LES FAST-FOODS DÉNONCÉS
Un collectif Goutanou, s’élève contre les fast-foods et la mal-bouffe. Catastrophes environnementales, sanitaires et économiques contre quoi une manifestation était organisée dimanche devant l’un des McDo de Saint-Pierre.
« On nous dit que les fast-foods créent des emplois, on n’en sait rien du tout. Combien l’ouverture d’un seul fast-food fait fermer de camions bars ? Combien d’emplois sont perdus quand le restaurant historique du front de mer, Le Cabanon, a été remplacé par un KFC ? », interroge Alexis Chaussalet, porte-parole du collectif Goutanou, qui explique que ces enseignes de restauration rapide sont considérées de la même façon que les autres à la chambre de commerce, d’où l’absence de statistiques.
« Mon père a ouvert en 1998 un point de vente de caris à emporter, en face de la mairie. Il vendait une vingtaine de barquettes tous les soirs. Du jour où cette zone de Canabady a été créée, avec un Quick et un Courte-paille ou Trois-Brasseurs, ce n’est plus vingt mais seulement un ou deux caris vendus », poursuit le jeune militant.
Dimanche 3 septembre, plusieurs associations citoyennes ou institutionnelles, réunies sous l’égide du collectif Goutanou, manifestaient à deux pas du tout dernier restaurant McDonald ouvert à Saint-Pierre. Sur Facebook, vous pouvez revisionner notre live. « Des trois grandes enseignes internationales, c’est à Saint-Pierre qu’il y a le plus de restaurants dans l’île. Avec 16 ouvertures, on dépasse Paris rapporté au nombre d’habitants. C’est peut-être même la plus grosse concentration de toute la France », poursuit Alexis Chaussalet. Le collectif ne veut pas seulement interpeller les Réunionnais. Il veut aussi en discuter avec les maires. « Certes, ils ne peuvent refuser un permis de construire ou l’ouverture d’un restaurant, mais l’article 11 du code de l’urbanisme permet de refuser une enseigne qui dénaturerait l’ensemble architectural d’un centre-ville. Le maire de Saint-Paul l’a employé récemment, c’était possible à Saint-Pierre », assure le Tamponnais.
On le sait, manger gras et sucré, sans légumes, est délétère pour la santé. Surtout dans une île particulièrement touchée par le diabète et les maladies cardiovasculaires. Mais quand il s’agit de fast-food, c’est également une catastrophe pour l’environnement, pour le bien-être animal et pour l’économie locale. « Tous les légumes sont importés, sauf quelques salades cultivées spécialement à la Bretagne », souligne Jean-Bernard Maratchia, élu à l’agriculture à la Région et responsable syndical à la CGPER. L’homme fait en revanche la promotion d’une alimentation oubliée et regrette que « les enfants trouvent le poulet la kour, élevé au grain, trop dur ». « Pourtant, poursuit-il, quand on leur fait goûter du manioc grillé, des pistaches ou du maïs bouillis, ils en redemandent. Tout comme les repas créoles annuels à Saint-Paul, j’aimerais que ce soit une fois par semaine.»
Le patron de la chambre d’agriculture, Frédéric Vienne, veut lui aussi « remettre les légumes longtemps au goût du jour ». « Il faut aussi remettre de la saisonnalité dans la consommation. Mais c’est au consommateur, à défaut de convaincre les importateurs, de décider. Aucune interdiction n’est possible vis-à-vis de l’Union européenne », rappelle-t-il.
Du côté de Green Peace, on pointe l’importation de viande de mauvaise qualité par les McDonald, Burger King ou KFC. « Ces enseignes participent à la déforestation, assure Hélène Germain. Les bovins sont nourris avec des maïs et soja OGM cultivés à la place des forêts primaires. Entre 2010 et 2020, ce sont 10 millions d’hectares de forêts qui on disparu, à 88% pour être remplacées par ces aliments pour bétail. Sachant que 73% de la pollution de l’eau dans le monde est dû à l’agriculture, que 54% du méthane provient de l’élevage surtout bovin. On parle ici d’agriculture industrielle », énumère la porte-parole. « Sans compter la maltraitance animale dans ces fermes-usines, là où les poulets destinés à KFC vivent à 22 par mètre carré. » « En France, ce sont six milliards de repas qui sont consommés dans ces fast-food, provoquant 180 000 tonnes de déchets ; surtout de vaisselle jetable, pourtant interdite, pour laquelle ils préfèrent payer les amendes plutôt que de respecter la loi. »
« C’est le modèle exact de ce qu’il ne faut pas faire, reprend un autre membre de Green Peace. Pour chaque nouveau McDo ouvert, les pouvoirs publics en acceptent et cautionnent la pollution, les problèmes environnementaux et de santé publique. » « De plus, ces gens ne payent que très peu d’impôts et les bénéfices », ajoute un membre d’Attac présent.
Philippe Nanpon