Un média indépendant et ouvertement militant, la Bretagne l’a fait. Né avec le mouvement des Gilets jaunes, Le Canard Réfractaire squatte les réseaux sociaux pour distiller la bonne parole écologiste, anticapitaliste, et même révolutionnaire. Nous avons rencontré, chez lui, dans les Côtes d’Armor en Bretagne, son initiateur et l’un de ses principaux membres, celui que l’on voit dans leurs vidéos, Yohan Pavec.
« Début 2019, en plein mouvement des Gilets jaunes à Guingamp (Côtes d’Armor), nous avons éprouvé le besoin d’étendre notre lutte avec d’autres mouvements comme les Coquelicots, les syndicats, Extinction Rebellion… faire des trucs ensemble », commence Yohan Pavec, cofondateur du Canard Réfractaire, un média présent sur les seuls réseaux sociaux. « Et nous avons organisé, le 1er mai, un festival écolo et bonne humeur. Mais nous n’avions rien pour en faire la com. »
Le carnaval a réuni quelque 1 000 personnes, l’occasion de se retrouver, de se fédérer avec d’autres militants. Des vidéos ont été tournées à cette occasion, diffusées en plus d’un journal papier. Le journal, devenu périodique, devient un journal des luttes et est vendu dans les manifestations. Une contribution participative est mise en place en octobre 2019, rapporte 2 000 euros, et une subvention de 1 000 euros est attribuée au Canard par le conseil régional de Bretagne. « Nous avons bénéficié d’un concours de circonstance, ce sera la seule et unique subvention que nous aurons touché », rigole Yohan. Pour autant, la somme permet à l’équipe de s’acheter sa première caméra.
Franck Lepage
« On a réalisé des reportages sur la chasse, sur les retraites, mais au niveau de l’audience c’était pas fou », se souvient l’animateur des vidéos.
Tout bascule avec la rencontre de Franck Lepage qui accepte de participer à une série d’interviews. Dix fois dix minutes qui ont bien marché, le train était lancé. Puis un sujet sur la SNCF regroupe un million de vues sur Facebook début 2020. « Arrive alors le Covid et ses confinements, plus moyen de vendre le journal papier », raconte encore le Breton. C’est là, au printemps de la même année, qu’il débute une revue de presse face-cam, pour atteindre 10 000 vues à chaque édition.
S’en suit un premier financement participatif qui atteint 50 000 euros et permet l’embauche de quatre salariés. Ils sont dix « équivalent temps plein » aujourd’hui. Puis Le Canard Réfractaire se diversifie et crée L’Actu Réfractaire ainsi que Glupatate, deux autres chaînes Youtube. Là comme sur les autres réseaux sociaux, le Canard propose des infos, des coups de gueule, organise la lutte, des formations militantes, etc.
« Ce média militant, une arme de classe, c’est le média qu’on aurait voulu avoir avec les Gilets jaunes », se félicite Yohan Pavec. Quand le rêve devient réalité.
Philippe Nanpon
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