[Matèr] Lou Cachet’, une ferme qui se réinvente

RENCONTRE AVEC JEAN-CLAUDE ET MARVIN

Dix- huit ans après la création de la ferme pédagogique Lou Cachet’ située à l’entrée de la route de Cilaos, à la Rivière Saint-Louis, Marvin et sa femme Marie accompagnés de Jean-Claude ont décidé de donner un nouveau souffle à ce lieu chargé de souvenirs et d’engagements. Le 29 juin prochain, s’y tiendra l’évènement Matèr, porté par Parallèle Sud.

Les rires et les cris des marmailles nous accueillent à la ferme Lou-Cachet’, enveloppée dans un écrin de verdure, et cernée par les falaises qui surplombent l’entrée de la route des quatre-cent virages. Le cadre nous plonge dans l’ambiance du lieu où s’entremêlent arts et nature. Ici, humains, animaux et végétation se partagent l’espace. Aujourd’hui installé avec sa femme Marie et ses enfants, Marvin souhaite donner un nouvel élan à la ferme en proposant de nouvelles activités.

En 2003, ses parents, Mireille et son mari Jean-Claude, achètent ce terrain encore en friche avec une idée en tête, en faire une ferme pédagogique. Le couple voit alors ce projet comme un changement de vie. Assis autour d’une table située aux abords du terrain de camping, Jean-Claude se replonge dans cette période, avec son fils Marvin à ses côtés. “Créer cette ferme a été comme un retour aux sources pour notre famille. Avant, je vivais en ville, et j’occupais un poste technique. Petit à petit, l’idée de se rapprocher de la nature a mûri, mais c’est avant tout Mireille qui m’a emmené avec elle dans cette aventure.”

A l’époque, l’idée est donc de se reconnecter à la nature mais aussi d’en faire profiter les enfants qui viennent passer un moment à la ferme dans le cadre scolaire. Au programme : découverte du potager, des animaux de la ferme dont les abeilles et leur miel, atelier de fabrication du pain, conception de confitures, etc… Au fur et à mesure des années, les groupes d’élèves se succèdent dans les allées de la ferme, entre les enclos pour animaux, la yourte et la place centrale des letchis. Le charme opère, la demande est forte, et la ferme de trois hectares rayonne de plus en plus sur le territoire. Elle sera ainsi amenée à proposer des formations auprès d’autres fermes pédagogiques qui ont le souhait de s’implanter.

Place des letchis, lieu central de la ferme de Lou Cachet’.

Une transition vers de nouveaux horizons 

L’année 2023 marque un tournant dans l’histoire de la ferme, avec le décès de Mireille, elle qui a porté le projet depuis toujours, au côté de son mari et ses enfants. “Nous avons reçu beaucoup d’encouragements. La ferme a un potentiel infini, et l’essence même du projet, c’est ce lieu et sa beauté. Il y a encore beaucoup de possibilités, et on a le devoir de continuer après cette année de recueillement”, nous explique Jean-Claude. Quelques mois avant le départ de sa mère, Marvin avait décidé de s’installer sur le lieu avec sa femme et ses trois enfants.

J’ai grandi ici, puis j’ai eu envie de voir autre chose, de bouger. A la ferme, j’ai beaucoup participé à l’aménagement des espaces, au défrichage, à entretenir la végétation et les espaces pour les animaux, etc.”

Marvin a vu évoluer le site et a décidé de s’y investir aujourd’hui pour le faire évoluer encore. Il sait que c’est sa place. En 2024, la ferme propose des ateliers de fabrication de pain et de confiture, la location de divers espaces comme la yourte, le camping, ou la grande place aménagée.

Marvin, fils de Jean-Claude et Mireille Jolet, installé sur la ferme avec sa famille.

La magie du lieu au service du partage

En parallèle, l’équipe de Lou Cachet’ souhaite faire de ce lieu un espace d’accueil et de partage de savoir-faire. “Nous souhaitons inviter des personnes installées dans leurs domaines de compétences à utiliser ce lieu. L’idée est que des associations, des artistes, mais aussi des formations puissent être accueillies à la ferme.” Plusieurs événements culturels ont déjà eu lieu à Lou-Cachet, comme le festival Kosa in Sonz l’année dernière, qui va être réédité cette année.

En continuant d’arpenter les allées de la ferme vers les hauteurs, on trouve une yourte en bois accompagnée d’une buvette, surplombant le reste du terrain. De cet espace, idéal pour les concerts et autres évènements artistiques, émane une douceur de vivre propice à la magie des arts. On s’y voit déjà, assister à des concerts de maloya, lever les yeux et contempler la danse menée par les branches de bananiers, sous un ciel étoilé.

“L’important, c’est l’intelligence collective”

La ferme Lou Cachet’ est aussi et d’abord une œuvre collective. Le souhait exprimé par Marvin est de faire de ce lieu un espace d’expression, d’innovation, où chaque personne peut proposer des idées, tout en restant dans les valeurs de la ferme. La cadence des interventions pédagogiques a été ralentie, pour laisser la place à de nouveaux projets. “L’identité de la ferme, c’est un mélange entre nature, culture, bien-être et bien manger.” ajoute Marvin.

Pour celui-ci, il est important de savoir déléguer pour avoir du temps et pouvoir partir de la ferme lorsqu’il en a besoin. Une philosophie que Jean-Claude comprend très bien, puisqu’il ajoute un sourire aux lèvres en regardant son fils : “C’est vrai que nous avons énormément travaillé avec Mireille pour cette ferme, et je comprends que les nouvelles générations cherchent à trouver un équilibre entre travail et temps personnel.” Une nouvelle dynamique qui se traduit par une ouverture à d’autres activités, mais toujours dans une volonté de valoriser les savoir-faire réunionnais.

Identité réunionnaise, art et respect de la terre

Marvin insiste sur ce point. Au cœur du projet de la ferme, il y a la mise en lumière des traditions réunionnaises. Pour ce joueur de Maloya, c’est le fil conducteur de l’histoire de Lou Cachet’. “J’ai vraiment à cœur de mettre en valeur les pratiques et les richesses de cette île”, nous explique-t-il. Pour cela, l’art est un moyen de valoriser cette culture.

Lorsque l’on suit le chemin qui fait le tour de la ferme, à côté d’un enclos où vivent poules et chèvres, se trouve l’atelier d’artiste de Jean-Claude. Il nous fait entrer, et présente avec modestie quelques unes de ces œuvres, dont une sculpture en bois massif, traitant de la migration et du rapport à ses racines. Faut-il rester, faut-il partir? ajoute-t-il à la description de son œuvre. Une réflexion qui fait écho à l’histoire familiale, puisque Mathis, deuxième fils de Jean-Claude et Mireille est resté en métropole où il continue des études en lien avec l’environnement, avec pour projet futur de les rejoindre à la Réunion.

Jean-Claude dans son atelier d’artiste

Le thème du rapport à la terre revient tout au long de la visite de la ferme de Lou-Cachet’, comme un poème, dont les vers se trouvent cachés dans chacune des activités proposées par le lieu. La ferme Lou-Cachet’ accueillera l’évènement Matèr le 29 juin prochain. Cette journée est une invitation à partager, autour des domaines de l’art, de la nature et du journalisme.

On vous invite à découvrir ce joyau verdoyant le 29 juin à partir de 12h.

Sarah Cortier

A propos de l'auteur

Sarah Cortier | Etudiante en journalisme

Issue d’une formation de sciences politiques appliquées à la transition écologique, Sarah souhaite désormais se former au métier de journaliste qui la fait rêver depuis toujours. Persuadée que le journalisme est un moyen de créer de nouveaux récits et d’apporter de nouveaux regards sur le monde pour le faire évoluer, Sarah souhaite participer à ce travail journalistique engagé aux côtés de Parallèle Sud.

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