Ce jeudi 6 février, vingt-quatre éco-délégués du collège Henri-Matisse, de Saint-Pierre, étaient invités à s’initier au bouturage de coraux, sur la plage de Bassin-Pirogue, à L’Étang-Salé, avec l’association Co-Récif. Caroline Massac, co-fondratrice de l’association encadre la matinée. En quelques heures d’intervention pédagogique, l’objectif est clair: faire en sorte que les jeunes soient capables de reconnaitre le corail dans le lagon et qu’ils aient compris l’importance de le protéger.

Sous un soleil de plomb, sur la plage de L’Etang-Salé, les enfants arrivent à la queue-leu-leu. Deux enfants par classe, sur 12 classes, ont été conviés à cette matinée de sensibilisation. Ils sont tous.tes éco-délégués, et ont été élu.e.s par leur classe pour participer à des actions de protection de l’environnement et être ambassadeur.rices de la transition écologique auprès des autres élèves de leur établissement. Sous la tonnelle blanche, les enfants se rassemblent autours de la Caroline Massac, l’initiation commence par une première question: Pensez-vous que le corail est un animal ou un minéral? D’un ton assuré, plusieurs d’entre eux répondent du tac au tac: un minéral. Le premier point est gagné pour la scientifique, ils repartiront déja avec le fait d’avoir compris que le corail est un animal vivant, et fragile, qui nécessite qu’on en prenne soin.
Apprendre à connaître le lagon
En photos, plusieurs espèces de coraux et de poissons du lagon défilent sous les yeux des enfants. Un premier test consiste à différencier l’idole des Maures du poisson cocher. «Vous verrez surement des idoles des Maures, par contre, un poisson cocher, si vous en voyez un, vous m’appelez tout de suite», déclare avec humour Caroline Massac. L’initiation permet aux collégiens de mieux connaître le lagon, d’apprivoiser le milieu aquatique et peut-être faire germer en eux l’envie de le préserver. Car comme le rappelle la fondatrice de Co-Récif, «on ne peut protéger que ce que l’on connait».
Après quelques minutes de théorie, place à la pratique. Les collégiens enfilent leurs palmes, masque et tuba, et se jettent à l’eau. Il leur faudra ensuite nager quelques dizaines de mètres pour atteindre le site de bouturage. Ce site se présente sous la forme de deux structures fixes, en formes de cages pyramidales, sur lesquelles sont accrochés des fragments de coraux. Ces fragments ont été cassés, soit par la houle ou le piétinement, et ont été récupérés par l’association Co-Récif. Ce jour- la, Caroline fait la démonstration devant les enfants, et fixe des fragments de coraux avec précaution sur la structure, pour leur donner une seconde chance de pousser, et de survivre.
Des coraux en sursis
Les cofondateurs de Co-Récif ont créé l’association pour sensibiliser. Le bouturage est un outils pour toucher les consciences, mais non pour restaurer. Une distinction importante à leur égard, car la démarche de restauration est une réponse d’urgence, qui n’a pas encore été engagée à La Réunion. Pourtant, «nous en sommes à la limite», explique Caroline Massac. «Nous sommes passés de 60 % de recouvrement corallien dans les années soixante à 20% aujourd’hui. Donc nous sommes sur une pente descendante, bien qu’on estime que la situation est stable aujourd’hui, parce que nous n’avons pas eu affaire à un cyclone majeur récemment. Un cyclone comme Firinga détruirait tout, et peut-être que le lagon ne s’en remettrait pas.»
L’inquiétant blanchissement corallien
Les pressions que subissent les coraux sont multiples et variées. Nous trouvons d’abord les pressions naturelles, c’est-à-dire les tempêtes, les fortes houles, les fortes pluies, etc. A cela s’ajoutent les pressions issues des activités anthropiques, avec le piétinement, la surfréquentation du lagon, les apports en crème solaire ou encore l’artificialisation des sols qui facilitent l’écoulement de produits chimiques dans le lagon. Enfin, les pressions liées au dérèglement climatique occupent une place majeure dans la dégradation du récif corallien actuel. Le blanchissement est un phénomène très surveillé aujourd’hui explique Caroline Massac, car très inquiétant.
Pour rappel, les coraux sont des animaux qui vivent en symbiose avec des algues dans leurs tissus, que l’on appelle les zooxanthelles. Elles fournissent 80% de l’énergie des coraux, et également leur couleur. Lorsque la température augmente, les algues deviennent toxiques pour les coraux, qui se protègent en les expulsant. Leurs tissus étant transparents, on ne voit alors plus que leur squelette, de couleur blanche. Dans cette situation, la survie des coraux est limitée dans le temps. «Par ailleurs, ces épisodes de blanchissement se rapprochent» explique Caroline Massac. « Il y en a eu en 1998, en 2016, 2018, et aujourd’hui ils se rapprochent de plus en plus, alors que normalement ils sont corrélés avec El Nino, un phénomène de réchauffement des eaux naturel , qui a lieu au Pérou mais dont l’impact est mondial.»
Caroline Massac et Armand Dayde souhaitent alerter sur l’urgence à prendre conscience du problème et sur l’urgence à agir. «On estime que 50% des récifs coralliens ont déjà disparu, si on ne fait rien, en 2100, on n’aura plus du tout de récifs coralliens.»
Sarah Cortier
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