route

« Toutes les routes mènent où tu veux aller »

LIBRE EXPRESSION

La dernière journée pastorale des jeunes a eu lieu samedi 9 juillet à Saint-Paul, à l’endroit appelé la grotte de Lourdes.

À quelques pas de l’église en plein centre ville, les jeunes se sont retrouvés pour partager le déjeuner après la célébration du père « leader » de la jeunesse réunionnaise chrétienne, le père David Aho.

Le staff composé des « grands jeunes » a assuré les jeux de l’après-midi. Comme un clin d’œil à un nom de console à succès, la journée intitulée « pray station » a proposé des activités bien loin des performances sur écrans divers. 

Installés entre la cure, la salle paroissiale et la fameuse grotte, les participants ont pu s’adonner, non s’abonner, entre autres au jeu de course en sac de goni, au jeu du charriot, au chamboule-tout, au parcours de vitesse en aveugle, au parcours en slalom pour remplir un récipient d’eau avec une cuillère…  autrement dit : des jeux « lontan » qui ne demandent aucun paiement ni engagement temporalisé. 

Un concert était aussi proposé et s’il était indubitablement composé de chansons de la religion, les musiciens faisaient la balance avec des titres réunionnais tels que « Fé viv a mwin dan lo love » de Kenaelle ou  « Marmay lontan » de Baster par exemple, soit : des airs de « réunionnité » plus que de « jésusité ».

concert

Ce que j’ai observé aussi ce jour-là est l’énorme tronçon de route au-dessus de la salle paroissiale. Cet impressionnant passage que j’empruntais jusque-là sans me douter qu’au-dessous se nichait un écrin de verdure propice à l’accueil de joies simples. 

Avant cette découverte, quand je sortais du tunnel et arrivais à Saint-Paul sur cette dernière portion de la route des tamarins j’étais encore souvent dans mes pensées de « Côooote wouééé…ésst », en référence à la série américaine des années 1990. 

En écrivant je me vois dans ma voiture, surélevé par la route, en pleine vue sur le port du Port après être passé prés de « zoreil land » et souriant de nostalgie des moqueries et autre commentaires « en foutan » du scénario qu’on « moucatait », mais dont on ne ratait pourtant aucun épisode en famille. Peut-être parce que voir des vies de villas faisait rêver dans la « kaz en tolle »

Mais, hors tendres souvenirs, ce contraste entre la route que je connaissais et ce que je découvrais alors était saisissant. 

Cette voix construite pour être plus rapide qui soumet à la limite de vitesse, qui m’a valu déjà quelques amendes et retrait de points de permis pour être enregistré à 92 kilomètres à l’heure, se présentait comme lourde et massive, écrasante et ingrate dans le ciel lorsque j’étais posté dans ce parc derrière l’église de Saint-Paul, où j’étais entouré d’arbres, et où le temps semblait n’inviter qu’au calme intérieur pour mieux partager la sérénité du moment.

Je venais de Saint-Pierre, et quelles que soient les routes que j’emprunte à La Réunion, je n’oublie pas l’histoire de la colonisation de l’île, le rôle qu’a pu y jouer l’Eglise chrétienne, encore moins les dérives actionnées par le sentiment de la foi aujourd’hui. D’autant que nos lieux d’habitation même sont marqués de sacralité. En effet, il est difficile de ne pas faire le rapprochement aigre entre la position des deux statuts monumentales installées en 1840 sur des piédestaux somptueux au pied des marches d’accès à la basilique vaticane : Saint Pierre coté sud, Saint Paul côté nord et la toponymie chargée d’histoire douloureuse de La Réunion. 

Cependant, le comble émotionnel de cette sortie culminait à la vue d’une petite construction évoquant pour moi les « tites boutik davan »

Alors, si je ne veux en aucun cas tomber dans le prosélytisme ou l’endoctrinement des bénéfices de la société de trop de consommations, je peux témoigner que les insoupçonnés en-dessous des imposantes routes souvent imposées se révèlent parfois être de bien jolies surprises et qu’il suffit peut-être pour les découvrir — sans se détourner complètement des voix obligatoires puisque finalement génériques éclatants des cheminements individuels — de s’autoriser comme le raconte Thierry Goliris et son groupe dans la chanson entendue ce jour-là à aller « lo samdi rod tamarin ».

Kala Livalisse

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