Dimanche 27 juillet 2025, sur le podium d’arrivée de Quimper, une femme en jaune sourit, encore bouleversée. Elle s’appelle Kim Le Court, elle est mauricienne, et devient la première cycliste africaine à porter le maillot jaune du Tour de France Femmes. Ce moment historique dépasse le cadre du sport car il incarne l’espoir d’un cyclisme africain en pleine transformation, longtemps marginalisé, aujourd’hui en pleine ascension.
Une performance et un talent
Née en 1996, Kim Le Court court sous les couleurs de l’île Maurice, son pays d’origine. Championne nationale à plusieurs reprises, médaillée d’or aux Jeux africains de 2019, elle s’était déjà imposée comme une référence du cyclisme féminin sur le continent. En 2023, elle remporte le championnat d’Afrique sur route. En 2024, elle gagne une étape du Giro D’Italia Women, s’illustrant pour la première fois sur une course du calendrier World Tour.
Mais rien ne laissait présager qu’en 2025, elle enfilerait le maillot le plus prestigieux de l’histoire du cyclisme : le jaune du Tour. Grâce à une performance solide sur les deux premières étapes — une deuxième place à Plumelec puis une troisième à Quimper — et aux bonifications accumulées, Kim Le Court a ravi le maillot jaune à Marianne Vos, grande favorite de l’épreuve.
« C’est irréel. Je pense à Maurice, à mes proches, à toutes celles qui n’ont jamais osé rêver si grand », a-t-elle confié, la voix tremblante, sur la ligne d’arrivée.
Une étape pour l’Afrique
Jusqu’ici, les exploits des cyclistes africains étaient le plus souvent le fait d’hommes sud-africains ou érythréens. Daryl Impey (Afrique du Sud) avait porté le maillot jaune en 2013. Biniam Girmay (Érythrée) avait remporté Gand-Wevelgem en 2022, puis une étape du Giro, trois étapes au Tour de France 2024 et porté le maillot vert de meilleur sprinter.
L’Afrique du Sud reste historiquement la nation cycliste la plus représentée à haut niveau. Daryl Impey, Louis Meintjes ou Ryan Gibbons ont tous couru dans des équipes World Tour, notamment dans l’ex-équipe Qhubeka, aujourd’hui disparue. Du côté de la Corne de l’Afrique, l’Érythrée alimente le peloton en grimpeurs talentueux : Girmay, Kudus, Berhane, Ghebreigzabhier. L’Éthiopien Tsgabu Grmay a aussi brillé sur les Grands Tours. Rappelons-nous de Christopher Froome, né au Kenya, qui a gagné quatre Tour de France.
Mais côté francophone, les talents restent isolés, les moyens très limités. Le Tour du Rwanda, le Tour du Faso ou les championnats d’Afrique permettent d’exister, mais rares sont les passerelles vers l’élite. Le cyclisme féminin africain reste largement sous-développé, faute de courses et de visibilité.
En portant le jaune, Kim Le Court devient un repère. Elle montre (et démontre) qu’une africaine peut non seulement participer, mais aussi mener la course la plus prestigieuse du monde. Son exploit dépasse le sport.
Kim Le Court, en endossant le maillot jaune, a peut-être mis le cyclisme africain dans sa roue.
Jean Fauconnet
* Crédit photo : Mathieu Pattier/AP
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