TRIBUNAL ADMINISTRATIF
Le tribunal administratif a effacé cette semaine 60 millions d’euros sur le milliard que réclament les constructeurs de la NRL au titre des présumés surcoûts du chantier.
Comme le laissaient présager les conclusions de la rapporteure publique lors de l’audience du 17 septembre dernier, le tribunal administratif de La Réunion vient de rejeter les cinq premières réclamations du groupement Bouygues-Vinci dans sa décision de ce mardi 8 octobre. Toutes ces réclamations concernaient le chantier du viaduc de 5,4 km de la Nouvelle route du littoral qui a déjà coûté 675M€ et représentaient 60M€ sur une demande totale de 691M€ à la Région Réunion. 300 M€ sont également réclamés pour les digues. C’est dire si l’affaire est loin d’être terminée.
N’empêche, les premières décisions du TA vont toutes dans le sens de la Région Réunion en rejetant les prétentions du Groupement. C’est donc plutôt de bon augure pour les contribuables réunionnais.
L’usine du port
Le 1er rejet concernait une demande de 3,6M€ et portait sur les retards d’aménagement du terrain portois qui a accueilli la centrale à béton et l’usine de fabrication des voussoirs du viaduc. Il avait fallu modifier le plan local d’urbanisme. Les juges ont estimé que les retards sont « directement imputables à un choix de programmation prévisionnelle de travaux particulièrement optimiste et ambitieux » et que les constructeurs ne sont « pas fondés à demander la condamnation de la région Réunion ». Tout comme ils ne peuvent s’en prendre qu’à eux-mêmes pour avoir négligé de demander une autorisation ICPE (Installation classée pour la protection de l’environnement) pour leur centrale à béton.
Non-respect des mesures environnementales
Le 2e rejet concernait une réclamation de 138 000€ car le groupement conteste les pénalités que la Région lui a imposées pour des retards, des documents incomplets et le non-respects de stipulations environnementales. Il a bien été constaté que le chantier a provoqué la destruction de fonds coralliens dans la zone écologique sensible de la pointe du Gouffre. Des déchets susceptibles de tomber dans l’eau ont été relevés sur le tablier du viaduc, et d’autres à côté des tapis anti-affouillement des piles. Les constructeurs se voient reprochés d’avoir omis de nettoyer régulièrement leur chantier.
Frais et droits de port
Le 3e rejet concernait une réclamation de 5M€ au titre des surcoûts des frais portuaires (redevance, droits et remorquage). Le tribunal administratif a jugé que ces augmentations intervenues pendant la durée du chantier, « n’ont pas conduit à un bouleversement de l’économie du chantier ».
Préventions environnementales
Le 4e rejet concernait une réclamation de 1,1M€. Le Groupement reproche à la Région de ne pas l’avoir informé des contraintes environnementales (police de l’eau et espèces protégées) ce qui l’aurait empêché d’anticiper les mesures de préventions telles que le suivi des matières en suspension, la limitation du bruit et les plages horaires de travail autorisées pour la construction du quai d’appontement de la barge Zourite. Les juges administratifs ont estimé que le constructeur ne pouvait ignorer les contraintes et que les aménagements qu’il a mis en place l’ont été en toute connaissance de cause.
Modification de la barge Zourite
Le 5e rejet concernait la plus grosse réclamation de ce premier lot : 57M€ du fait de données géotechniques « incomplètes et erronées » qui auraient conduit à modifier la conception de la barge Zourite. Elle avait 4 pattes dans la première version. Elle en aura finalement 8. Rappelons que cette barge a servi à acheminer et poser les éléments des 48 piles du viaduc. Le tribunal relève ici la mauvaise foi de Bouygues & Vinci qui, en réalité, avaient déjà modifié la barge avant de recevoir de nouvelles données géotechniques. En fait les modifications ont été guidées par le choix de réaliser le chantier plus vite en réduisant le nombre d’allers-retours.
Dans chacune de ces cinq réclamations, Bouygues & Vinci ont été condamnés à payer 3 000 € à la Région au titre des frais de justice. Soit 15 000 € pour ce premier acte. Une goutte d’eau par rapport au 2, 5 milliards déjà attribués à la NRL.
Franck Cellier