quand j’étais enfant, mes parents m’ont très vite appris le respect des anciens, eux ont vécu, et connaissaient la vie, moi enfant, j’avais tout à apprendre.

Quand j’étais enfant, mes parents, et nous, enfants, avions un profond respect de l’Ecole Publique et de ses enseignants. Nos parents nous éduquaient, les enseignants enseignaient.

Quand j’étais enfant, l’Ecole Publique offrait à chacun les mêmes chances, et pour beaucoup, a constitué un véritable ascenseur social (je peux en témoigner comme tant d’autres).

Quand j’étais enfant, nous avions notre médecin de famille qui se déplaçait à la maison, un rendez-vous chez un spécialiste se prenait en quelques jours, les séjours à l’hôpital n’étaient ni décalés de plusieurs mois, ni supprimés, ni raccourcis faute de places.

Quand j’étais enfant, nous allions à l’école à pied, ou à vélo, rarement en voiture, parce que nos parents avaient compris qu’on pouvait et qu’on devait faire quelques efforts.

Quand j’étais enfant, dans l’immeuble où nous habitions, il y avait des Italiens, des Portugais, des Maghrébins, c’étaient nos copains, nous ne faisions aucune différence. Curieusement, les cages d’escaliers étaient toujours nickel…

Quand j’étais enfant, nos voisins ne nous em… pas, nous partagions avec eux quelques repas, apéros, balades parfois, moments de détente à l’extérieur, et savions nous rendre service les uns les autres.

Quand j’étais enfant, les problèmes se réglaient autour d’une table, et souvent d’un verre, entre adultes responsables, et pas à coups de menaces, d’insultes, ou aux poings.

Quand j’étais enfant, j’ai toujours eu le sentiment que nos parents et les institutions étaient à nos côtés, pour nous aider à bien grandir.

Quand j’étais enfant, pas d’écrans, mais des livres, des balades, du jardinage, des activités associatives, culturelles, on était associés à certaines tâches ménagères. Mes parents n’étaient pas riches, mais pas pauvres non plus. Papa et maman travaillaient davantage afin de pouvoir nous offrir des vacances en colonies ou en maisons familiales, ça nous allait très bien….

Quand j’étais enfant, mon papa, ouvrier, avait le plus grand respect pour son employeur, parce qu’il se sentait considéré, que ses heures supplémentaires étaient décemment rétribuées. A l’époque, les actionnaires ne se gavaient pas sur le dos des travailleurs. Un patron était considéré parce qu’il respectait les ouvriers qui travaillaient pour lui.

Quand j’étais enfant, les pères de familles avaient tous ou presque un travail qui permettait de gagner à peu près correctement sa vie. Pas de parachutes dorés, par de stock-options, pas de « jetons de présence », pas de retraite chapeau, les salaires à 7 chiffres étaient très rares, les actionnaires ne faisaient pas la pluie et le beau temps.

Quand j’étais enfant, les élus de la République étaient respectés, parce qu’ils étaient proches des gens, présents sur les coups durs, de bon conseil, intègres et respectables.

Aujourd’hui, je suis parent, grand-parent, j’ai vu peu à peu les choses changer, se déliter…

Aujourd’hui, trop de parents, privés de travail, ont comme premier souci d’arriver à tenir financièrement jusqu’à la fin mois. Ils ne croient plus à rien, se laissent aller, ne se déplacent plus pour voter.

Aujourd’hui, les parents, même très modestes, qui éduquaient leurs enfants, le font de moins en moins, les enseignants sont chargés et d’éduquer et d’enseigner, avec des salaires de misère.

Aujourd’hui, dans de nombreux immeubles, les cages d’escaliers sont souvent d’une propreté détestable, les gens se parlent de moins en moins, ne partagent plus guère.

Aujourd’hui, à l’exception peut-être de la Réunion, on regarde souvent l’étranger, et/ou celui qui est différent, d’un mauvais œil, au mieux on le moque, au pire on l’insulte, ou on le frappe.

Aujourd’hui, les plus modestes, faute d’argent, ne partent plus en vacances. Les écrans ont remplacé les sorties, les livres, et les vacances.

Aujourd’hui, peu d’enfants viennent à l’école à pied. Ils viennent en bus, souvent en voiture, parfois pour faire à peine quelques centaines de mètres.

Aujourd’hui, l’enseignant est la cause de tous les malheurs du monde. Peu de considération, de la part de certains parents, et du ministère de tutelle. Sans parler des salaires qui sont parmi les plus bas d’Europe, après BAC + 5 au moins.

Aujourd’hui, les médecins travaillent à heures fixes, pas le samedi après-midi et le dimanche, et plus la nuit. Les services d’urgences sont de plus en plus surchargés, les soignants trop peu nombreux, mal payés, surmenés.

Aujourd’hui, le moindre petit souci se règle souvent par des invectives, des menaces, des injures, parfois des coups.

Aujourd’hui, le respect que nous avions pour les anciens a quasiment totalement disparu, parfois même au sein des familles.

Aujourd’hui, un enfant de famille modeste n’a plus les mêmes chances qu’un enfant de famille aisée face aux études. Entre frais d’inscriptions de plus en plus coûteux et appartement, les familles renoncent faute de moyens.

Aujourd’hui, offrir à ses enfants une activité culturelle ou sportive n’est plus possible pour nombre de familles faute de revenus suffisants.

Aujourd’hui, un rendez-vous chez un spécialiste exige parfois six mois d’attente au moins, les hôpitaux (et pas que les urgences) sont à l’agonie faute de moyens et surtout de personnels.

Aujourd’hui les grands patrons touchent des salaires indécents quand leurs ouvriers qui produisent la richesse sont sous-payés et sous pression permanente avec menaces de licenciements. Les actionnaires sont « les rois du pétrole », pour gagner davantage, ils font la pluie et le beau temps, quitte à mettre des centaines de salariés sur la paille.

Aujourd’hui, pendant que quelques gros bonnets ne savent plus quoi faire de leur argent, des gens meurent de faim par dizaines de milliers chaque jour dans le monde, et en France, le nombre de gens sous le seuil de pauvreté ne cesse d’augmenter. Les réfugiés sont parqués, renvoyés au pays, quand on ne laisse pas mourir en mer.

Aujourd’hui, de très nombreux politiques ont oublié qu’ils étaient des élus de la Nation, qu’ils ont valeur d’exemple. Ca combine, ça triche, ça ment, ça fait pression, ça se moque de la justice qui souvent n’en est plus vraiment une à leur égard… 

Aujourd’hui, cette Terre sur laquelle nous vivons et qui ne nous appartient pas se meurt lentement car le profit a remplacé le bon sens. Les néonicotinoïdes et le glyphosate sont de retour en France grâce à un gouvernement qui prône l’écologie… Elle est où « Ma France » que chantait Ferrat ? Cette France belle, solidaire, fraternelle, riche de son histoire, patrie des droits de l’homme ?

Dominique Blumberger

Chaque contribution publiée sur le média nous semble répondre aux critères élémentaires de respect des personnes et des communautés. Elle reflète l’opinion de son ou ses signataires, pas forcément celle du comité de lecture de Parallèle Sud.

A propos de l'auteur

Dominique Blumberger | Reporter citoyen

Ancien enseignant et directeur à la retraite, Dominique Blumberger a rejoint les rangs de Parallèle Sud quelques mois après son lancement. Passionné de musique, gros lecteur, il propose d’ailleurs souvent des avis sur ce qu’il a lu, il affectionne plus particulièrement les portraits et les reportages.

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