décharge ISDN Suez Sainte-Suzanne

400 000 euros d’amendes requis contre Suez pour avoir laissé se répandre le « jus de poubelle »

C’est un dossier très technique que le tribunal judiciaire de Saint-Pierre a eu à traiter ce mardi 9 septembre, celui de l’entreprise Suez RV Réunion dans le cadre de la gestion de l’Installation de stockage de déchets non dangereux (ISDN) de Sainte-Suzanne. Elle est accusée d’avoir pris 8 à 12 ans de retard pour couvrir les casiers de la décharge et ainsi réduire la production de « jus de poubelle ».

Etait-il possible de réduire les mauvaises odeurs de la décharge de Sainte-Suzanne en traitant mieux le problème des déversements de jus de poubelle ?

L’entreprise Suez RV Réunion, représentée par Hervé Madiec, son directeur régional, était au cœur des débats mardi 9 septembre au tribunal judiciaire de Saint-Pierre avec trois chefs d’accusation qui lui étaient reprochées :
– Gestion irrégulière de déchets (caractéristiques, quantité, conditions de prise en charge ou procédés de traitement),
-Poursuite de l’exploitation d’une installation classée soumise à autorisation non conforme à une mise en demeure,
-Exploitation d’une installation classée autorisée sans respect des règles générales et prescriptions techniques.

Suez RV Réunion a démarré son activité d’installation de stockage de déchets non dangereux en 1993 à Sainte-Suzanne non loin de la Ravine Bertin et de la Rivière de Sainte-Suzanne. Les lixiviats, communément appelés jus de poubelles, sont au centre du dossier. Ils sont composés d’eau pluviale ayant ruisselé dans des déchets. Les lixiviats sont pré-traités, traités puis rejetés dans la rivière Sainte Suzanne. Mais à cause du retard de fermeture de casiers d’enfouissement, des lixiviats ont pollué le bassin de rétention d’eaux pluviales (qui concentre des eaux récupérées non polluées de voirie) pour se déverser par surverse à plusieurs reprises dans la ravine Bertin.

26 surverses ont été comptées entre 2022 et 2024 contre 6 depuis 2024 suite aux aménagements de Suez. Les casiers d’enfouissements sont des structures conçues pour stocker de manière sécurisée et étanches les déchets non recyclables et non dangereux. Seuls deux casiers de rétention sont autorisés à être ouverts simultanément, et ils doivent être recouverts définitivement deux ans après la fin de l’exploitation. Selon les constatations, certains casiers sont restés ouverts 8 à 12 ans après.

De fortes contraintes

Hervé Madiec a tenu à rappeler que Suez RV Réunion « n’était pas une exploitation normale et qu’elle aurait dû fermer en 2019-2020 », il a pointé des incohérences dans les faits qui sont reprochés à Suez et rappelle les nombreux investissements effectués depuis. « Malgré les difficultés rencontrées, Suez RV Réunion reste une référence en matière insulaire et tropicale sur la gestion des déchets, elle officie à La Réunion, à Mayotte et à Maurice. »

Suez a réalisé plusieurs investissements depuis, notamment un laboratoire permettant de réaliser des analyses de qualité qui auparavant devaient être envoyées dans l’Hexagone avec un résultat trois semaines après. Elle a également mandaté des bureaux d’études pour renforcer les contrôles.

La procureure a rappelé qu’elle ne souhaitait pas accabler l’entreprise car elle a subi des contraintes fortes dues à la difficulté de la gestion des déchets sur l’île et sa masse de travail. Suez traite tous les déchets collectés par la Cinor et de la Cirest. Mais le parquet a pointé à plusieurs reprises leur manque de réactivité, certaines recommandations données en 2016 par la Deal (Direction de l’environnement, de l’aménagement et du logement) ont été suivies bien plus tard. Le parquet a demandé à la Cour de condamner l’entreprise Suez à 400 000 euros d’amende dont 300 000 avec sursis. La défense a demandé la relaxe pour les trois chefs d’accusation, arguant notamment qu’aucune atteinte à l’environnement n’a été caractérisée et que la Deal ne s’était pas portée partie civile dans ce dossier. La cour rendra sa décision en délibéré le 14 octobre prochain.

Léa Morineau.

227 vues

A propos de l'auteur

Léa Morineau

Étudiante à l'ILOI en alternance chez Parallèle Sud. Cocktail de douceur angevine et d'intensité réunionnaise, Léa Morineau a rejoint l'équipe de Parallèle Sud pour l'éducation aux médias et à l'information, elle s'est rapidement prise au jeu du journalisme. A travers ses articles, elle souhaite apporter le regard de sa génération et défendre un journalisme qui rayonne au-delà des apparences.

Ajouter un commentaire

⚠︎ Cet espace d'échange mis à disposition de nos lectrices et lecteurs ne reflète pas l'avis du média mais ceux des commentateurs. Les commentaires doivent être respectueux des individus et de la loi. Tout commentaire ne respectant pas ceux-ci ne sera pas publié. Consultez nos conditions générales d'utilisation. Vous souhaitez signaler un commentaire abusif, cliquez ici.

Articles suggérés

Parallèle Sud Bêta 1

GRATUIT
VOIR