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Choisir sa mort : bientôt un droit légal en France

LIBRE EXPRESSION

Sophie B. a 74 ans lorsqu’elle reçoit le diagnostic qui bouleverse sa vie : un cancer généralisé, sans espoir de guérison. Les médecins sont formels : il ne reste que quelques mois, peut-être moins, marqués par une dégradation progressive et des souffrances croissantes. Face à cette réalité brutale, Sophie prend une décision qui lui appartient entièrement : elle choisit de partir avec dignité, entourée de l’amour des siens, grâce à l’euthanasie assistée par le corps médical.

Avant le 27 mai dernier, en France, l’euthanasie n’était pas légale. Mais l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi sur « l’aide à mourir », qui légalise sous conditions strictes l’euthanasie et le suicide assisté pour les personnes majeures atteintes d’une maladie grave et incurable en phase avancée ou terminale.

Ce projet de loi précise des conditions strictes, dont un délai de réflexion de deux jours, et prévoit que la décision soit prise avec la participation de plusieurs professionnels de santé, tout en respectant la clause de conscience des soignants.

Selon une étude de l’Ifop menée en 2024, plus de 85 % de la population française serait favorable à cette réforme. Avec l’adoption de la loi légalisant l’euthanasie et le suicide assisté, la France devient le quatrième pays européen à autoriser ces deux pratiques, après les Pays-Bas (2001), la Belgique (2002) et le Luxembourg (2009).

Pour ses défenseurs, l’euthanasie assistée et le suicide médical représentent l’ultime expression de la liberté humaine : choisir les conditions de sa propre fin plutôt que de subir une agonie imposée par la maladie. Cette approche reconnaît que la souffrance n’est pas seulement physique mais aussi existentielle, touchant à l’identité même de la personne. Quand les traitements ne peuvent plus guérir et que les soins palliatifs atteignent leurs limites, l’aide médicale à mourir offre une alternative respectueuse de la volonté du patient.

Pourtant, les responsables de tous les cultes français – catholique, protestant, orthodoxe, juif, musulman et bouddhiste – dénoncent unanimement cette évolution comme une régression majeure, « un dévoiement de la médecine » qui transgresse le serment d’Hippocrate selon lequel : « Je ne remettrai à personne du poison, si on m’en demande, ni ne prendrai l’initiative d’un pareil acte. »

Ainsi, le débat éthique oppose frontalement deux visions : d’un côté, les défenseurs de l’autonomie individuelle, qui y voient un ultime droit de choisir sa mort dans la dignité ; de l’autre, les gardiens de la tradition médicale, pour qui « ne pas provoquer la mort délibérément » reste un principe inéluctable du serment d’Hippocrate.

Cette tension révèle un clivage profond entre une conception humaniste de la liberté individuelle et une éthique médicale millénaire qui fait du médecin un « serviteur de la vie ». Ainsi, le serment d’Hippocrate s’oppose clairement à l’euthanasie.

Madame Corine Fontaine, médecin généraliste experte en trauma, insiste sur le fait que « le personnel soignant porte une lourde pression, confronté à la responsabilité de prendre des décisions cruciales qui impactent directement la vie des patients. Chaque choix doit être fait avec rigueur, conscience et humanité, malgré le poids de l’urgence et de la douleur. La peur de commettre une erreur ou de ne pas répondre aux attentes ajoute un stress considérable. Ils doivent souvent trouver l’équilibre entre protocoles stricts et attention personnalisée, tout en gérant leurs propres émotions ».

Comment rester insensible à la chanson poignante de Françoise Hardy, atteinte du cancer du larynx, faisant de l’euthanasie assistée un combat, interpellant directement le Président de la République ? Dans ce texte, elle signe son testament « Le Large » :

« Larme viendra/ aucun quartier de lune/ aucun… étrangler/ Aucun nuage de brume dans mes yeux délavés/ Et demain tout ira bien, tout sera loin//
Là au final quand je prendrai le large/ Tout sera loin, donne-moi la main/ Aucun sable ni la dune n’arrête le sablier/ Aucun quartier de lune, aucun…/ Et demain tout ira bien, tout sera loin/ Là au final quand je prendrai le large/ Tout sera loin, donne-moi la main/ Là au final quand je prendrai le large ».

Le vote solennel du Sénat sur la loi relative à l’euthanasie (aide à mourir) en France est prévu pour le mois d’octobre prochain.

Et vous, qu’en pensez-vous ?

Frédérique Welmant

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A propos de l'auteur

Frédérique Welmant

Reporter citoyen. Salazienne et Réunionnaise depuis plusieurs générations dès les premiers arrivants sur l’île, je suis une plume engagée et bénévole sur la protection de l'environnement, de la biodiversité et de la place de l'homme dans une économie vertueuse de manière à léguer à nos enfants et petits-enfants une île authentique et riche de sa faune, de sa flore et de ses maifiques paysages… mais également riche de sa mixité et de ses talents.

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