Yacine Haffaf

Le docteur Yacine Haffaf témoigne d’« un cimetière à ciel fermé » à Gaza

LIBRE EXPRESSION

Vendredi 22 août, face à un auditoire attentif à Saint-Denis, le chirurgien Yacine Haffaf, invité par l’Association Réunionnaise pour la paix et la mairie de Saint-Denis, a livré un récit bouleversant de l’enfer  vécu à Gaza, où, malgré l’oppression, la dignité humaine demeure intacte. La veille de son départ, j’ai eu le privilège de partager avec ce grand humaniste un échange riche et profond.

L’enfer médical de Gaza 

À Al-Mawasi, l’hôpital de campagne de la Croix-Rouge illustre les limites extrêmes de la médecine en zone de guerre. Le docteur Haffaf décrit une réalité brutale : « Nombreux perdent la vie avant d’être pris en charge ». Conçu pour 60 lits, l’établissement a dû accueillir jusqu’à 240 patients lors des flambées de violence, transformant chaque couloir en salle d’attente improvisée.

Privés de services de réanimation et de soins intensifs, les médecins n’ont pour armes que leur expertise et leur dévouement. Mais au cœur de cette urgence permanente, une autre épreuve s’impose : le « tri médical »

Ce procédé, aussi implacable que nécessaire, oblige les soignants à décider qui sera soigné en priorité. Derrière cette mécanique, ils doivent en quelques minutes poser un diagnostic et apporter leurs premiers soins à ceux qui ont des chances de s’en sortir pendant que d’autres agonisent. « Ce n’est pas éthique mais on n’a pas le choix », confie le chirurgien. Dans ce chaos organisé, chaque décision devient un sacrifice au nom de l’urgence, transformant chaque geste chirurgical en une équation impossible entre l’espoir et la résignation.

Comment imaginer des amputations « sans anesthésiants, seulement avec des antalgiques », transformant chaque geste chirurgical en sacrifice au nom de l’urgence. Malheureusement, malgré les efforts le taux de mortalité post-opératoire reste élevé.

Docteur Haffaf décrit le quotidien à Gaza en projetant sur écran des photos et vidéos difficilement soutenables :  les sirènes hurlent sans relâche dans l’air saturé de poussière et de débris, tandis que les bâtiments éventrés révèlent leurs entrailles de béton et d’acier tordu – une population traumatisée fouille désespérément sous les décombres à la recherche de corps ensevelis, leurs cris de désespoir se mêlant au fracas des bombardements qui continuent de pleuvoir sur ce qui reste de leur monde. 

Dans une course contre la montre, les survivants transportent leurs proches blessés vers des tentes médicales de fortune, seuls refuges d’espoir dans ce paysage apocalyptique où plus de 640 000 personnes font face à des conditions de famine catastrophiques.

Les médecins submergés travaillent dans des conditions impossibles avec seulement 19 hôpitaux partiellement fonctionnels sur 36, réclamant désespérément la remise en service du cordon médical et l’acheminement urgent de médicaments et de colis alimentaires, car aujourd’hui la population meurt littéralement de faim. 

Au milieu de ce chaos où plus de 80% des victimes sont des civils, la médecine ne fait pas de politique mais sauve des vies – qu’il s’agisse d’un blessé israélien ou palestinien, les principes de neutralité et d’impartialité médicale restent sacrés même quand le monde s’effondre. 

Dans ces tentes qui oscillent sous le souffle des explosions, chaque geste médical devient un acte de résistance contre la mort, une affirmation que l’humanité persiste même dans l’enfer de la guerre 

Un cimetière d’innocents

Gaza dévoile son visage défiguré : 28 enfants meurent chaque jour. Plus de 17 000 étoiles trop tôt éteintes depuis octobre 2023. 70% des victimes sont des femmes et des enfants – ces gardiens de l’avenir sacrifiés sur l’autel de l’indifférence.

La famine, officiellement confirmée le 21 août 2025 par le Programme alimentaire mondial – une première au Moyen-Orient – touche déjà plus d’un demi-million d’êtres humains.

 Elle souligne la gravité extrême de la crise alimentaire, qui prive déjà plus de 500 000 personnes d’un accès suffisant à la nourriture. Cette annonce devrait avoir pour effet de mobiliser urgemment la communauté internationale pour intensifier l’acheminement d’aide humanitaire et attirer l’attention des médias et des donateurs sur cette urgence sans précédent dans la région.

La flottille de Waves of Freedom : le drapeau de la Réunion flotte pour Gaza

Aujourd’hui président de Waves of Freedom – France,  le docteur Haffaf transforme son combat en une révolution pacifique, coordonnant 44 délégations nationales dans ce qui résonne comme une immense symphonie de solidarité humaine.

L’opération originale des flottilles de Waves of Freedom s’inscrit dans la plus grande initiative maritime civile jamais organisée dans l’histoire pour briser le blocus de Gaza. Cette coalition internationale rassemble des activistes de 44 pays. Plus de 6 000 militants du monde entier ont postulé pour rejoindre cette mission historique qui prévoit le départ de plusieurs dizaines de bateaux depuis divers ports méditerranéens. Les premiers navires prendront la mer le 31 août depuis l’Espagne, suivis d’autres convois le 4 septembre depuis la Tunisie. Cette mobilisation citoyenne transporte une aide humanitaire vitale comprenant du lait infantile, des médicaments, du matériel médical et des denrées de première nécessité, tout en dénonçant publiquement le blocus illégal imposé à Gaza.

Le drapeau de notre île flottera fièrement en signe de soutien indéfectible à cette noble cause humanitaire, témoignant de l’engagement solidaire des Réunionnais envers les deux millions de Palestiniens assiégés. 

Notre île a généreusement financé 50% de cette flottille historique grâce à une cagnotte participative qui demeure active, démontrant l’ampleur de notre engagement solidaire. Les fonds collectés permettent l’achat et l’équipement des navires, l’acheminement de l’aide humanitaire vitale, ainsi que la couverture des frais logistiques nécessaires à cette mission d’envergure internationale. 

Notre participation financière s’inscrit dans une démarche citoyenne transparente et indépendante, libre de toute affiliation politique ou religieuse. Cette cagnotte solidaire continue de recevoir des dons, reflétant la détermination de notre communauté à soutenir durablement cette cause humanitaire jusqu’à la levée complète du blocus.

Pour conclure le Dr Haffaf  lance un ultime appel : nous ne pouvons affirmer notre humanité si nous ignorons celle des autres. 

Frédérique Welmant

Pour plus d’information Waves of Freedom France : https://waves-of-freedom.fr

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A propos de l'auteur

Frédérique Welmant

Reporter citoyen. Salazienne et Réunionnaise depuis plusieurs générations dès les premiers arrivants sur l’île, je suis une plume engagée et bénévole sur la protection de l'environnement, de la biodiversité et de la place de l'homme dans une économie vertueuse de manière à léguer à nos enfants et petits-enfants une île authentique et riche de sa faune, de sa flore et de ses maifiques paysages… mais également riche de sa mixité et de ses talents.

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