Rupture du jeûne lors du ramadan.

La mosquée de Saint-Pierre rassemble la communauté durant le ramadan

À la mosquée de Saint-Pierre, la rupture du jeûne dépasse le simple repas. Pendant le mois de ramadan, ce lieu de culte devient un espace de partage, de solidarité et d’échange. Ibrahim Cadjee, président de l’association des fidèles (Association des musulmans sunnites de Saint-Pierre), nous explique la symbolique de ce mois sacré pour la communauté musulmane de La Réunion.

Lorsque la fin de journée approche sur Saint-Pierre, une effervescence envahit la mosquée. Fidèles et bénévoles s’activent pour préparer la rupture du jeûne, un moment empreint de convivialité qui dépasse largement la simple reprise alimentaire après une journée de privation. Ici, la mosquée n’est pas seulement un lieu de prière : elle est le cœur battant d’une communauté, un espace de partage, de transmission et de solidarité, tout en incarnant l’esprit d’ouverture propre à l’île de La Réunion.

Une histoire de résilience et d’adaptation

La présence musulmane à La Réunion remonte aux premiers temps du peuplement de l’île. D’abord importés comme esclaves d’Afrique ou des Comores, les premiers musulmans furent contraints d’abandonner leur foi, la religion catholique étant alors la seule autorisée. Ce n’est qu’au XIXe siècle, avec l’arrivée de commerçants indiens du Gujarat, que la communauté musulmane put s’organiser librement. L’inauguration de la mosquée de Saint-Pierre en 1913, après celle de Saint-Denis sept ans auparavant, marqua un tournant, devenant un repère essentiel pour les fidèles et un témoignage de leur volonté d’intégration et de transmission des valeurs islamiques.

Appel à la prière.
Le muezzin appelle à la prière de Asr.
Fidèles à l'intérieur de la mosquée
Des fidèles sont réunis dans l’attente du début de la prière de Asr.
horaires des prières
Un tableau indique les horaires des cinq prières de la journée. Il indique pendant le mois du ramadan le début et la fin du jeûne.
Des fidèles discutent théologie et actualité à l’intérieur de la mosquée.
purifications avant la prière
Un fidèle fait ses ablutions afin de se purifier avant d’aller prier.
Elèves de la médersa à la mosquée
Des élèves de la médersa discutent une heure avant la rupture du jeûne. Chaque soir du mois du ramadan, cinq d’entre eux vont lire des passages du Coran dans les autres mosquées de Saint Pierre.

Une mosquée au service de la communauté

Aujourd’hui, la mosquée est bien plus qu’un simple lieu de culte. Gérée comme une association, elle remplit plusieurs missions : assurer la prière, transmettre le savoir religieux à travers la médersa (école coranique) et renforcer les liens sociaux en venant en aide aux plus démunis. Pendant le ramadan, cet engagement se concrétise davantage avec des actions solidaires marquantes, notamment une distribution de repas organisée chaque dimanche pour les personnes précaires.

Un mois de rappel et de partage

« Le mois de ramadan, c’est un condensé en un mois », explique Ibrahim Cadjee, président de l’association des fidèles. « Il nous rappelle notre foi, nos valeurs et notre histoire. Le jeûne est une épreuve physique, mais il doit aussi nous pousser à travailler notre spiritualité et notre rapport aux autres. » 

Chaque soir, la rupture du jeûne est un moment fort. Vers 17h15, le muezzin appelle à la prière de Asr, la troisième des cinq prières quotidiennes. Tandis que certains fidèles prient ou lisent le Coran, d’autres s’affairent en cuisine. Les enfants, en vacances scolaires, participent activement à l’organisation sous la supervision des adultes, distribuant des dattes et remplissant des carafes d’eau de rose. Un geste simple mais significatif, comme le souligne Ibrahim Cadjee : « Transmettre les valeurs de l’Islam passe par ces petits gestes ». Un fidèle va plus loin, « les moments de communion de la vie religieuse sont ce qui permet aux jeunes générations de ne pas perdre de vue les valeurs humaines » dans une société où « les liens se distendent avec les réseaux sociaux ». 

La générosité des fidèles est palpable. Chaque jour, l’association reçoit des dons variés : produits alimentaires, plats préparés, gâteaux faits maison par des bénévoles. « Une dame nous apporte des gâteaux tous les jours pour la rupture du jeûne », raconte Abdoussamad, un habitué des lieux.

Lorsque le soleil disparaît derrière l’horizon, aux alentours de 18h45, les fidèles se rassemblent autour des nattes étendues sur le sol. Ils partagent un repas composé de dattes, de samoussas et de gâteaux avant de se réunir pour la prière du Maghreb, qui vient clôturer la journée de jeûne.

préparation de repas de rupture du jeûne
Des jeunes fidèles remplissent des carafes avec un mélange de lait à l’eau de rose qui sera bu lors de la rupture du jeûne.
Fidèle lisant le Coran
En attendant la prière de la rupture du jeûne, certains fidèles s’isolent pour lire des versets du Coran.
Durant les vacances scolaires, les enfants s'occupent en préparant le repas de rupture du jeûne.
Durant les vacances scolaires, les enfants s’occupent en préparant le repas de rupture du jeûne.
Les enfants répartissent la nourriture pour la rupture du jeûne.
Les enfants répartissent la nourriture pour la rupture du jeûne.
Dans les cuisines de la mosquée, on prépare des samoussas pour rompre le jeûne.
Dans les cuisines de la mosquée, on prépare des samoussas pour rompre le jeûne.
Fidèles lors de la prière du Maghreb qui marque la fin du jeûne quotidien.
Fidèles lors de la prière du Maghreb qui marque la fin du jeûne quotidien.

Un modèle réunionnais de cohabitation

À La Réunion, la cohabitation entre croyants et non-croyants se distingue par son harmonie. Ici, chacun pratique sa religion en toute liberté, dans le respect des autres. « Je suis réunionnais, je suis français et de confession musulmane. Aucune de ces notions ne peut être dissociée de mon identité », affirme Ibrahim Cadjee.

Ainsi, la mosquée de Saint-Pierre, en particulier durant le Ramadan, illustre cette richesse du vivre-ensemble. Elle incarne la transmission des valeurs, la solidarité et l’ouverture aux autres, rappelant que la foi ne se limite pas à un dialogue avec Dieu, mais se construit aussi à travers le lien avec la communauté et la société tout entière.

Olivier Ceccaldi (texte et photos)

(Contribution bénévole)

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