LIVRES À DOMICILE
Thierry Bertil n’est peut-être pas la personnalité la plus connue du monde culturel local. Pourtant il pratique de nombreuses activités artistiques, le plus souvent au profit des autres, depuis l’adolescence. Aujourd’hui, il mène de front deux actions : délégué d’une association poétique nationale, et metteur en scène d’une pièce théâtrale à grand spectacle.
Auteur, conteur, metteur en scène
Il avait créé sa première pièce de théâtre à 17 ans. D’autres ont suivi, souvent jouées sur scène, par des scolaires ou petites troupes, parfois publiées par l’A.S.C.A, dans des petites revues ronéotypées aujourd’hui introuvables ; cette association culturelle tamponnaise des années 80 présentait, avec Philippe Frilay, Gilbert Rivière et quelques autres, des poésies et des chroniques en toute liberté.
Thierry fut aussi comédien dans quelques pièces de Vollard, mais surtout directeur de la troupe Source Vive, joyau théâtral de la Plaine des Cafres. Quelques années plus tard, il dirigea le théâtre Canter, et plusieurs services culturels.
Son premier recueil de poèmes, il l’avait presque oublié dans un coin ! « Translucides » , publié en 2004 par la compagnie théâtrale Véli, était pourtant encore disponible au Hang’art à St-Pierre, d’où on l’a exhumé vingt ans plus tard au salon du livre de Komkifo. Mais Thierry s’intéresse à présent à la suite de ce recueil, « Endémîle », qui serait plus engagé que le premier. Notons aussi la participation du poète- metteur en scène aux activités de l’U.D..I.R. Il figure d’ailleurs dans le nouveau recueil collectif de fonnkèr de cette association : « Nout zétoil katrèr »
Au pays de Gandhi
Pourtant , l’oeuvre qui devrait le faire connaître d’un plus grand public, c’est ce projet théâtral qu’il a écrit sur la vie de Gandhi, un spectacle baptisé « Mahatma, ou la Fraternité universelle » dont la première est prévue fin 2025, avec la compagnie Percale dont Thierry est le directeur artistique.
Il prépare ce biopic théâtral, si l’on peut dire, depuis plusieurs années. Il l’a tenu relativement secret au début. S’attaquer à la vie d’un tel monument, c’est très délicat ; avant même de voir le résultat, certains lui reprochent déjà son œuvre : faut-il être du même pays, et même de la même région de naissance que Gandhi pour écrire sur lui ? Les rageux vont parler d’appropriation culturelle.
Thierry ne peut que répondre qu’il a du sang d’un peu partout dans les veines, comme tout créole. En tout cas, le projet semble sur les rails, malgré des retards de subventions dont la plupart des artistes ont l’habitude : les élus font plus pour l’animation que pour la culture, c’est bien connu. On les voit entourer l’artiste de leurs bras sur un selfie, surtout après sa mort, mais de son vivant ? Une pensée à cette occasion pour Alain Peters et … Alain Joron. Mais je m’égare !
Les pieds dans le SPAF !
Mais dans l’immédiat, ce qui devrait susciter le plus l’intérêt des poètes et poétesses de l’île, c’est la nomination de Thierry à un poste de délégué régional d’une grande association poétique : la S.P.A.F., société des poètes et artistes de France. C’est l’une des plus connues de métropole, et elle cherche des délégués dans toutes les régions francophones du monde. Un ancien ami de Thierry a proposé son nom, et le voilà donc avec une responsabilité de plus : faire rayonner la poésie de son île à l’extérieur.
En même temps, il lui faut ouvrir la S.P.A.F. elle-même à une culture différente de celle des provinces de l’hexagone. Essayer d’assouplir certaines de ses règles. La revue éditée par cette société est en effet très classique, dans le fond comme dans la forme, même si on note plus d’ouverture qu’autrefois aux vers libres. Mais l’accès aux langues régionales, donc pour nous, le créole, est un des points sur lesquels Thierry veut dialoguer avec la S.P.A.F.
Il voudrait organiser, plus que des concours, des rencontres entre poètes, et surtout avec ouverture à la langue créole, aux fonnkèr. La poésie ne renaît-elle pas à La Réunion grâce à ces kabars, et à sa langue qui rend la poésie plus vive, moins surannée ? Danyel Waro, Patrice Treuthardt, Boris Gamaleya etc. avaient ouvert la voie dans les années 70, et la relève semble assurée par Mari Sizay, Soko Lokaf et bien d’autres en devenir.
Appel aux bonne volontés
Fort de son expérience, Thierry Bertil sait qu’il ne faut pas trop compter sur les subventions. D’ailleurs la SPAF ne perçoit que les cotisations de ses adhérents et la vente de ses revues. Mais l’amour de l’art, les bonnes volontés, peuvent soulever des montagnes. Thierry veut multiplier le liens entre artistes, anciens et jeunes, connus ou débutants, pour trouver des lieux de rencontres avec le public. Aussi bien pour les auteurs et autrices que pour les peintres, car la SPAF concerne aussi les artistes picturaux. Ces rencontres seraient bénévoles, que l’artiste ou poète soit connu ou non, que chacun oublie un temps son ego et ses euros.
Si la tache semble ardue, la sagesse et l’expérience de Thierry Bertil devrait en faire un intermédiaire neutre et bienveillant, pour que l’union de tous profite à chacun.
Ses contacts : 0692 21 55 25 et sa page facebook. Une page SPAF spécifique à la Réunion va être ajoutée bientôt.
Alain Bled
⚠︎ Cet espace d'échange mis à disposition de nos lectrices et lecteurs ne reflète pas l'avis du média mais ceux des commentateurs. Les commentaires doivent être respectueux des individus et de la loi. Tout commentaire ne respectant pas ceux-ci ne sera pas publié. Consultez nos conditions générales d'utilisation.