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[Taaf] Trois nouveaux collages féministes

VIOLENCES SEXISTES AUX TAAF

L’affaire de harcèlement sexuel aux Terres australes et antarctiques françaises (Taaf) inspire les femmes. Trois nouveaux collages ont fait leur apparition dimanche soir 16 avril 2023 au Port, la veille de l’arrivée du Marion-Dufresne. Un en face du quai, les deux autres sur la quatre-voies de Cambaie. Les nouvelles colleuses replacent le collage effacé dans l’espace public et dénoncent le « sexisme systémique ».

Le collage réalisé sur le quai au Port reprend les termes du premier collage, apposé sur le muret à côté du siège des Taaf, le 2 mars. Comme nous le relations, ce collage a été supprimé en un temps record, moins de 24 heures plus tard. La préfète des Taaf, Florence Jeanblanc-Risler, non contente de ne pas avoir su gérer correctement une affaire de harcèlement sexuel en interne a même porté plainte pour dégradations. Pour rappel, la victime avait témoigné à visage découvert auprès de Parallèle Sud pour dénoncer la prise en charge de sa situation par l’administration. Son agresseur de l’île d’Amsterdam avait été simplement déplacé quand elle, simple service civique, avait été conviée à partir.

Les colleuses du nouvel ouvrage entendent soutenir la victime et aussi « rendre hommage à la précédente action de désobéissance civile et au courage de ces femmes ». La mention « TAAF = Terre d’accueil des anti-féministes » a ainsi été affichée en évidence afin d’être visible pour les marins et leurs familles.

« Sexisme systémique »

« On a toutes été surprises de la rapidité avec laquelle le premier collage a été couvert », souligne Anaïs*, une des colleuses. « On voulait le faire réapparaître pour montrer qu’on ne se laissera pas impressionner. Ce n’était à la base pas les Taaf le problème, mais c’était l’occasion pour eux de prendre position, surtout que le 8 mars est arrivé à ce moment. Ils ne l’ont pas fait. Ce qu’on dénonce, c’est le sexisme systémique. »

Laura* poursuit : « Pourtant, dans le cas précis, la victime avait tout fait bien. Déjà, elle a osé parler. Et là, avec la réaction de l’institution, le message renvoyé aux victimes c’est  » Ne parlez pas.  » Il faut se poser la question : pourquoi les autres victimes ne veulent pas témoigner ? » Elles demandent à la préfète que des mesures concrètes soient prises pour lutter contre les comportements sexistes et les violences envers les femmes. « Il faut que des solutions pratiques soient annoncées publiquement et il faut être en mesure de les évaluer. » Dans un courrier envoyé aux hivernants, la préfète avait annoncé la mise en place de mesures jugées insuffisantes et floues par les jeunes femmes.

Du côté des Taaf, le dialogue tourne court. La nouvelle référente de la lutte contre le harcèlement, Armelle Piccoz, également directrice de cabinet de la préfète, ne souhaite « pas apporter plus de commentaires », estimant avoir déjà répondu aux questions de Parallèle Sud, il y a plusieurs semaines.

Sororité

Pour les jeunes colleuses, l’action qu’elles ont menée est l’occasion de créer un lien, une forme de solidarité entre femmes, d’entraide. De sororité. « Moi quand je découvre ces collages dans la ville, je trouve que ´c’est un soulagement de voir que tu peux être entendue ailleurs que dans les cercles où tu devrais l’être et où tu ne l’es pas », note Anaïs.

Elles aimeraient que se développent des espaces publics de prise de parole dédiés aux citoyens. « Les récits qu’on voit dans les rues sont  » Bois de la dodo  » ou encore  » Achète une voiture » : pourquoi ce serait réservé au discours commercial ? » interroge Anaïs.

Les jeunes femmes – âgées d’une vingtaine d’années – ne connaissent pas les précédentes colleuses et ont réagi disent-elles, « à titre individuel » parce qu’elles se sont senties touchées. « Par rapport à notre expérience de femme dans ce monde. Et même dans des milieux ou au sein de groupes qui se disent ouverts sur ces questions. »

« C’est important que les hommes se posent la question de leur comportement »

« La responsabilité de porter ce combat appartient aux femmes, reconnait Laura. La réalité, c’est que les groupes d’hommes ne s’emparent pas du problème, même si certains se disent soucieux. Ils leur manque le vécu quotidien. Ils ne peuvent pas réellement avoir conscience de la réalité de ce que vit une femme. Et dans des groupes mixtes, on est encore oppressé et on n’a pas la parole. Il n’y a pas à le prendre de manière personnelle. Pour être des alliés, en revanche, les hommes pourraient se poser la question sur leur comportement. C’est important qu’ils se posent la question entre eux. »

Jéromine Santo-Gammaire

(*) prénom d’emprunt

A propos de l'auteur

Jéromine Santo Gammaire | Journaliste

En quête d’un journalisme plus humain et plus inspirant, Jéromine Santo-Gammaire décide en 2020 de créer un média indépendant, Parallèle Sud. Auparavant, elle a travaillé comme journaliste dans différentes publications en ligne puis pendant près de quatre ans au Quotidien de La Réunion. Elle entend désormais mettre en avant les actions de Réunionnais pour un monde résilient, respectueux de tous les écosystèmes. Elle voit le journalisme comme un outil collectif pour aider à construire la société de demain et à trouver des solutions durables.

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