CHRONIQUE
« Il en faut pour tous les goûts ». C’est la réponse politiquement correcte et bienveillante que je reçois souvent quand je pose une question qui gêne mon interlocuteurice.
Ne mégenrons pas tout !
Tiens, à propos, commençons par ce premier sujet de polémique qui enflamme les réseaux sociaux et la susceptibilité de leurs utilisateurices. Oui, vous l’avez deviné, je veux parler de la grammaire inclusive, qui vise à rétablir selon ses promoteurices, l’équilibre toujours instable entre les genres. Une intellectuelle en mâle d’inspiration a même proposé l’idée de féminiser de nombreux mots masculins, afin de démontrer à quel point nous sommes habitués depuis des siècles, à ce que la sonorité du patriarcat l’emporte sur la sororité du matriarcat. (Ne cherchez pas de contrepétrie dans cette dernière phrase, c’est un article sérieux!).
Même le gouvernement s’émeut et veut freiner les réformes qu’envisagent des universitaires à ce sujet. Sujet qui à mon avis ne devrait être ni masculin ni féminin mais carrément neutre. Selon moi, ce serait la seule solution pour éviter que la serpente se morde « le » queue, et pour éviter de tomber dans une inclusivité toxique.
Pour les auteurices et leurs lecteurices, cette réforme bouleverserait les habitudes d’écriture et de lecture. Elle risquerait aussi d’augmenter la taille de bouquins déjà parfois trop indigestes.
Neutralisons la polémique !
La forme neutre généralisée se pratique plus ou moins dans de nombreuses langues : l’anglais, le kréol, voire l’allemand qui possède, lui, les trois formes : der (masculin), die (féminin) et das (neutre). Pour un Allemand, il suffirait donc d’utiliser « das » pour tous les noms. Mais comme en français, il n’existe pas d’article neutre, il faudrait d’abord l’inventer, puis éliminer les formes masculines et féminines de tous les mots du dictionnaire.
D’ailleurs, les réformateurices ont déjà suggéré de supprimer les mentions « Monsieur » et « Madame » sur les formulaires administratifs.
Ne parlons même plus de « Mademoiselle », jugé offensant, à moins qu’on rétablisse l’équilibre avec « Mon damoiseau ».
La forme neutre résoudrait aussi le problème des autres genres, qui, malgré une impossibilité théorique de multiplication, semblent se reproduire dans un nombre infini de nuances.
Je ne sais pas si mon idée de neutralité fera des adeptes, mais je crains qu’elle soit considérée comme de la lâcheté par le gouvernement, dans la mesure où, si j’en crois les médias, il est très mal vu d’être neutre en ce moment.
Alain Bled