Abdou Moustoifa, journaliste comorien, correspondant de l’agence Reuters, a passé la nuit de jeudi à vendredi en garde à vue dans une cellule de la gendarmerie nationale à Moroni. Sa faute ? Avoir écrit dans une dépêche publiée par l’agence que le président Azali aurait annoncé son intention de transmettre le pouvoir à son fils. Il avait alors traduit en français un discours comorien que le chef d’Etat avait tenu lors d’un déplacement à Mohéli, la plus petite île de l’archipel, le 23 janvier dernier.
Face au tollé provoqué par ce qui s’apparentait à un remplacement d’une démocratie — déjà très fragile — par une dynastie, la présidence a démenti, arguant qu’Azali Assoumani ne parlait pas de son fils mais qu’« il a plutôt parlé d’un enfant qui lui succéderait, sachant qu’il est d’usage aux Comores de qualifier tout citoyen d’enfant, sans forcément parler de sa
propre progéniture. »
Bien que l’agence Reuters ait publié ce démenti, le pouvoir comorien n’en est pas resté là. Le ministère public a déposé plainte « pour désinformation ». Mercredi 29 janvier, deux gendarmes sont venus chercher Abdou Moustoifa dans les locaux du journal d’Etat Alwatwan, son
employeur, où ils ne l’ont pas trouvé. Abdou Moustoifa s’est rendu de lui- même ce jeudi 30 janvier au commissariat, où il a été placé en garde à vue.
La Convention pour le renouveau des Comores, principal parti au pouvoir, avait pourtant déclaré le 27 janvier lors d’une conférence de presse qu’aucune plainte ne serait déposée contre Abdou Moustoifa.
Le SNJ Réunion – océan Indien, de concert avec le Syndicat national des journalistes comoriens, dénonce l’acharnement contre un journaliste pour l’empêcher d’exercer librement sa mission d’informer. Il appelle le pouvoir comorien à s’en tenir aux procédures légales garantissant des relations démocratiques entre le pouvoir et les journalistes : un droit de réponse (comme cela a été accordé par Reuters), voire la saisie du Conseil national de la presse et de l’audiovisuel (CNPA), l’organe compétent pour traiter ce type de litige aux Comores. Tout le reste ne se résume ni plus ni moins qu’à une atteinte à la liberté de la presse et révèle le caractère autoritaire du président Azali.
SNJ (Syndicat national des journalistes)
Fait à La Réunion, le 31 janvier 2025.
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