Le label musical Kanyar Deluxe entend valoriser les cultures créoles

Né en 2021 d’une volonté de valoriser les cultures créoles dans leur diversité, le label Kanyar Deluxe accompagne aujourd’hui sept artistes. Danseur·euse·s, chanteur·euse·s, conteur·euse·s, DJ, musicien·ne·s, compositeur·rice·s ou artistes visuel·le·s réunionnais·es, ces profils variés ont adhéré à un label qui place l’humain au cœur de sa démarche. Maya Kamaty, co-créatrice et gérante du label, a accordé une interview à Parallèle Sud.

Maya Kamaty, Bioz, Ziskakan, Sskyron, Anny Grondin, Luna Umbra, GRiSE, et Sedjem sont les noms des premier·ère·s artistes ayant rejoint le label phonographique. Ils sont au nombre de huit, et représentent l’art dans sa diversité, tout comme la culture créole, que l’on pourrait conjuguer au pluriel. En rejoignant le label, les artistes ne délèguent en rien leur pouvoir de décision, mais bénéficient de conseils, de retours d’expériences, notamment de la chanteuse et compositrice Maya Kamaty, également gérante et directrice artistique du label, dont le succès dépasse aujourd’hui les frontières de son île natale.

C’est une approche à 360° (phonographie, spectacle vivant, édition et communication) que propose Kanyar Deluxe pour aider au développement professionnel des artistes, en partenariat avec l’association Lamayaz. Kanyar Deluxe gère la partie phonographique en construisant, avec les artistes, une stratégie incluant la sortie de singles, d’albums, d’EP, et la diffusion des œuvres tant à La Réunion, en hexagone, qu’à l’international, comme en témoignent les partenariats passés avec l’Inde, le Brésil ou le Canada. Le label accompagne également sur la partie communication, et aide certain·e·s artistes à trouver des attaché·e·s de presse, par exemple.

Parmi les talents du label, plusieurs se produiront au Zinzin, à Grands-Bois, ce week-end, à l’occasion du lancement officiel de Kanyar Deluxe. (Détail du programme en fin d’article.)

Un projet né de la volonté de respecter les artistes

À l’origine, les motivations pour créer ce label sont multiples, raconte Maya Kamaty : « L’idée était de monter un label, aussi société d’édition pour avoir plus de place dans la responsabilité des œuvres, car aujourd’hui, en tant qu’artiste, quand on signe avec un label ou un tiers, on est de moins en moins détenteur·rice de ses droits. Je voulais le faire pour mon projet artistique personnel, mais l’idée était aussi de défendre des œuvres d’ordre patrimonial et familial à travers le groupe Ziskakan et les contes d’Anny Grondin. »

Ensuite, Kanyar Deluxe, c’est aussi un désir d’offrir à ses artistes de la transparence : « L’industrie de la musique est de plus en plus compliquée, et on veut faire en sorte que les artistes ne soient pas la dernière roue du carrosse. L’idée est de recentrer ce côté humain et transparent, et de dire quand ce n’est pas possible. Dans les labels, on trouve beaucoup de gens qui savent parler, qui savent vendre, c’est aussi un milieu où il y a beaucoup d’égo, voire même plus que chez les artistes. À mon échelle, on m’a promis beaucoup de choses, et j’y ai cru, j’ai fait confiance. Et puis, il y a eu la réalité, avec tout un tas de raisons qui expliquent que les choses ne se font pas comme annoncé au départ. Avec Kanyar Deluxe, on veut créer un environnement sain pour les artistes. »

Appliquer une démarche inclusive

« On est la racaille, mais classe »

Derrière ce nom de label, « Kanyar Deluxe », se révèle une volonté de se réapproprier des termes, confie la chanteuse :
« J’ai sorti un album que j’ai nommé Sovaz, à une époque où l’on parlait d’ensauvagement. C’était ma manière à moi de dire que j’allais rester sauvage. Avec la racaille, c’est pareil. Sarkozy a parlé de la racaille qu’il fallait passer au Kärcher. On veut redonner au mot “racaille” ses lettres de noblesse, en ajoutant le mot Deluxe. On est la racaille, mais classe, et fier·e·s de l’être. »

Par cette expression qu’utilisait Alain Peters comme surnom affectif, est clairement revendiqué ce côté rebelle, et cette démarche singulière de faire de la musique sans rentrer dans le rang. À mêler par exemple du maloya avec de la pop ou de l’électro, ou encore du sega, dont on parle moins. Mais, comme toujours lorsqu’on se distingue, cela ne plaît pas à tout le monde :
« On est un peu boudé·e·s, on ne passe pas en radio », explique Maya Kamaty. De la même façon, alors qu’elle fait de l’électro, elle n’est toujours pas conviée aux Electropicales.

Kanyar Deluxe conseille ses artistes dans les vagues d’une industrie complexe et fortement concurrentielle, car, comme le rappelle Maya Kamaty, à Paris, 100 000 morceaux sortent chaque jour. Dans une ère où les artistes émergent·e·s sont encore mal rémunéré·e·s, réussir à vivre de la musique reste un autre combat. Le pari du label est d’accompagner, mais sans faire miroiter de rêve inatteignable. Pour autant, ce n’est pas le talent qui manque chez les sept artistes de Kanyar Deluxe, dont la majorité se produira ce week-end au Zinzin, à Grands-Bois.

Programme du week-end 8-9-10 août 2025 : #1 Kanyar Deluxe (re)Prézant

Ven 08 août – 19h

• Bioz + Maya Kamaty + Luna DJ set + In motion crew

Sam 09 Août –

• Atelier voguing gratuit à 14h avec Luna
• GRiSE + Sskyron * DJ DAN WAYO à 19h

Dim. 10 Août –

• Contes créoles à 18h avec Anny Grondin
• + Ziskakan (Officiel) à 20h

Sarah Cortier