HOMMAGE
Peu connu dans le monde du show-biz, Michel Bühler aura marqué son époque, … et pas seulement en Suisse d’où il est originaire.
Lorsqu’on évoque la Suisse, on pense aux banques, au côté « carré » voire étriqué de son fonctionnement, … On n’imagine pas qu’un Suisse puisse s’opposer, être anti – militariste, provocateur parfois. L’artiste Michel Bühler sortait du cadre !
D’abord instituteur, guitariste, amateur de Brassens et Brel, il est à la fois chanteur, écrivain, acteur, poète, compositeur et dramaturge. Quand il évoque l’Auberson, où il résidait avec Anne sa compagne, à quelques kilomètres de Sainte-Croix dans le Jura Suisse, il suffit de fermer les yeux pour imaginer les forêts, les ruisseaux, la brise, les chants d’oiseaux, ce calme montagnard, et les gens qui y habitent …
Mais dans sa longue carrière (250 chansons !), Michel Bühler, qui se considérait comme « un Suisse ordinaire » a parfois égratigné son pays, qu’il considérait un peu trop sûr de lui, en particulier un certain Blocher, patron de l’extrême droite suisse (Yodel pour Christophe Blocher). Artiste engagé, ses textes sont souvent ironiques, emprunts de colère, mais c’est sans aucun doute l’humanisme qui caractérise le plus le personnage.
Qualifié souvent de « fils spirituel de Gilles Vigneault » (artiste québécois), dont il a fait plusieurs premières parties de spectacles, il a aussi côtoyé de nombreux chanteurs à textes, dont François Béranger (autre artiste engagé) auquel il a rendu un vibrant hommage avec Jofroi, Marie Tout Court et Thomas Pitiot, concerts intitulés : « Laissez-Vous Béranger ».
Michel Bühler a fait rayonner ses chansons dans toute la francophonie, a obtenu en 2013 le prix Jacques Douai, un prix référence dans le domaine de la chanson. Il envisageait sa carrière un peu comme celle d’un journaliste. « Dans mon rêve, si quelqu’un a envie dans cinquante ou cent ans de voir ce qui s’est passé pendant la fin du 20e et le début du 21e siècle, cela me ferait plaisir qu’il aille relire mes chansons. Pour leur témoignage sur une époque, à la manière des articles de presse.«
Ayant beaucoup voyagé (Malaisie, Palestine, Nicaragua, Sahara…), il parlait de tout dans ses chansons, mais peut-être avant tout de ceux qui se battent contre l’injustice, et de ceux qui souffrent un peu partout dans le monde (les Immigrés, Chanson pour Victor Jara, Guantanamo, Kosovo, Ainsi parlait un vieil Indien, Ceux qui disent non, …).
Il a aussi signé plusieurs livres dont « On fait des chansons » (énorme recueil avec ses chansons et ses partitions), « Jura : Recueil de textes autobiographiques », où il fait l’éloge de son Jura natal, « La parole volée », où il évoque la fermeture des usines Hermès Précisa, à Sainte-Croix… Pour le théâtre, il a notamment écrit la pièce « Le Retour du Major Davel », qu’il a joué à de très nombreuses reprises en Suisse, en France et ailleurs.
C’est encore un « grand » de cette chanson francophone à texte qui s’en va. La meilleure façon de se souvenir de lui, c’est d’écouter ses CD (ou d’aller sur Youtube…).
Dominique Blumberger
La première réaction de son grand ami, l’artiste belge Jofroi (trois tournées à la Réunion) : « Ah l’ami Michel, te voilà envolé bien loin de ton corps, jusqu’au monument aux oiseaux, dans le ciel… Tant de grands moments partagés qui ne s’effaceront pas, depuis notre première rencontre en 1973, en Belgique, en première partie de Gilles Vigneault ! Ami fidèle, on boira encore à ta santé, toute l’équipe du « Laissez-vous Béranger »… j’en perds mes mots… »
Liens :
portrait : https://www.youtube.com/watch?v=gbPxbO5BOmU
Chanson « Les Immigrés » : https://www.youtube.com/watch?v=FpetJl_LuyE
Chanson « Vulgaire » : https://www.youtube.com/watch?v=b-f-7cxWkeY
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