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[Identité] Cinq peuples, cinq couleurs

DRAPEAU RÉUNIONNAIS

En quelques années, à la fin du siècle dernier, plusieurs drapeaux réunionnais ont été créés. Aujourd’hui, nous présentons celui de Franswa Sintomèr, qui représente la culture réunionnaise, porté par l’association MLK comme Mouvman Lantant Koudmin.

sharl Sintomèr drapeau MLK
Sharl Sintomèr présente le drapeau MLK.

Jusque dans les années 80, un seul drapeau était valide pour les Réunionnais, il était bleu blanc et rouge, comme pour tous les autres Français. Mais aujourd’hui, l’île revendique son identité et, comme nombre de régions françaises, La Réunion possède son drapeau. En réalité, il y en a au moins quatre.

A commencer par le drapeau MLK, à cinq couleurs comme l’île de La Réunion et comme les peuples qui l’habitent. Pour comprendre ce que représente le drapeau MLK de La Réunion, nous sommes allé voir le frère de son inventeur. En effet, Franswa Sintomèr nous a quittés trop tôt, et c’est Sharl qui a repris le flambeau. 

Group Kulturel Réunionnais à Paris

Tout débute avec l’exil de Franswa Sintomèr en région parisienne dans les années 70. Comme souvent, c’est avec l’éloignement et confronté à d’autres valeurs que l’on prend conscience de l’importance de sa propre culture. Franswa avait déjà mis en place un « Group Kulturel Réunionnais » à Paris en 1977. Il édite un journal en créole, Nou Rényoné Koméla, donne des cours de créole, réfléchi à sa graphie, aide ses concitoyens.

En 1982, il rentre et transforme le GKR en MLK comme Mouvman Lantant Koudmin (*), pour développer et défendre la culture, la musique, la langue réunionnaise. « Il a choisi une voie informelle. Il s’agissait pour lui d’éviter la récupération politique », témoigne Sharl Sintomèr. « L’association culturelle est officialisée. Avec les années 80, c’est l’époque d’une sorte de révolution culturelle avec l’émergence de groupes comme Ziskakan, Bastèr, Maronèr Koméla et d’autres ». 

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Franswa Sintomèr donne des cours de langue créole au CHU, pour les médecins, avec Lékip Médikal Rényoné Fransé. Il anime aussi une émission de radio sur les tisanes, un pan important de la culture réunionnaise. Il crée des mots aujourd’hui usuels comme « zoréol », « sobatkoz » ou « fonnkèr ». Et, en 1984, se penche sur la question d’un drapeau représentant toutes les composantes de la société réunionnaise. 

Charte d’utilisation

Ça prendra quelques années avant d’être officialisé. « Au sein du MLK, entre 1995 et 97, on a discuté de quelle proposition choisir. Le motif inventé et dessiné par mon frère attendra jusqu’en 2008 pour qu’on le nomme drapeau La Réunion », se souvient Sharl Sintomèr. « On le voyait dans les défilés syndicaux, les événements culturels ou revendicatifs », poursuit-il, précisant que le but était « une prise de conscience par les Réunionnais » de leur culture.

Cinq couleurs, cinq nations. Un triangle rouge représente le volcan, « La Réunion physique », le noir « une partie de l’histoire de La Réunion », celle des débuts et de l’esclavage, le jaune pour le soleil et la lumière, le bleu pour le ciel et l’océan Indien, et le vert pour la végétation, la forêt, la nature et la liberté. « Dans les cinq couleurs sont représentées aussi les trois continents d’où viennent les habitants de La Réunion, l’Asie, l’Afrique et l’Europe », ajoute Sharl Sintomèr.

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En 2014, Sharl et Franswa rédigent une charte d’utilisation et, après le décès de son frère, Sharl reprend le flambeau de l’association. « J’ai dû lutter contre la diabolisation et l’exploitation commerciale », indique-t-il. « Il ne faut pas confondre identitaire et indépendantiste. » Ainsi, le motif est déposé à l’INPI et nul ne peut l’utiliser sans l’accord du Mouvman Lantant Koudmin. Sont refusés systématiquement les tapis, savates – on ne marche pas sur le drapeau  – et autres maillots de bains. 

Et, devant la proposition de plusieurs drapeaux pour La Réunion, le militant estime que « c’est le peuple qui choisira avec le temps ». « Nous sommes dépositaires, pas propriétaires », souligne-t-il, reconnaissant volontiers que les quatre autres drapeaux « ont aussi apporté à La Réunion, à la langue créole ».

Philippe Nanpon

(*) « Bann dalon i mèt ansanm po èd azot antrozot po pous dovan : Iagrikiltir, lamontraz kréol rényoné èk fransé, lavansman kréol dann radyo, zoumal ; développer l’entraide entre ses membres par l’agriculture, l’enseignement du créole réunionnais et du français ; promouvoir le créole à la radio, dans les journaux, etc. »

Contact: 0692 55 31 26

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Peuples et identités

Peuples et drapeaux à La Réunion, ainsi que peuples et cultures.

A propos de l'auteur

Philippe Nanpon | Journaliste

Déménageur, béqueur d'clé dans le bâtiment, chauffeur de presse, pompiste, clown publicitaire à roller, après avoir suivi des études d’agriculture, puis journaliste depuis un tiers de siècle, Philippe Nanpon est également épris de culture, d’écologie et de bonne humeur. Il a rejoint l’équipe de Parallèle Sud pour partager à la fois son regard sur La Réunion et son engagement pour une société plus juste et équitable.

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