Se souvenir du doux rêve des Zazalé

Alors que les pelleteuses effacent les traces du rond-point des Zazalé au Tampon, c’est bien plus qu’un lieu qui disparaît : un rêve collectif, né de solidarité et d’utopie, semble s’éteindre sous les coups de tractopelles. Mais dans la mémoire de ceux qui l’ont fait vivre, le doux écho de cette expérience continue de résonner.

Effacer les traces pour effacer l’espoir

Si trois ans plus tôt, Parallèle Sud se demandait « à quoi rêvent les Zazalé », en ce mercredi 24 septembre, on peut se demander si le rêve des Zazalé existe encore. Dès le matin, les derniers irréductibles nettoient ce qui peut l’être. La ville a coupé l’accès à l’eau et l’électricité et le rond-point sera bientôt détruit pour faire passer la nouvelle voie urbaine du Tampon. 

Le lendemain, alors que certaines cases sont encore occupées, la commune du Tampon a décidé de tout raser : les cases en bois et leurs abords. Tout est écrasé, arraché, même la multitude de variétés que les habitants avaient pris le temps de planter. Pour ne pas perdre de temps, alors que les tractopelles s’activent d’un côté, de l’autre, des agents de la commune plantent de jolies fleurs. Le message est clair : effacez ce rond-point que je ne saurais voir. 

Destruction du rond-point des Zazalés par la commune du Tampon. © Olivier Ceccaldi
Destruction du rond-point des Zazalés par la commune du Tampon. © Olivier Ceccaldi
Destruction du rond-point des Zazalés par la commune du Tampon. © Olivier Ceccaldi
Destruction du rond-point des Zazalés par la commune du Tampon. © Olivier Ceccaldi

Le contre-pouvoir de l’Utopie

Sur ce lieu, des centaines de personnes sont passées, pour discuter, faire la fête, planter local. Toujours avec la même finalité, celle d’imaginer un nouveau type de société avec plus de dialogue, une société qui penserait collectif avant de penser l’individu. Les Zazalé furent peut-être une douce utopie, celle de croire que la volonté d’un groupe pouvait s’opposer à la doctrine mondiale qui prône la supériorité de l’économie libérale et capitaliste sur celle de l’humain. Sur un des écriteaux éparpillés sur le terrain, on pouvait d’ailleurs lire cette phrase : « Le rôle du progrès technique est de libérer l’homme pour qu’il puisse se consacrer à des activités plus spirituelles. »

Les rêves ne meurent jamais

Ce jeudi 25 septembre, alors que les engins de chantier s’activent, il est difficile d’imaginer ce qu’il a pu se passer sur ces quelques mètres carrés de verdure. On oublierait presque toutes les actions menées durant ces six années : distribution de vêtements, de nourriture, manifestations, soutiens à diverses luttes locales, partage des savoir-faire. Certes, tout n’a pas été parfait et aujourd’hui nombreux sont ceux qui prennent la parole pour dire tout le mal qu’ils pensent de la communauté des Zazalé. Pourtant, une chose est certaine, si l’on tend bien l’oreille, on peut encore entendre au dessus du bruit des tractopelles, le doux rêve des Zazalé. 

Olivier Ceccaldi

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A propos de l'auteur

Olivier Ceccaldi

Reporter citoyen, Olivier a tout d'abord privilégié la photographie comme support pour informer notamment sur les réalités des personnes exilées face à la politique migratoire de l'Union européenne. Installé sur l'île de La Réunion depuis 2024, il travaille principalement sur les questions de société.

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