LES PLANTATIONS NE SUFFIRONT PAS À RETENIR TOUT LE SABLE DE L’HERMITAGE
Ce ne sont pas les racines des filaos qui s’échappent vers le ciel mais le sable qui s’enfuit de la plage vers la mer. Le processus s’accélère sous l’effet de la houle. Les plantations de haut de plage ne suffiront pas à protéger ce littoral fragile…
Il y a quelques semaines, une houle australe de grande envergure a touché les côtes réunionnaises donnant lieu à des mouvements impressionnants qui ont fait le tour du web pays : des vagues envahissant la rue littorale de Terre-Sainte ou pénétrant dans les cases les plus proches de l’océan à Bel Air Saint-Louis.
A l’instar des épisode caniculaires observés dans l’Hexagone, ces événements sont évidemment aggravés par le réchauffement climatique et la montée du niveau de l’océan. A cet égard, la côte ouest, est particulièrement fragile… Et fragilisée par son urbanisation de ces dernières décennies. Elle est sous surveillance. Les houles d’hiver accélèrent chaque année son érosion. Le sable s’en va et ne revient pas forcément. Ce qui laisse croire que les racines des filaos de bord de plage s’extraient du sol comme si elle cherchaient à s’en échapper en devenant aériennes.
Danielle Jay, riveraine hautement concernée des côtes saint-gilloises en a fait un film, en 2018, disséquant les principales causes de cette érosion. Roland Troadec, docteur en géologie marine, spécialistes de la sédimentologie, de la dynamique littoral et des courants en est le principal interlocuteur.
Des plantations « fusibles »
Pour cette saison, il dresse un bilan objectif se préservant de tout sensationnalisme. Il y a eu par le passé des vagues de tempête qui ont pénétré plus profondément dans les terres de l’Hermitage. La côte était alors moins construite et, donc, les conséquences sur les habitation moins importantes.
Le scientifique relève l’effet bénéfique des plantations réalisées ces vingt dernières années au droit du lagon. Les espèces plantées (veloutiers, manioc marron, raisin de mer, lianes patates à Duran, lataniers, etc.) en haut de plage ont certes été submergées, peut-être détruites pour certaines d’entre elles, mais elles ont joué leur rôle de « fusibles ». Surtout, contrairement à un « point dur » — un mur ou des souches de filaos — elles ont amorti les vagues évitant l’effet de rebonds et de ressac qui arrachent le sable de la plage pour l’évacuer au large.
La série de photos ci-dessous, réalisées par Danielle Jay et Philippe Nanpon, illustre le rôle que jouent les replantations pour lutter contre l’érosion et la perte de sables :
Ses replantations, qui montrent là tout leur intérêts, ne suffiront cependant pas à enrayer le processus d’érosion sur le long terme, si les pouvoirs publics ne limitent pas « les points noirs » que sont l’urbanisation de l’arrière plage, son imperméabilisation et les rejets d’eau douce.
Franck Cellier
Rivages en péril
Un film de Danielle Jay réalisé en 2018