Libérer le libre arbitre 

LIBRE EXPRESSION

Vers de Nouveaux parents & de Nouveaux enfants

Notre ambition dans ce courrier est d’attirer l’attention des parents et des chercheurs à propos de nouvelles façons d’être au monde afin de favoriser l’épanouissement des enfants, particulièrement durant leurs « 1000 premiers jours » pour favoriser un bon début de  vie. Ils jouiraient d’une plus grande liberté d’autodétermination co-émergente accompagnée d’une responsabilité plus éclairée des parents. Cela irait jusqu’à penser à un accompagnement entre parents, animé par des PARENTS RELAIS CITOYENS engagés bénévolement et reconnus comme référents sur le plan de communes ou groupements de communes.

Urgence sociale préalable

Se libérer de jugements, de préjugés entravant le libre arbitre

L’idée selon laquelle nos intentions d’agir seraient pleinement libres et réfléchies consciemment s’avère erronée.  Je propose comme argument le fantasme qui nous animait, mon frère (et aîné de quinze mois) et moi, effrayés par le train hebdomadaire qui reliait Constantine à Alger et traversant la ferme de mon père. Agé de quatre ans environ, je me demandais ce qu’il adviendrait d’un jouet représentant un personnage en plastique si le train lui passait dessus alors qu’il était attaché sur la voie ferrée. Résultat de l’exercice réel tenté : le personnage fut aplati comme une feuille de papier de cigarette. Cette constatation était associée à la peur de ce train, peur transformée par mon psychisme d’enfant en un scénario onirique. Ce dernier hanta régulièrement mes nuits lorsque nous fûmes scolarisés dans une école primaire de Constantine, éloignés de ce train.  

Le train était remplacé par un autobus et ma peur, initialement imaginée par ce jouet en plastique, par un bébé traversant la chaussée et s’apprêtant à se faire écraser. Mon comportement dans le rêve fut alors propulsé par une force inimaginable qui me fit me précipiter pour saisir le bébé et le sauver des roues de l’autobus, « force » que j’appellerai plus tard « pulsion » et le bébé incarnant un « archétype » selon Carl G. Jung. Ce rêve-cauchemar se reproduisait régulièrement sur plusieurs années. 

Ceux qui connaissent mes engagements professionnels ne devraient pas être surpris par mon interprétation de ce rêve : mon « comportement » se portera régulièrement pour protéger les enfants quels que soient les dangers. 

D’autres rêves depuis me transmirent l’idée que nous sommes influencés à notre insu sans pour autant recueillir l’impression que cette influence nous serait néfaste, bien au contraire. Si bien que de nos jours, j’aurais tendance à penser que notre inconscient (pas celui de Freud !) veille sur nous à notre grand avantage et à notre insu, au point de nous faire nous questionner sur notre libre arbitre.

L’inconscience de cette vigilance peut-elle devenir consciente ? Notre réponse pourrait être envisageable à condition de considérer l’accès à cette conscience des bienfaits de l’inconscient en envisageant autrement notre libre arbitre et en nous libérant préalablement d’une mémoire, si elle devait véhiculer une certaine pathogénie, sans le recours à une thérapie psychanalytique, ce n’est pas gagné ! 

Sur le plan théorique, pour nous guider nous avons (a minima) quatre auteurs qui devraient nous mettre sur la voie : Benjamin Libet (1916-2007), avec son exploration de la conscience et de l’inconscient, « L’esprit au-delà des neurones, Une exploration de la conscience et de la liberté », (2012), Krystèle Appourchaux (Chercheuse en philosophie clinique à Montréal) qui nous propose « Un nouveau libre arbitre » ouvrage publié par CNRS Editions (2014), Michael Gazzaniga avec « L’instinct de conscience » (2018 USA – 2022 France) dont ce dernier livre fut précédé de « Le libre arbitre et la science du cerveau » en (2013), enfin Francisco Varela (1947-2001). Lui propose que l’enfant se crée continuellement suivant une incessante co-construction entre lui (sa conscience et son inconscient ancré dans son corps) et son environnement par « énaction ». Il serait illusoire de rendre compte de cette « co-construction » à la « troisième personne » comme préconisée par tous les chercheurs qui ont exclu le ressenti et l’éprouvé de leurs champs d’investigation.

Nous devrions retrouver ces auteurs et d’autres travaux qui renforceraient les ressources de cette sympathique première équipe. 

Avec l’accordage de la motricité spontanée (que la maman en attente de son bébé perçoit comme l’on dit « subjectivement ») et des émotions entre mère et bébé, selon Daniel Stern (1934-2012), on peut aussi envisager qu’il s’inaugure in utéro. On en arrive même à suggérer une nouvelle approche possible de la notion de désir – première étape amenant à un nouveau libre arbitre – tant de la mère que de son bébé, par cette question : « L’objet » mère est-il l’objet qui crée le désir ou permet-il à l’enfant d’advenir ?

L’éveil de l’enfant à lui-même,

l’émergence du désir, associé idéalement au libre arbitre

Permettons-nous une digression pour illustrer ce que pourrait être l’acte d’éveiller l’enfant à lui-même compte tenu des capacités discriminatives de ses cinq sens ; et pour présenter en même temps notre attitude critique à l’égard de certains points théoriques du modèle freudien selon lesquels l’objet-mère serait à l’origine du désir. 

Voici la proposition : L’objet-mère est-il l’objet qui crée le désir ou permet-il à l’enfant d’advenir suivant son processus inné de développement ? Ainsi « l’objet » (mère ou père) serait-il le déclencheur et le facilitateur d’un processus ?  Qu’advient-il de l’objet du désir en tant que tel ?  La mère est-elle une fin ou un moyen dans « le système désirant » de l’enfant ? Si elle n’est qu’un moyen pour développer l’enfant, elle serait un objet de désir exogène qui favoriserait son développement (suivant la théorie des objets mentaux). Le désir endogène de l’enfant, quant à lui, deviendrait la réalisation ressentie de son propre développement, un objet interne et non son substitut, l’objet externe. Cela pourrait devenir son propre désir, c’est-à-dire le désir de vivre. Dans ces conditions,  l’enfant devrait ressentir  que c’est de lui que proviennent ses perceptions et son développement, favorisé, certes,  par un objet externe (la mère ou le père, par exemple) dans la conquête d’une autonomie grandissante et ressentie, prémisses ressenties du libre arbitre. Et la mère ressent que l’enfant s’autonomise sous ses yeux.

Le processus d’autonomisation est l’expression appropriée pour aborder ce passage de la dépendance fusionnelle à l’autonomie qui devrait permettre ce renouveau du libre arbitre. La théorie de l’éducation « énactante » proposée par Varela crée un modèle de développement qui renverse la logique de l’influence éducative. C’est l’enfant qui gouverne souvent épigénétiquement son développement  en influençant l’adulte.  Celui-ci remplit alors une fonction plus de « contenance » que de « remplissage », favorisant ainsi l’individuation biopsychique et le processus de transformation endogène qui lui est lié. Je pense que cette dynamique de l’interne-externe peut être ressentie très tôt par l’enfant, dès les premiers moments de la vie. Il s’agit d’empirisme actif. Et nous pourrions, me semble-t-il,   reprendre  avec Jung  la notion de  processus d’individuation. 

Serions-nous sur le point de rendre scientifique ce que nous ressentons, en l’occurrence le sentiment d’exister, tout en sachant que ce sentiment serait à actualiser sans cesse ? Antonio Damasio (1999) cite Ronald Melzack qui « suggère que nous sommes nés avec un réseau neuronal génétiquement contrôlé, modifiable par l’expérience, qui sert de support à notre sentiment du corps », p. 342, une sorte de « neuromatrice » à partir de laquelle le sentiment de soi émerge.

C’est autour du concept de « processus d’individuation » que s’articule notre recherche, il en est le  fil d’or. Et ce processus s’appréhende par la sensorialité évaluative : la sensation. Un enfant ayant ressenti qu’il est lui-même le projet-sujet de son développement ne devrait pas renverser excessivement la toute-puissance de ses idées contre un parent qui contribuerait à son développement. Vouloir maîtriser son environnement n’est-il pas plus fort lorsque, dépendant de lui, on sentirait qu’il lui échappe ? Mais comment prouver cette intuition ? Le fait d’agresser l’objet qui nous échappe n’est-il pas celui, initialement, d’une pulsion de vie, celle de vouloir (tout) maîtriser ? Le désir de maîtrise serait d’autant plus fort que l’enfant garderait en mémoire des expériences de vide, de manque, de perte. Elles sont initialement organisées à partir d’objets réellement manquants. Par la suite l’enfant pourrait manifester des angoisses de perte, de manques réels et fantasmatiques. 

Ensuite la pulsion individuante (en d’autres termes la pulsion émergente du sentiment de soi fondant le libre arbitre) « s’érotiserait » par déplacement sur des objets externes de substitution. La sécurité psychologique étant défaillante, la toute puissance de la maîtrise motrice aboutirait à une inopérabilité de changement visant un mieux-être de l’enfant.   S’il se révolte, et si sa réaction n’est pas suivie d’effet, dans ces conditions, il est probable qu’il se rétracte et s’auto-inhibe pathologiquement (selon les thèses d’Henri Laborit) rapidement ou progressivement. On peut imaginer qu’un enfant puisse perdre confiance dans ses propres réactions internes, se replier sur lui-même dans un mouvement d’introversion voire de reflux vers des « automatismes psychologiques », P. Janet et C. Baudouin.

La psychologie d’un « nouvel enfant » serait à (re)construire

Nous pensons que la psychologie d’un nouvel enfant serait à reconstruire. Pour ce faire nous devrions partir de la biologie du développement, celle-ci qui aura intégré le principe d’une liberté énactive. Pour imaginer sa reconstruction, les constatations et les réflexions des psychanalystes nous aideront à nous déterminer non en opposition à leurs savoirs mais en termes de complémentarité et de dépassement des théories. Si une nouvelle théorie d’un enfant purement imaginaire pouvait s’édifier autour d’un enfant expérimentant son libre arbitre, à la façon dont M. Weber avait imaginé un type de société idéale, un travail imaginatif s’opérerait au niveau de nos représentations. Dès lors de nouvelles hypothèses pourraient émerger et stimuler les recherches en clinique ou en laboratoire dans des directions nouvelles.

Une vision « pessimiste » des dynamismes innés

Pour l’instant, les modèles qui rendent compte de la psychologie du développement de l’enfant à partir de la psychopathologie semblent souffrir d’une vision pessimiste des possibilités que la vie a entreposées, lentement, au fil des siècles, au sein de notre espèce. 

Les travaux de chercheurs affirment régulièrement la prodigieuse intelligence des bébés. Une intelligence particulière, qui a besoin d’être « éveillée », produirait quelque chose d’original à n’en point douter. 

Il y a aussi les enfants qui s’en sortent. « Par quel mystère, demande Boris Cyrulnik, certains enfants parviennent-ils à se faufiler à travers les fracas de leur existence, pour éviter les coups du sort, les éponger, cicatriser ou même rebondir, pour devenir humains ? », Ces enfants qui tiennent le coup, (1998). Il s’agirait pour eux de devenir eux-mêmes malgré les coups du sort.

Certes, chez un enfant mal aimé (pour être schématique), une stabilisation psychogène du développement risquerait effectivement de s’installer très tôt, d’autant plus tôt que l’enfant est très sensible et extrêmement vulnérable pendant les premiers mois de sa vie. S’il se retranche dans un dépérissement psychologique et organique à la fois, faut-il y voir nécessairement un mouvement de mort et avoir recours à la notion freudienne de pulsion de mort ? En 1987, j’ai pu exprimer mon avis sur le thème de la pulsion de mort en rejetant cette hypothèse.  Malgré des mouvements de vie et de mort ressentis en moi-même, j’ai maintenu ce que j’ai avancé comme étant « ma théorie ». Celle-ci, élaborée en fonction de dispositions internes, reprenait « extérieurement » les positions de ceux qui se prononcent également contre ce principe de dualisme vie-mort.  Je pense de la même façon de nos jours avec plus d’arguments encore. J’ai eu aussi sous les yeux mes deux filles éduquées suivant une idée simple : « Le corps sait ce qui est bon pour lui », ou encore : « Le corps sait et le cerveau réfléchit ». Ces expressions se constituent presque en « slogans », au delà de l’effet de « rupture » représentationnelle escompté. Elles sont sous-tendues par des recherches qui convergent toutes dans le même sens : l’intelligence conduisant au libre arbitre provient du bébé et les perceptions-émotions-sensations seraient à l’origine de l’éveil de sa prodigieuse intelligence innée.

Simultanément à cet éveil les marqueurs somatiques imaginés par A. Damasio sont sollicités, renforçant vraisemblablement la conscience en soi de l’enfant.  Les réflexions des biologistes autour de J.P. Changeux, présentées lors du colloque : Les fondements naturels de l’éthique, (1992), convergent dans le même sens. Chaque année, nous avons de nombreuses confirmations scientifiques attestant que le bébé est un être extrêmement subtil et intelligent dès la naissance et même in utero. Son « intelligence naturelle » provient en premier lieu de sa biologie, qui est intrinsèquement intelligente suivant des savoirs cumulés depuis que la vie existe sur Terre. Cette intelligence ne serait-elle pas en partie génétiquement codée sans que nous en ayons été conscients ? Il serait temps de populariser ces savoirs fiables.

En conséquence si l’on devait réévaluer les thèses sur l’évolution en psychologie théorique, on devrait arriver à penser ainsi : la pulsion de mort et la conception freudienne de l’inconscient deviennent des  « obstacles epistémologiques » selon l’expression de Gaston  Bachelard. Ces obstacles font ainsi barrage dans l’imaginaire du chercheur et l’empêche de penser différemment la théorie du psychisme et le libre arbitre dont l’enfant jouit intrinsèquement, dans son for intérieur ignoré de la science objectiviste… 

Pour progresser, un chercheur qui ferait « rupture » par rapport à des représentations dominantes pourrait   lui-même être rejeté dans ce qu’il prend pour des « avancées ». Il lui faudrait devenir plus que convainquant. Il devrait être précis dans son argumentation si possible scientifiquement étayée.

Prenons la démarche de Boris Cyrunik qui se sent autorisé à critiquer Freud tout en véhiculant son modèle à partir de l’éthologie et de sa propre histoire. Il a recours au concept de « résilience » pour rendre compte de la résistance de certains enfants à se maintenir en vie malgré les chocs endurés, et l’on pense à l’histoire de cet auteur. Il sollicite une réflexion transdisciplinaire pour donner de la consistance à ce concept, utilisant le mot « résilience » à partir du latin resilentia qui caractérise « la résistance au choc ». Faisant appel aux psychanalystes à propos d’un débat qu’il voudrait ouvrir, il leur demande, en quelque sorte, de s’affranchir de Freud en ces termes : « Mais personne ne proteste quand Freud emploie l’expression d’« étayage de la pulsion », parce que sa métaphore est parlante. J’aurais dû dire qu’elle est « imageante », parce que l’image préforme la pensée, avant que nos mots ne la précisent. Le risque de la métaphore, c’est, lorsqu’on ne la fait pas suivre par un débat, qu’elle se fige et déforme la pensée. Quand Freud parle de pulsion (ça pousse en avant), il évoque un processus énergétique, d’origine organique, qui ne prendra forme que sous l’effet de l’étayage fourni par le milieu. C’est pour ça qu’il s’est toujours opposé à la description d’un catalogue de pulsions, puisque la vitalité, gouvernée par les étais, ne prend forme qu’en subissant leur façonnement et ne s’apaise qu’en rencontrant l’objet adéquat ». Ces enfants qui tiennent le coup, p. 9.

Nous pouvons dire que le bébé que nous connaissons aujourd’hui ne ressemblera pas nécessairement à l’enfant de l’an 2025.

Nous pourrions aussi dire que notre façon d’être n’exprime pas ce que nous sommes en réalité. Notre désir de sauver cet enfant des roues de cet autocar aura pris la forme d’un engagement, tel un puzzle d’arguments illustrant les conditions d’un nouveau libre arbitre qui m’anima à l’encontre des schémas de pensées dominants. 

Comment peut-on comprendre que ces potentialités et cette liberté créatrice aient été sous-évaluées ? Une des réponses pourrait nous venir de l’occultation de l’étude des sensations animant la réalité du corps.

Aujourd’hui, une conscience nouvelle s’ouvre à l’égard du corps. Pour mieux comprendre ce changement de perception, on peut se reporter aux travaux de Bernard Andrieu.  Il présente des changements de perception vis-à-vis du corps au travers de l’histoire de l’idée que les hommes se faisaient de lui.  Son analyse cite aussi cette citation très suggestive de Michel Foucault : « La généalogie doit montrer le corps tout imprimé d’histoire, et l’histoire ruinant le corps ». 

« C’est la biologie qui nous rend libre »

Nous ne connaissons pas objectivement les potentialités innées de l’être humain, nous les découvrons grâce aux recherches en laboratoire. Actuellement, les biologistes généticiens sont dans l’expectative des travaux sur l’étude de la part d’influence de l’épigénome. Elle devrait leur transmettre une réalité partielle (ou un aperçu) plus objectif des potentialités innées en rapport avec l’environnement. Ce débat dans ses dimensions passionnelles est aujourd’hui heureusement dépassé (cf. sur ce thème : « Nous ne sommes pas programmés », de R.C. Lewontin, S. Rose, L.J. Kamin (1985). Surprise ! Ces chercheurs terminent leur livre en avançant l’idée (argumentée) selon laquelle  « c’est notre biologie qui nous rend libre ». 

La récente découverte de « La multiplication des neurones chez l’adulte », par Gerd Kempermann et Fred Gage (in « Nature » Vol 386, pp. 493-495, 3 avril 1997) devrait relancer un regain d’intérêt pour ce thème. L’environnement stimule la neurogénèse, mais il faut des souches à activer pour voir l’émergence de nouveaux neurones. Il nous faut évaluer les conséquences de cette récente découverte. Toujours est-il qu’elle renforce les thèses de l’émergence, émergences de nouvelles dispositions portant de nouvelles potentialités latentes. 

Ce débat sur l’inné – l’acquis sera abordable prochainement lorsque les résultats sur les séquences du génome seront publiés, lorsque  l’on connaîtra les subtils comportements des gènes et s’ils ont une influence suer le sommeil et sur sa neurogénèse spécifique. Pour l’instant existe un consensus pour dire que nous sommes le produit d’une interaction incessante entre biologie et culture (ou environnement). « Faut-il admettre, dit Michel Jouvet, que le programme génétique mis en jeu au cours de l’ontogenèse pendant le développement pré et postnatal soit responsable, une fois pour toutes, des innombrables et subtiles connexions interneuronales qui seront, toute une vie, responsables de tel ou tel trait de caractère ? », p. 173, Le sommeil et le rêve, (1992).  Le problème se complique du fait que facteurs génétiques et environnementaux bien souvent agissent de concert ou rétroagissent. Et le psychisme, dont nous cherchons la logique, est certainement une réalité hybride de l’interaction entre nature et culture. Les biologistes et les physiciens explorent la nature. L’étude de l’influence de la culture sur l’organisme est quant à elle explorée par de nombreux spécialistes : psychanalyste, archéologue, historien, ethnologue, linguiste, sémanticien… Les deux sources de savoirs biologiques et culturels cumulés devraient pouvoir s’articuler et nous donner une représentation théorique plus proche d’une certaine réalité « hybride » du psychisme. 

Pour notre recherche nous pouvons émettre l’hypothèse suivante : les potentialités de l’organisme en attente d’activation, n’étant pas consciemment reconnues, ne seraient sollicitées et ne se spécifieraient épigénétiquement qu’en partie par rapport à de plus amples possibilités d’expression, du fait même de cette faible sollicitation. On peut donc penser que ces potentialités génétiques seraient inhibées, ou latentes ou encore en attente d’activation. Prenons comme exemple la thèse controversée sur l’innéité ou non du comportement altruiste, délibérément choisi. Ce choix est arbitraire. Nous aurions pu choisir l’exemple de l’innéité de la violence ou de l’agressivité, leurs expressions se retrouvent également dans les rêves. Nous n’affirmons pas pour autant qu’il existe un gène de l’altruisme ou de la violence. Nous n’en sommes pas là du point de vue génétique. Nous pensons à l’éventuelle possibilité de la présence d’un support physico-chimique résultant d’un effet de rétroaction entre gènes et environnement influençant les comportements. 

La réalité du libre arbitre nous apparaîtra en toute conscience lorsque nous serons prêts à l’envisager.  

Frédéric Paulus, animateur du CEVOI (Centre d’Etudes du Vivant de l’Océan Indien).

Expert extérieur Haut Conseil de Santé Publique

A propos de l'auteur

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