JOURNAL DE PAUL HORAU
La politique s’accélère depuis les dernières présidentielles, les législatives qui ont suivi et les européennes du 9 juin. Les législatives de la fin du mois s’inscrivent dans la logique de cette accélération politique qui n’est pas seulement française.
Les peuples se manifestent. A l’élection présidentielle, il a révoqué ce que l’on appelle les partis traditionnels du pouvoir : à droite Les Républicains, à gauche Le Parti Socialiste. Leurs candidats – Mme Pécresse à droite, Mme Hidalgo à gauche – n’ont même pas eu les 5 % qui donnent droit au remboursement des frais de campagne. A l’élection législative qui a suivi, le Président de la République élu n’a pas obtenu la majorité absolue à l’Assemblée Nationale . Aux Européennes de la semaine dernière, Le Rassemblement National arrivant largement en tête, le Président de la République est contraint de dissoudre l’Assemblée.
La classe politique et le peuple, l’un et l’autre, ne croient pas au pouvoir du peuple. Le Gouvernement a cru être en mesure de contrebalancer ce pouvoir à coups de 49.3 au Parlement pour faire passer en force ses « réformes ». En réponse aux 49.3, les oppositions n’ont pas osé renverser le Gouvernement, pour assurer leur maintien dans les décors du pouvoir qu’ils ont reçu par leur élection. Voilà que la dissolution de l’Assemblée Nationale met fin à tout cela : le Gouvernement ne peut plus faire appel au 49.3 ; il n’est pas renversé, mais il dissout l’Assemblée.
Qui peut encore dire que le peuple n’existe pas ? que le peuple n’a pas de pouvoir ? Tout le monde, le peuple lui-même, malgré ces leçons, continue de penser et de dire que ce sont les politiques, leurs hommes et leurs partis, qui mènent le jeu. Les politologues, les observateurs, les journalistes continuent d’analyser les situations au niveau des calculs et des décisions des états-majors, des leaders des partis. Ils oublient que ce sont les électeurs – le peuple – qui, en dépit de ces calculs et de ces décisions, ont révoqué les partis traditionnels de gouvernement, n’ont pas donné de majorité au président élu, ont élu largement en tête Le Rassemblement national aux Européennes et ont contraint le Président de la République à dissoudre l’Assemblée et à provoquer des élections anticipées.
Près de la moitié de l’ensemble des électeurs français, près de 75 % des électeurs réunionnais n’ont pas voté aux Européennes. Personne ne peut dire pour qui ces abstentionnistes voteraient s’ils devaient voter. On peut spéculer, on peut « sonder », personne ne peut dire ce qui sortira des urnes en juin-juillet 2024.
Comment convaincre que le peuple existe et qu’il a de réels pouvoirs ? Si les électeurs réunionnais, en particulier les 75 % d’abstentionnistes, en prenaient conscience, les choses changeraient. Ce ne sont pas les promesses électorales qui changeront, nous le savons maintenant, c’est l’expression politique de la volonté du peuple (l’élection, le référendum, la manifestation).
Dans moins de trois semaines, l’avenir de la République est entre les mains du peuple, pas de Messieurs Macron, Bardella, Faure & Cie. Cet avenir sera ce que le peuple aura voté. Ni Macron, ni Bardella, ni Lefort, ni les autres n’avaient prévu la situation actuelle de la République.
Paul Hoarau
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