[Musique] Ça bouge encore pour Mouvman Alé

MALOYA PSYCHEDELIQUE

Franswa Virassamy-Macé. (Photos PhN)

Franswa Virassamy Macé a fondé Mouvman Alé en 2016. Depuis un peu plus d’un an et une résidence Bekali, les concerts s’enchaînent. Nous les avions rencontrés l’an dernier, ils étaient en route pour les Transmusicales, le Mouvman est lancé.

En un an, Mouvman Alé s’est fait une réputation, tant ici dans son île de naissance que dans l’Hexagone. La prochaine étape c’est l’international avec une sélection pour le Womex (World Music Expo) fin octobre en Espagne. Ce sera l’occasion de rencontrer les programmateur du monde entier.

Franswa, votre musique fait l’unanimité. En avez-vous conscience ?

C’est étonnant, plaisant de constater que ce qu’on fait intéresse. Mais il y a peut-être aussi des gens qui n’aiment pas. En tout cas, on donne tout et nous sommes sincères, c’est ce qui compte pour nous.

Comment en êtes-vous arrivés à cette musique au style indéfinissable, puisant à la fois dans le rock que dans le maloya?

C’est pour moi le fruit d’une longue recherche, de voyages, de parents activistes culturels qui nous emmenaient partout où il y avait de la musique. Bordeaux, l’Angleterre, l’Espagne… A Bordeaux, j’étais dans une école de jésuites; j’ai trouvé dans cette ville un écho à mes préoccupations musicales avec le rock omniprésent. En Angleterre, dans le quartier indien de Londres, j’ai découvert dans un magasin de tablas que l’on pouvait mélanger le rock, la musique indienne et des grosses basses. Quand je suis revenu à La Réunion, j’ai compris que j’étais musicien mais j’avais un problème à me sentir légitime ; j’ai arrêté six ans et je suis revenu. J’ai rencontré plusieurs personnes qui m’ont permis d’avoir la folie de lâcher prise.

Vous jouez avec des musiciens exceptionnels. Où les avez-vous rencontrés?

J’ai débuté avec Rodolphe Céleste et Dylan Marvillier qui jouaient déjà dans plusieurs formations. Avec eux j’ai compris la voie que j’allais suivre. Un groupe c’est mouvant, les gens évoluent et j’ai beaucoup de fierté d’avoir travaillé avec eux. Un changement d’équipe n’est pas un drame et, quand ils n’ont plus été assez disponibles, j’ai trouvé à l’EMA (école des musiques actuelles de Saint-Leu) Loïc Medoc-Elma (percussions), Baptiste Clément (guitare, basse) et Benjamin -Bajoun – Rebolle (clavier, MAO). Si on s’entend aussi bien sur scène, c’est qu’on s’entend bien aussi dans la vie. L’important c’est de savoir qui l’on est, qui sont les autres aussi ; ça permet de se dire les choses, de discuter en toute confiance. Entre nous, il n’y a pas de concurrence, chacun a son génie. Ils jouent avec la boule d’énergie propre à La Réunion.

Dites en plus, qu’est-ce que cette énergie ?

C’est un sujet de réjouissance. Il y aura toujours des perturbations, il faut savoir en jouer. A La Réunion, on n’a pas le choix : les changements de société ont été rapides, nos parents ont dû et sut s’adapter. Ça participe aussi à une forte identité locale, mais sans identité stable. On apporte chacun sa patte, sans détruire cette boule d’énergie. On reste détachés, chacun voit sa façon de l’aborder. Aujourd’hui, on se donne à fond dans ce travail, on est connectés à tout jamais.

Depuis la dernière fois que l’on s’est rencontrés, il y a un an, quel a été votre chemin ?

Les Transmusicales ont été suivies d’une tournée de six dates en trois semaines. Le festival rennais a aussi été l’occasion du tournage d’une vidéo diffusée sur KEXP (*). Depuis, la moitié de nos followers sont étrangers ; on nous écoute depuis l’Amérique du Sud, des Etats Unis, de la Pologne, c’est incroyable. Fin octobre, nous sommes attendus au Womex. Encore un marché des musiques qui s’annonce plein de promesses. 

Vous avez joué sur des scènes parmi les plus importantes de France et dernièrement aux Francofolies de La Réunion. Ce n’est pas trop difficile ?

Au contraire. Bien sûr qu’on aime les petites scènes comme les grandes.. Mais finalement, c’est beaucoup moins facile de jouer devant peu de spectateurs, quand on peut les voir dans les yeux.

Propos recueillis
par Philippe Nanpon

Malgré un concert programmé tôt, le public est venu nombreux.

(*) KEXP-FM est une station de radio musicale publique américaine basée à Seattle, dans l’État de Washington. Elle est gérée par l’Université de Washington et est soutenue financièrement par l’université, par le philanthrope milliardaire Paul Allen via son Experience Music Project et sa fondation, et par ses auditeurs. (Source Wikipedia)

A propos de l'auteur

Philippe Nanpon | Journaliste

Déménageur, béqueur d'clé dans le bâtiment, chauffeur de presse, pompiste, clown publicitaire à roller, après avoir suivi des études d’agriculture, puis journaliste depuis un tiers de siècle, Philippe Nanpon est également épris de culture, d’écologie et de bonne humeur. Il a rejoint l’équipe de Parallèle Sud pour partager à la fois son regard sur La Réunion et son engagement pour une société plus juste et équitable.

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