La tourterelle rieuse est présente sur la liste d’interdiction de 2022. Elle a aussi été vue au nid et des petits observés, signe que l’espèce est sur la voie de la naturalisation.

Déjà, le nombre d’oiseaux exotiques est plus important dans l’île que les indigènes. Avec en tête le merle de Maurice et le cardinal, espèces considérées comme envahissantes. Est-ce que la tourterelle rieuse va bientôt les rejoindre sur ce triste podium ? L’avenir nous le dira mais le premier pas est déjà franchi avec l’observation de reproductions réussies.
C’est le photographe animalier spécialiste des oiseaux Yabalex qui a lancé l’alerte et parle d’ « une découverte ornithologique inédite à La Réunion : la première observation documentée de la reproduction de la tourterelle rieuse (Streptopelia risoria) sur l’île ». L’oiseau est en tout point semblable à une tourterelle turque, à peine plus petit, mais au chant très différent. « Le 21 août 2022, j’ai photographié pour la première fois un individu en train de couver dans la région de Pierrefonds, près de l’aéroport », raconte le passionné. Il s’est renseigné auprès des propriétaires du terrain, une reproduction a déjà été observée, et par ailleurs un individu juvénile repéré.
Oiseau de cage
Le photographe souligne que cette espèce n’est d’ordinaire pas considérée comme invasive, mais que des études permettraient de le déterminer. En tout état de cause, la tourterelle rieuse est sur la liste des espèces interdites sur l’île depuis 2022, comme toutes les autres espèces de l’ordre des columbiformes à l’exception du pigeon bizet et de la géopélie diamant, cette dernière arrivée de longue date, elle fait partie du paysage avec l’indigène tourterelle malgache. « A l’origine, c’est un oiseau de cage, qu’on a déjà observé dans la nature dès 2002 », poursuit Yabalex, qui évoque des lâchers de colombes lors de mariages justement dans ce quartier de Pierrefond. « Parfois y sont mêlé des tourterelles rieuses », assure-t-il. On observe depuis longtemps des individus isolés un peu partout dans l’île, à Saint-Leu, Saint-Denis, Saint-Louis, Saint-André ou Saint-Pierre entre autres, et toujours à proximité de zone habitées. Mais c’est la première fois qu’on la voit en groupe.
La tourterelle rieuse est granivore et insectivore, mais ne dédaigne pas quelques baies de temps en temps. « Tout comme la tourterelle malgache, elle se nourrit au sol », indique Yabalex. Ses nids ont été vu dans différents arbres, à quelques mètres de hauteur. Elle est originaire d’une large bande qui va de l’Atlanique au sud du Sahara jusqu’à la péninsule Arabique. « Elle fréquente principalement les broussailles arides et les buissons épineux avec des acacias », indique le site oiseaux.net.
Reste à savoir si cette espèce sera une source de problèmes à l’avenir. « Elle pourrait avoir des impacts agricoles, pathogènes ou concurrencer des espèces indigènes », explique Martin Riethmuller, ornithologiste à la Seor. « Le merle de Maurice a mis 25 ans à trouver la bonne stratégie », souligne le scientifique. On ne sait donc pas si la tourterelle rieuse deviendra une calamité comme le bulbul orphée, « il y a pour l’instant trop peu d’individus », remarque Martin Riethmuller qui parle d’une centaine répartis dans toute l’île. « Il y a pour autant peu de chance, vu son aire de répartition d’origine, qu’elle puisse s’adapter dans les Hauts ».
La tourterelle rieuse inquiète peu les scientifiques et le monde agricole. Pour le merle de Maurice, il est trop tard. Mais les mainates, perruches à collier et corbeaux familiers (ce dernier est craint pour des risques pathogènes qu’il fait courir aux oiseaux d’élevages. Il arrive régulièrement de l’île Maurice en passager clandestin sur des cargos et porte-containers), également trouvés dans la nature, sont eux traqués sans merci.
Philippe Nanpon
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