INTERVIEW 1/2: IMPACT DE GARANCE SUR LE RÉCIF CORALLIEN
Le vendredi 28 février 2025, le cyclone Garance passe sur La Réunion. Dans l’est, le nord et l’ouest de l’île, les ravines débordent et se déversent dans le lagon. Les scientifiques espèrent que cet épisode parviendra à faire baisser durablement la température de l’eau, notamment en surface ; finalement, il n’en est rien. Avec les pluies cycloniques, des quantités de boue se déversent sur les coraux. Jean-Pascal Quod, directeur du programme Reef Check France à La Réunion, a répondu aux questions de Parallèle Sud sur l’état de santé des coraux à la suite du passage de Garance.
Depuis 1998, le biologiste Jean-Pascal Quod travaille sur le blanchissement des coraux. Le programme Reef Check s’appuie sur les sciences participatives pour récolter des données, selon un protocole standardisé, sur les coraux partout autour du globe. À La Réunion, une quarantaine de stations de surveillance des coraux sont réparties dans le lagon.
Le 6 mars 2025, à moins d’une semaine du passage du cyclone, Jean-Pascal Quod a dressé un premier constat de ses observations en surface. Avec l’interdiction de baignade appliquée sur toute l’île, il n’a pu qu’observer depuis la terre ferme les premiers symptômes de la catastrophe naturelle sur le récif.
« Pour rappel, au départ, il peut y avoir un intérêt pour les coraux à traverser un épisode cyclonique. Si les eaux chaudes restent en surface, en dessous, les eaux sont froides. Les vents du cyclone poussent l’eau chaude en surface et font remonter les eaux froides à la surface. Ça aurait pu rafraîchir la température de l’eau. Le problème, c’est que l’on voit déjà que les eaux sont revenues à des températures élevées après le cyclone », nous dit-il.
Le directeur de Reef Check explique que le phénomène de blanchissement ne date pas du cyclone et avait déjà lourdement affaibli l’état de santé de ces animaux marins. « Là, aujourd’hui, on peut faire un contrôle visuel, mais le phénomène de blanchissement a commencé il y a plusieurs semaines. Aujourd’hui, le 6 mars, on est en alerte de niveau 2, et on va rester à ce niveau entre quatre et six semaines. La courbe du risque est la plus forte que je n’ai jamais vue depuis 1998 ».
En réponse à ces observations inquiétantes, Jean-Pascal a fait une demande bien précise aux clubs de plongée de l’île : qu’on leur transmette les températures enregistrées par les ordinateurs de plongée, à dix, vingt et trente mètres de profondeur.
Au blanchissement s’ajoute les coulées de boue sur les coraux
Un autre effet du cyclone, qui a fait l’effet d’un « double stress pour les coraux », ce sont les apports en boue.
« On a eu de fortes pluies, donc des apports de boue, particulièrement à Saint-Leu, qui sont venus colmater le corail. On a déjà le stress du blanchissement, auquel s’ajoute le stress de la boue, donc la probabilité que les coraux survivent est affaiblie », m’explique-t-il.
La mortalité des poissons est aussi un élément que surveillera Jean Pascal Quod, puisque ce jour-là, sur la plage de la Saline-les-bains, il observe une murène et un poisson mort, flotter à la surface de l’eau. Est-ce en lien avec le cyclone ? Il lui faudra quelques temps pour comprendre les facteurs de ce phénomène. Par ailleurs, cet élément est ce qu’il appelle « une alerte sur l’état de bonne santé du récif ».
Sarah Cortier
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