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[L’Éko la ravine] La France vue d’ailleurs

CHRONIQUE

Les récents évènements (sous l’ère du président Macron) montrent une fois de plus l’incongruité du pouvoir français. L’image du « pays des droits de l’Homme » s’effrite. D’étonnement en déception, nous constatons la déroute d’une institution en perdition.  Ne nous laissons pas emporter par l’émotion ni par les informations contradictoires au front, sans doute aussi que les réseaux sociaux rendent une image imparfaite de la situation mais quand même… Comment peut-on gouverner encore avec si peu de clarté et d’estime envers des sujets français devenus indésirables ?

La France subirait-elle les effets néfastes d’une immigration voulue et organisée ? est-elle prise à son propre piège ou serait-ce une stratégie de sa part ? lorsqu’on est capable d’exploiter et de coloniser de lointains pays, on est capable et coupable de vouloir le faire sur son propre territoire. Il suffit de créer les conditions pour.

J’habite un ailleurs qui subit le « patriotisme » français dans toute sa splendeur et je me permets d’avoir un regard critique sur mon pays de tutelle.

Oui, il y a un peu de similitude entre certaines populations des pays africains, des ex-colonies de plantation et ce que vivent les Français d’en bas dans leur pays. Quelle différence entre un Africain qui n’a pas l’eau potable chez lui, un ultramarin au smic qui subit la vie chère et un exclus français obligé de faire les poubelles ou la manche ? les fins de droit qui viennent grossir les rangs des précaires chaque mois en savent quelque chose.

Sous l’angle géopolitique les critiques et déceptions affluent aussi. Les observateurs et médias étrangers constatent une nette dégradation des libertés par les mesures et répressions musclées qui se succèdent depuis la révolte des gilets jaunes. Interdictions de manifester, censures, fichages, intimidations, violences des FDO, obligation vaccinale, suspensions arbitraires, couvre-feux…  Ce sont là de sérieux indices d’un glissement vers le totalitarisme, le despotisme, l’oligarchie ou la ploutocratie, appelons-le comme on veut, de la part d’un gouvernement au demeurant malhonnête.

Hypocrisies et mensonges

Alors que des soignants s’évertuent à sauver des vies, à redonner confiance aux personnes malades, qu’on se donne les moyens de venir en aide aux autrement capables et aux personnes âgées, qu’on nous appelle sans arrêt à respecter les lois, préserver la nature, l’environnement…

On nous empoisonne avec des produits chimiques et polluants, on supprime des hôpitaux et des emplois, on laisse mourir les vieux dans les Ehpads. A la télé on nous pousse à la malbouffe et à consommer du chocolat et la pub suivante nous vante des remèdes et nous demande des sous pour la lutte contre le diabète ou le cancer.

Le Fisc ou la Mafia

Les petits commerces et entreprises ferment, le coût de la vie augmente (c’est la faute à qui ?). A côté de ça, les bénéfices scandaleux des multinationales et le coût de l’énergie qu’on a confié aux groupes privés passent comme une lettre à la poste. Bientôt il n’y aura plus de service public, les biens et services de qualité seront accessibles au prix fort et donc aux privilégiés. Dernièrement un restaurateur croulant sous les charges en France est parti s’installer en Italie et se demande s’il n’est pas plus avantageux de verser une taxe à la mafia plutôt que de se faire détrousser par le fisc français. Tout va à l’envers !

On l’aura compris, le mal est généralisé, il y a plus de loups aux dents longues que de moutons dans la bergerie. Mais revenons sur l’immigration, ce phénomène dérangeant pour les Français de souche qui n’ont eu aucun scrupule à profiter des richesses pillées en Afrique et de sa main d’œuvre bon marché sur les chantiers pénibles. Ils dénoncent à leur tour la gentrification de la France par les étrangers (mais à l’inverse des territoires ultras marin, ceux qui débarquent là-bas sont au bas de l’échelle sociale). D’ailleurs eux quand ils partent ils n’émigrent pas, ils s’expatrient (excusez l’imposture, c’est une question de prestige). Ils sont en mal d’exotisme mais ils ne veulent avoir que les plages, les cocotiers et des fruits à leurs tables, les indigènes et leurs cultures peuvent aller se faire voir !

La Colère des jeunes

Le tir mortel à bout portant sur Nahel interpelle une nouvelle fois. Il s’agit sans doute de jeunes désœuvrés qui jouent à se faire peur et qui n’ont aucune notion du danger ni de l’autorité. Pour avoir côtoyé régulièrement des « ghettoïsés » dans leurs milieux, je puis dire que pour la plupart ils sont de bonne famille. Il y a certes de l’agressivité et des têtes brûlées mais avec un peu de pédagogie, des moyens et quelques « grands frères » on devrait pouvoir maintenir le calme. Les jeunes par ailleurs sont très sensibles à la notion de territoire, même entre quartiers ça gascogne. Si en plus ils sont ostracisés et livrés à eux-mêmes, n’allons pas les provoquer chez eux. 

A Marseille par exemple les forces de l’ordre avaient pour principe de ne pas pénétrer dans les zones de non-droit. Et les « voyous » étaient rarement en délit de fuite puisqu’ils n’étaient pas pourchassés. Ce n’est pas non plus le modèle de société qu’on recherche d’autant que les trafics de stupéfiants dans ces milieux se développent avec leurs lots de règlements de compte et d’insalubrité. Mais qui sont à la tête des réseaux de drogue, prostitution, jeux d’argent… ? on peut se poser la question.

En finir avec l’expansionnisme

Tant de bavures contre les « blackbeurs » depuis quelques décennies viennent confirmer l’existence d’un racisme institutionnel (on ne le répètera jamais assez). La glorification de la race aryenne fait des émules parmi les groupuscules néo-nazis décomplexés et forcément ça déteint sur une certaine catégorie de population qui justifie son point de vue partial dans un même courant idéologique. Je rajouterai que faire régulièrement l’éloge de figures comme Napoléon Bonaparte ou Jules Ferry (*) ne cesse d’alimenter un sentiment de suprématie bleu, blanc, rouge Cocorico. Quelle amertume à dénoncer ce postulat mais les mythes sont tellement coriaces !

On aurait tout à gagner à respecter la souveraineté des peuples et nations, en finir avec l’expansionnisme. Le passif colonial ici ou là est très lourd et n’en finit pas de cracher son fiel. C’est bien à la source qu’il faut chercher des solutions d’apaisement. Que les exploitations/occupations outrancières et illégales cessent et laissent la place à de vraies coopérations et plans de développement des pays dévastés. A chacun de se remettre en question, en premier chef les nations impérialistes. 

Georges Ah-Tiane

(*) Napoléon Bonaparte (1769-1821) militaire et empereur français : mène les conquêtes d’Italie, d’Egypte, d’Allemagne, d’Autriche et de Russie. Il rétabli l’esclavage dans les colonies en 1802.

Jules Ferry (1832-1893) homme d’Etat français : « Il faut dire ouvertement que les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures » (28 juillet 1885).

A propos de l'auteur

Georges Ah Tiane | Reporter citoyen

Georges Ah-Tiane est impliqué dans la vie associative depuis 1990. En France où il a vécu de nombreuses années, il s’est investi dans la promotion de la culture réunionnaise au travers de nombreux biais : en créant des associations, en enseignant le créole, en mettant en avant le patrimoine culinaire péi ou encore la musique. Il a créé des ponts entre La Réunion et la diaspora installée en France. Il a participé à une radio associative pendant douze ans avant de créer des fanzines ou petits journaux, « carry créole », « la lettre d’art’s ». De retour à La Réunion, il s’est impliqué dans la langue créole et « la conscientisation », avec l’objectif d’analyser la société réunionnaise, comprendre son fonctionnement. Dans le but de « voir quels sont les freins et comment les contourner pour aller de l’avant ». Cette chronique hebdomadaire fait suite à la gazette “kreo-lutionnaire” imprimée, l’Eko la Ravine, qu’il a tenue entre 2019 et 2020.