Ce mercredi 20 novembre, s’est tenu à la Kour, tiers lieu associatif situé à Saint-Leu, un atelier de la Fresque du sexisme. Trois heures, une animatrice, cinq participantes, et une thématique, voici le programme d’une matinée rythmée par les échanges et le partage des émotions. Parallèle Sud a assisté à cet évènement et revient sur la puissance de l’outils.
En ce mercredi de novembre ensoleillé, quatre femmes sont venues à l’atelier, ouvert au grand public, de la Fresque du sexisme pour comprendre les rouages de cette problématique systémique. Au programme, trois heures pour comprendre les origines et conséquences du sexisme, grâce à des cartes que l’on nous nous invite à remettre dans un ordre logique.
Le RDV est donné à la Kour, tiers lieu saint-leusien, aussi lieu d’accueil de spectacles et espace de co-working, situé dans le quartier de Quatre-Robinets. Après avoir passé le jardin parsemé de petites tables, sous les arbres, on rentre dans une petite salle de réunion. Sur un tableau blanc, on peut lire la phrase suivante “Contribuer à une société égalitaire et inclusive, par la diffusion de l’outils Fresque du Sexisme grâce à un réseau engagé incarnant nos valeurs”. Entourent la phrase des messages inscrits sur des petites cartes. Parmis eux, on lit “écoute inclusive”, “souveraineté” ou encore “espace de liberté”. Le cadre est posé. Margot Peigné est la facilitatrice de l’atelier, elle se présente, et précise que son rôle est de structurer l’atelier en surveillant le temps, mais pas les discussions. L’atelier prend racine dans un cadre “bienveillant et safe” d’expression et de partage autours d’une thématique pourtant complexe et grave.
Apports théoriques et discussions à coeur ouvert
L’atelier débute par une première phase de réflexion et de mise en lien des concepts généraux. Par lots, on nous invite à prendre connaissance des cartes et à réflechir à leurs sens, et à leur lien d’influence et de causalité. Une gymnastique d’esprit se créé autours des concepts de stéréotypes de genre, discriminations sexistes, patriarcat, etc. Les distinctions sont faites, et les facteurs sont identifiés. Les concepts théoriques sont accompagnés de chiffres, provenant de plusieurs sources à l’instar du Haut Conseil à l’Egalité entre les Femmes et les Hommes, l’INSEE ou encore l’INED.
L’atelier est cadencé par des phases de discussion, où l’on nous invite à deviner les différents types d’injonctions auxquelles sont soumises les femmes par le biais de leur apparence physique, de leurs comportements en collectivité, de leurs compétences ou de leurs qualités. Naturellement et en tant que femmes, les idées fusent et la liste d’injonctions s’allonge. Parmis elles, ce qu’on attend de nos tenues vestimentaires qui doivent rentrer dans le moule de la féminité mais ne pas déborder sur de la vulgarité, notre corps qui ne doit être ni trop gros ni trop mince, nos poils, nos émotions, notre attitude ou nos qualités, en bref, on comprend vite que toutes les caractéristiques de notre personne, en tant que femme, passent au crible d’un système patriarcal à l’image d’un rouleau compresseur qui nous faconne dans notre chair la plus profonde.
Des idées pour déconstruire le patriarcat?
S’en suit une deuxième phase de pause et de partage des émotions, à laquelle précède une partie d’identification des leviers d’action pour lutter contre le sexisme. Par le biais de l’éducation ou de la représentation avec de nouveaux modèles dans les médias et sphère culturelle, par exemple, on nous demande d’imaginer des solutions. Par ou commencer? Détruire les stéréotypes de genre avec les jeux pour enfants, rétablir la parité dans les représentations publicitaires, créer de nouveaux modèles féminins qui renversent les schémas patriarcaux, s’attaquer efficacement aux violences sexistes et sexuelles, ou encore déconstruire la culture du viol, les idées sont nombreuses et inexhaustives.
Mais la démarche va plus loin encore, car la dernière phase de l’atelier se traduit pas une mise en situations concrète avec des exemples de la vie quotidienne, où l’on nous invite à réagir à des propos ou retranscriptions fictives de comportements sexistes. La encore, des outils de réponse sont donnés par le jeu.
Un atelier qui ne laisse pas indifférent.e
Parmis les participantes, Rania et Laura m’ont fait part de leur ressenti à l’issue de l’atelier. “ C’était la première fois pour moi et j’ai été ravie de me prêter à cet exercice. C’est un bel outils de sensibilisation quel que soit le degré d’attrait que l’on a pour le sujet, au départ. Cela donne envie d’en parler à son entourage, et aux hommes cis surtout”, m’explique Rania.
Pour Laura, c’est autant de questions que de réponses apportées: “Cela donne des éléments de rhétoriques très intéressants, et permet de se rendre compte que certaines de nos réactions en tant que femmes sont non seulement légitimes mais utiles pour faire avancer les choses. C’est un vrai outils pour toucher d’autres personnes qui ne sont pas dans des cercles engagés, et cela pose la question plus générale de comment sensibiliser des personnes très éloignées du sujet. En résumé, cet atelier m’a donné des réponses mais m’a apporté des questions aussi.”
Diffuser pour gagner du terrain
Derrière cet atelier, et inspirée de l’association de la Fresque du Climat, a été créée la la Fresque du sexisme, en 2020. Depuis, plus de 9000 personnes ont été sensibilisées grâce à cet outils d’intelligence collective. Margot Peigné anime ce jour la sa sixième fresque du sexisme à la Réunion, tandis que toutes ont fait l’objet d’ateliers ouverts au grand public.
Depuis qu’elle utilise cet outils de Fresque, bénévolement, Margot Peigné a vu plusieurs réactions et émotions advenir pendant l’atelier. Elle raconte : « Souvent, au milieu de l’atelier, il y a un espèce d’abattement général de la part des participant.e.s. Certain.e.s sont stupéfait.e.s de l’ampleur du problème et n’avaient pas visualisé l’étendue de ses origines et conséquences. Aujourd’hui, vous étiez toutes sensibilisées déja, mais j’ai réellement envie d’aller toucher des gens qui n’ont pas demandé à ce qu’on leur parle de ça”. Pour cela, Margot Peignet a déja travaillé sur l’adaptation du jeu à d’autres contextes comme celui de l’entreprise, avec la création de cartes spécifiques. Avec son entreprise Egalima, la facilitatrice souhaite développer ses interventions en milieu professionnel, et peut encadrer des groupes allant jusqu’à quinze personnes.
Un long et périlleux travail de déconstruction est entamé pour détruire l’impact du rouleau compresseur du patriarcat, grâce à des outils bien pensés comme la Fresque du Sexisme et des personnes qui oeuvrent à les faire vivre. Enfin, revenons sur cette phrase dite par Margot Peigné pour conclure l’atelier: “Je crois que pour changer nos sociétés, la planète et l’humain, il faut changer nos imaginaires et créer de nouveaux récits. Et le plus important de tout, pour agir, il faut comprendre, d’ou la puissance de l’outils de la Fresque”.
Sarah Cortier
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