La Région conteste en justice la vente de la plage au Lux

DOMAINE PUBLIC MARITIME

La Région a déposé un recours au tribunal administratif pour s’opposer à la vente du domaine public maritime à l’hôtel Lux.

La Région Réunion a formulé une requête sommaire au tribunal administratif, le 12 novembre, contre l’Etat dans l’affaire du Lux, pour rester dans les délais de son droit de recours. Ce que confirme le greffe du tribunal. Alors que tout indique que la procédure avance au pas de charge, la collectivité se devait de réagir vite pour s’opposer à la vente de l’arrière-plage de la Saline-les-Bains à un groupe mauricien.

Pour gérer ce dossier complexe, elle s’est adjoint les services d’un cabinet de conseils juridiques. Elle s’oppose dans un premier temps au déclassement du domaine public maritime occupé par l’hôtel et s’opposera de la même manière à l’acte de vente qui doit suivre.

Elle reproche à l’Etat de ne pas avoir porté à la connaissance des membres de la Commission des 50 pas géométriques — préalable au déclassement du terrain — tous les éléments nécessaires. Sur le fond, elle défendra l’inaliénabilité du DPM et interrogera la possibilité de reconduire un bail emphytéotique plutôt que de procéder à une cession. 

L’Etat et la mairie de Saint-Paul favorables à la vente

Rappelons que l’Etat a entrepris depuis deux ans une procédure pour lui permettre de vendre ce terrain — à l’origine inaliénable — à l’hôtelier mauricien. Celui-ci, locataire d’un bail emphytéotique, souhaite devenir propriétaire pour solidifier ses investissements à venir.

L’argument a porté auprès des services de l’Etat. Le directeur régional des finances publiques dit redouter la dégradation de l’hôtel, la mise au chômage de 200 employés et une « nouvelle verrue comme l’ex-Maharani ». Lors de la commission des 50 pas géométriques, le représentant de la mairie de Saint-Paul a lui aussi été sensible à l’exposé économique. Et la commune a renoncé à faire valoir son droit de préemption qui lui aurait permis de récupérer le terrain en lieu et place du groupe IBL, Ireland Blyth Limited.

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L’hôtel Lux menace de réduire ses investissements s’il ne devient pas propriétaire de son terrain. (Photo : Philippe Nanpon)

En revanche le représentant de la Région — compétente en développement économique et en aménagement du territoire — a été le seul à s’opposer aux déclassements du DPM au profit d’intérêts privés, que ce soit pour l’hôtel Lux ou pour l’hôtel Boucan Canot, lequel a entrepris la même démarche. Il faisait alors valoir le principe d’inaliénabilité des pas géométriques et l’importance de préserver des zones sensibles contre les effets du réchauffement climatique.

La défense du patriotisme économique réunionnais

Lors de la commission permanente du 6 septembre dernier, l’exécutif de la Région a adopté une motion pour protester officiellement contre la vente de la terre réunionnaise à des investisseurs étrangers. La présidente Huguette Bello faisait valoir le « patriotisme économique » et dénonçait « l’absence de concertation directe » de la part de l’Etat. Elle relevait, au passage, le bas prix (400€ le mètre carré) accordé aux acheteurs.

La demande de suspension de la procédure n’a pas empêché, le 12 septembre, l’ex-préfet, Jérome Filippini, de signer discrètement, via son secrétaire général, l’arrêté de déclassement du DPM du Lux. Ce fut d’ailleurs l’un des principaux sujets de discorde qu’a rapportés Huguette Bello au nouveau ministre des outre-mer, François Noël Buffet lors de leur première rencontre, le 27 septembre. Coïncidence ou pas, le conseil des ministres suivant a mis fin aux fonctions de Jérôme Filippini à La Réunion pour l’affecter en Corse…

Franck Cellier

A propos de l'auteur

Franck Cellier | Journaliste

Journaliste d’investigation, Franck Cellier a passé trente ans de sa carrière au Quotidien de la Réunion après un court passage au journal Témoignages à ses débuts. Ses reportages l’ont amené dans l’ensemble des îles de l’océan Indien ainsi que dans tous les recoins de La Réunion. Il porte un regard critique et pointu sur la politique et la société réunionnaise. Très attaché à la liberté d’expression et à l’indépendance, il entend défendre avec force ces valeurs au sein d’un média engagé et solidaire, Parallèle Sud.

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