Lors de la rentrée des classes ce mardi 19 août, la ministre de l’Éducation Élisabeth Borne passera en coup de vent sur l’île après son passage à Mayotte. Visites d’école, collège et lycée, entretien avec la présidente de Région Huguette Bello, avec Cyrille Melchior président du Département, puis avec l’équipe du rectorat. Sur le papier une journée bien remplie mais qui ne fait pas l’unanimité face aux difficultés du territoire.
Mardi 19 août l’ancienne Première ministre — maintenant ministre de l’Éducation — Élisabeth Borne sera à La Réunion. Une journée intense durant laquelle elle alternera établissements scolaires et réunions avec les politiques. Une journée bien remplie de 8h à 17h, mais insuffisante pour certains.
Le député Jean-Huges Ratenon indique ne pas participer à cette journée, qu’il qualifie de largement insuffisante.
« J’ai été appelé à plusieurs reprises par la préfecture, mais une journée, pourquoi faire ? À chaque fois qu’un ministre ou que le président est de passage, y’a pas d’avancée ».
Via un communiqué, il précise :
« Comme si quelques heures suffisaient pour se rendre compte des problématiques aigües de l’Éducation nationale à La Réunion. Comme si l’on pouvait vraiment écouter les enseignants, les personnels, les familles, les élèves en si peu de temps. Pourquoi vient-elle ? Faire l’après-vente d’une politique de violence sociale et institutionnelle ? Si elle était venue 15 jours avant, cela aurait pu être utile pour aider à préparer concrètement les établissements et soutenir les équipes mobilisées. Mais non, elle débarque le jour de la rentrée scolaire. Une visite éclair, sans ambition.
Une visite hypocrite quand dans le même temps le gouvernement décrète une année blanche avec réduction massive des crédits, notamment pour l’éducation. Elle vient nous vendre la baisse des moyens en direction de nos collectivités et de l’Éducation nationale. Je pense notamment aux AESH, abandonnés malgré leur rôle essentiel. Je pense aussi aux parents et enfants qui n’ont pas d’AESH pour les accompagner, pour une rentrée digne, par manque de moyens, par manque de postes. C’est indigne ».
Via un communiqué aussi, le Parti Communiste Réunionnais rappelle « l’ampleur des inégalités éducatives qui persistent dans notre île :
– Un chômage des jeunes deux fois plus élevé qu’en France (17 % contre 7 %).
– Un taux d’illettrisme trois fois supérieur à la moyenne nationale (23 % contre 7 %).
– Le taux de réussite aux examens nationaux (Brevet, baccalauréat) est inférieurs de 2 points à la moyenne nationale.
Ces inégalités sociales et territoriales fortes retentissent directement sur la réussite scolaire et l’avenir de la jeunesse réunionnaise. Selon une étude de l’Insee, un enfant d’inactifs a environ 25 % de chance d’obtenir le bac quand ce taux passe à 50% pour un enfant d’ouvrier.
Enfin, ici comme ailleurs, la prise en compte des élèves en situation de handicap reste insuffisante, avec un manque d’AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap), des délais d’accompagnement longs, des moyens humains et matériels limités et une logistique déficiente. Plusieurs parents rapportent des délais de mise en place de six mois ou plus entre la notification par la CDAPH et l’accompagnement effectif. Ils dénoncent une instabilité des affectations (changements fréquents d’AESH) ainsi qu’un manque de formation spécifique pour les enseignants et les AESH. Ces insuffisances accentuent les injustices quand les politiques publiques devraient les réduire.
Le PCR dénonce également un déficit de reconnaissance culturelle, historique et géographique :
« La langue créole, langue maternelle d’une majorité d’élèves, reste insuffisamment et inégalement intégrée dans les apprentissages.
L’histoire spécifique de La Réunion – esclavage, engagisme, migrations – est trop peu valorisée.
La géographie et l’histoire de l’océan Indien sont largement absentes des programmes.
Un refus incompréhensible de prendre en compte les réalités climatiques. Chaque année, chaleur extrême, pluies et cyclones mettent en danger des enfants et entraînent des fermetures d’écoles ».
Dans ce même communiqué, le PCR propose des pistes « concrètes » pour répondre à ce retard :
« – Renforcer la lutte contre l’illettrisme dès le primaire, avec des moyens humains et des dispositifs adaptés au contexte réunionnais (bilinguisme Créole-Français).
– Valoriser les langues et cultures de La Réunion comme leviers d’apprentissage et d’estime et de confiance en soi.
– Adapter le calendrier scolaire aux réalités climatiques.
– Investir dans les infrastructures scolaires ( équipements numériques, bâtiments adaptés).
– Garantir une véritable inclusion des élèves en situation de handicap, avec davantage d’AESH formés et des équipements adaptés.
– Développer des dispositifs de soutien scolaire gratuits et accessibles à tous et partout.
– Renforcer les passerelles vers l’emploi et la formation pour les jeunes.
– Prendre en compte la demande des Réunionnais qui veulent servir et enseigner à La Réunion ».
Ary Yee Chong Tchi Kan, membre du PCR ajoute que « Les syndicats n’ont pas été invités, donc nous avons communiqué pour ne pas oublier les vrais problèmes ».
Etienne Satre
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