Les Bretons s’organisent. Parallèle Sud a assisté, à Lannion dans les Côtes d’Armor, à une assemblée citoyenne destinée à organiser la journée du 10 septembre à l’appel du média local Le Canard Réfractaire.
C’est l’été en Bretagne. Nous sommes le 15 août, à Lannion, dans les Côtes d’Armor, et la torpeur du climat presque tropical de la canicule est au zénith, à peine rafraichie par l’air de la mer. Il est 15h30 et l’heure du rendez-vous, entre la poste et la guinguette du bord de l’estuaire du Léguer approche.
Déjà, quatre jeunes gens sont présents, repérables à leur pancarte en carton. Rapidement, ils déploient une banderole peinte sur un drap et la posent dans l’allée piétonne pour indiquer le point du rendez-vous. Tout le monde a entendu parler du 10 septembre prochain et, en Bretagne terre de luttes, il est temps de chercher à s’organiser.
C’est Yohan, de la chaîne Youtube Le Canard Réfractaire, qui a appelé dans une vidéo au rassemblement des bonnes volontés. Rapidement, une cinquantaine de personnes sont réunies. Un cycliste est même venu avec son gilet jaune, celui qu’il portait pendant les mobilisations démarrées en 2018. La réunion débute dans la cacophonie. Chacun, déjà, tente de prendre la parole, reproche aux autres leurs positionnements passés ; les gens se connaissent, ils ont déjà milité ensemble. On trouve que l’assemblée n’est pas nombreuse, un Nantais de passage remarque que, pour une première prise de contact, l’affluence est au contraire tout à fait respectable et observe « la défiance contre toute forme d’organisation ».
Alors que Yohan commence son reportage pour Le Canard Réfractaire, Julia prend les choses en main. On utilisera la méthode du débat mouvant qui permet à tout le monde de s’exprimer et de se positionner. On part de trois questions : « Comment ça va ? » « Qu’est-ce qui ne va pas d’après toi ? » « Et qu’est-ce qu’on peut faire pour que ça change ? ». Des post-it sont distribués, remplis, avant d’être dépouillés. Une ligne est tracée sur le sol partageant l’assemblée en deux et, à chaque question, il faudra se placer du côté des « pour » ou du côté des « contre ». Simple, basique, efficace.
« Nous ne sommes pas là pour donner des mots d’ordre, nous sommes là pour que les gens s’organisent », soulignent les organisateur de l’ « audition citoyenne » qui suggèrent, comme moyens d’action, les « actes d’omission (comme le boycott de la consommation), les actions directes ou les actions indirectes ».
Prendra ? Prendra pas ?
Blocages, grèves, occupation de l’espace public sont évoqués ; manifestations festives en fanfare sont plébiscités. « S’il faut bloquer un rond-point, que ce soit celui qui mène à l’hypermarché », proposent plusieurs participants qui ont aussi dans le viseur le gouvernement Bayrou, la loi Duplomb, les acteurs de l’agro-industrie responsables des algues vertes, une calamité dans la région. De l’expérience des Gilets jaunes, un goût amer apparaît ; « il faut plus de réflexion, une autre stratégie. Nous étions très nombreux et ça n’a rien donné, il faut trouver autre chose ».
Consommer local, « on le fait déjà » ; multiplier les sources d’information, s’adresser aux médias indépendants, payer en liquide, occuper les grandes surfaces, saturer les caisses, déborder le système, laisser passer les caddy sans payer, organiser des crèches et des cantines solidaires, aller sur les marchés pour convaincre, et organiser et communiquer via des boucles Telegram, un média prisé par les partisans de l’action du 10 septembre.
Prendra ? Prendra pas ? Nul ne le sait encore. En tout cas, en Bretagne, on essaie.
Philippe Nanpon
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