LIBRE EXPRESSION
Depuis les années 1990, la puissance publique aura soutenu ce qui fut nommée « une politique de soutien et d’accompagnement de la parentalité » ; dont nous regrettions alors qu’il ne s’agisse pas nécessairement d’avoir recours à ce nouveau terme sous forme de pluriel, soit : « des parentalités ». Nous pensions en effet qu’il aurait dû désigner plutôt une multitude de configurations culturelles, psychiques, sociales et économiques interférant dans l’environnement des familles et prenant en compte les interactions vis-à-vis de leurs enfants.
En 2023, le gouvernement avance dans ce domaine une nouvelle approche de soutien psychologique aux familles par le « programme des 1000 premiers jours de la petite enfance ». Ce dernier apparait plus comme un « réarmement » en faveur des professionnels de la santé ou de l’aide sociale ou psychologique.
Aux futurs parents est suggéré« d’évaluer par un questionnaire leur bien-être émotionnel ». Ce questionnaire est annoncé « devoir être utilisé par des professionnels de santé ».
Depuis son lancement en juillet 2021, « les parents ont complété 118 806 questionnaires sur leur état émotionnel ». Il est déclaré que « grâce à ce questionnaire, 41 personnes par mois sont accompagnées et orientées vers des professionnels de santé ».
Il devra être envisagé, tôt ou tard, de réaliser une évaluation de l’application de ce programme gouvernemental.
Nous suggérons quant à nous une autre logique, celle de confier à des parents relais citoyens l’accompagnement de futurs et jeunes parents à être parent.
Ces nouveaux « accompagnants » – ayant été libérés de l’éducation de leur enfant porteraient un regard bienveillant et solidaire à propos de ces futurs et jeunes parents réunis en groupe de parole. Ces groupes permettent d’approcher sa façon d’être parent empiriquement, déductivement et comparativement sa propre approche avec celles d’autres parents. Celle-ci devrait être singulière à chaque parent dans la découverte attentive de la personnalité de l’enfant – et cela afin d’appréhender par tâtonnements et progressivement sa propre culture parentale.
Nos suggestions :
Les parentalités sont donc portées par les parents, seul ou en couple, leur histoire, dans une culture et une civilisation urbaine ou rurale, s’inter-influencent comme autant de facteurs de différentiation : dans les façons d’agir, de penser et d’être parents. En d’autres termes, existent autant de parentalité que de parents, ce qui devrait nous mettre en garde, par exemple, de ne pas projeter imaginairement un modèle de parent idéal ou d’enfant idéal, ou encore une culture parentale référente, inconsciemment.
Notre équipe cumule des expériences de promotion de la santé et de l’éducation par les parents eux-mêmes. Du fait de cette expérience, elle suggère à la puissance publique des ministères concernés jusqu’aux municipalités ou aux regroupements de communes (possiblement accompagnées par la CAF de leur département – Caisse des Allocations Familiales) qu’il serait opportun d’accompagner les futurs et jeunes en groupe animés par des parents relais citoyens.
Les vertus des réflexions en groupe selon la constatation généralement admise : « le groupe de personnes réunies est plus que la somme des parties ». Il en résulte la sollicitation d’une méthodologie de la réflexion en groupe qui interroge les attitudes, les inconscients, les cultures et les mémoires autobiographiques de chacun implicitement et naturellement, sans l’intrusion intempestive éventuelle de leader de groupe.
Le CEVE – Centre d’Etudes du Vivant Europe – (Initialement CEVOI à La Réunion) propose un processus en deux étapes :
- Un encouragement aux fonctions de Parents relais Citoyens au niveau des Communes.
- Une expérimentation et évaluation qualitative sur plusieurs communes.
La démarche innovante que nous préconisons est basée sur des échanges en groupe entre des futurs et jeunes parents et des parents relais citoyens animateurs de ces groupes. Ces derniers devraient recevoir une sensibilisation à l’animation et à l’éthique de tels groupes.
Nous qualifions ces parents animateurs de « seniors » et les nommons « Parents relais citoyens ». Forts d’une maturité d’âge et peut-être aussi d’expérience pour avoir été parents, libérés de charges de travail, des retraités par exemple, s’investiraient bénévolement dans le cadre communal sous l’autorité du Maire. Ils seraient en relation fonctionnelle avec les CAF qui se porteraient garantes d’une éthique et d’une déontologie de ces nouveaux intervenants. Elle offrirait ainsi aux futurs et jeunes parents un service de soutien aux parentalités respectueux des croyances et des différences. Ces ambitions devront être évaluées par des spécialistes de l’évaluation.
Les CAF, sur le plan national et local, gèrent depuis 1999 les REAAP (Réseau d’Ecoute, d’Appui et d’Accompagnement des Parents). Elles pourraient instruire nos propositions avec les communes désireuses d’expérimenter cette démarche que nous qualifierons de processus potentiellement démocratique visant un « réarmement » psychologique des futurs et jeunes parents.
La démarche, structurante sur les plans réel et symbolique des Parents Relais Citoyens et légitimant ainsi leur position sociale, intègrera l’élection de ces nouveaux acteurs des parentalités.
CEVE (Centre d’Etudes du Vivant Europe).
Evelyne Grasperge, Frédéric Paulus.
Chaque contribution publiée sur le média nous semble répondre aux critères élémentaires de respect des personnes et des communautés. Elle reflète l’opinion de son ou ses signataires, pas forcément celle du comité de lecture de Parallèle Sud.