Le 10 et 11 février 2025, la France accueille les journées mondiales de l’intelligence Artificielle.
On parle investissements (en centaines de milliards), développement économique, compétitivité, progrès pour l’humanité, évolutions incontournables, irréversibles…
On nous vend l’IA comme solution et vecteur de progrès dans tous les domaines : santé, sécurité, économie, pénibilité et temps au travail, loisir, productivité, réchauffement climatique… cette technologie connectée résoudra tous nos problèmes et nous facilitera la vie…
En réalité, notre bien-être est bien loin des préoccupations des promoteurs de l’IA. Il s’agit d’une course, pour ne pas dire une guerre, économique, politique, stratégique. Qui contrôlera l’internet mondial et l’intelligence artificielle contrôlera le monde !
Et dans une course, pas le temps de discuter, c’est évident : la démocratie, l’écologie, la réflexion, le doute, la science… font perdre du temps. Et le temps, c’est de l’argent.
Nous connaissons déjà les dégâts et dangers des technologies connectées et de l’internet à la disposition de tous tout le temps.
Les études innombrables n’ont de cesse depuis le début de ce siècle de mesurer les effets délétères de nos sociétés numériques.
Sur le plan individuel, l’utilisation quotidienne des réseaux sociaux, applications et autres outils numériques rend moins tolérant, érode patience et mémoire, dégrade l’estime de soi, isole, détruit la concentration et l’empathie, anéantie la persévérance et le goût de l’effort. Sans parler des problèmes de sommeil, de vue, d’obésité, d’addiction…
Sur le plan collectif, le tout numérique abime les liens humains, développe le sentiment d’insécurité et la diffusion de théories complotistes, contribue à la surveillance et manipulation généralisée, favorise la montée des politiques populistes, xénophobes, racistes, nationalistes, obscurantistes…
Sur le plan écologique, nous sommes la société la plus énergivore de tous les temps. Les technologies connectées et l’IA ne sont pas la solution, mais accentuent le problème comme jamais. Les déploiements massifs de constellations de satellites, de mega-datacenter, d’innombrables réseaux et terminaux pour connecter le monde entier et développer l’IA partout n’arrangeront rien. Où trouverons-nous l’énergie et les ressources nécessaires à cette chimère. La réponse ne laisse aucun doute quant à la façon dont la politique mondiale est réellement engagée en termes d’avenir durable, d’économie circulaire, de limitation de l’effet de serre, de contrôle des déchets, etc. Tous ces problèmes engendrés par une numérisation forcée et incontrôlée du monde sont étudiés, connus et reconnus, mais sans être pris en compte. A l’image de ces alertes depuis des décennies sur la destruction de notre environnement que nous exploitons et maltraitons comme jamais en toute connaissance de cause.
Tout cela n’est qu’un avant-goût de ce qui attend une humanité totalement dépendante d’une intelligence artificielle.
Notre engouement pour les technologies numériques, notre fascination pour les univers virtuels et le recours massif aux IA ne sont rien d’autre que des fuites en avant d’une humanité apeurée, démunie du pouvoir d’agir, menacée par les changements de son milieu naturel qu’elle a elle-même provoqués et dépassée par la complexité et l’instabilité de son environnement politico-socio-technoscientifique qu’elle a créé de toutes pièces.
Cela fait une trentaine d’année que l’on ne fait plus rien d’intéressant à l’école. L’idée de mémoriser, d’apprendre, de célébrer la culture, la nature, de connaitre par cœur une poésie, une table de multiplication, de pratiquer une langue, découvrir le gout de l’effort, de la réussite… tout cela disparaît. Peu à peu on atrophie les cerveaux. Pour paraphraser Brigelli, à l’école, on fabrique des crétins. L’intelligence humaine est-elle encore utile à l’heure de l’intelligence artificielle ? A voir les milliards investis, on sait sur laquelle on mise.
Peut-on faire le renoncement de l’intelligence humaine au profit de l’IA ? Derrière l’IA, il y a une intelligence naturelle, humaine, une volonté qui est politisée, idéologisée. Ce n’est évidemment pas juste pour notre bonheur. Il faut des algorithmes pour conditionner les gens, orienter leur choix, qu’ils deviennent de bons consommateurs, dociles et manipulables à souhait. Le but des créateurs d’IA est de fabriquer l’opinion, manipuler les masses, pour que les gens achètent, vendent, se taisent, obéissent… Nous allons vers une société de servitude absolu avec un grand sourire. La société « comme j’aime », à l’image de la marque du même nom qui, pour perdre du poids, vous conseille de surtout ne pas réfléchir, et ne pas bouger de votre canapé. L’exact contraire de ce qu’il faut faire.
Chacun d’entre nous a le pouvoir de questionner, refuser, freiner, s’opposer, critiquer ces évolutions. Mais le mal n’est-il pas déjà fait ? En avons-nous réellement la volonté ? En sommes-nous seulement encore capables ?
Gauthier Steyer
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