LIBRE EXPRESSION
Au vu de notre histoire, de ses séquelles actuelles dans notre île, et des blessures mémorielles légitimes, l’on ne saurait dénier qu’un certain nombre de questions se posent à nous, au regard de l’idéal d’émancipation humaine que tous revendiquent dans une vision universaliste des droits humains.
Pour autant, au-delà du cas particulier de la place où fut proclamée l’Abolition de l’esclavage à La Réunion, dont le sort aurait dû appeler un débat public organisé avant toute décision, il apparaît nécessaire de souligner que la volonté de faire le « nettoyage » dans notre pays de toute trace de notre passé esclavagiste ne saurait ni autoriser la réécriture de l’histoire, ni devenir une politique systématique.
Il est vrai que notre paysage mémoriel local a commencé à évoluer depuis 1983, année où notre « 20 décembre » devint ici une fête officielle fériée. Ce paysage est certainement appelé encore à s’actualiser et à se modifier.
La LDH à La Réunion, loin de toute passion « iconoclaste », souhaite appeler collectivités, État, citoyens et citoyennes, à une réflexion collective organisée visant à définir et mettre en œuvre des actions concrètes et concertées :
— Pour rendre obligatoire un enseignement de l’histoire de la colonisation, de l’esclavage et de l’engagisme, assorti d’outils spécifiques ;
— Pour rendre effectif un partage des mémoires permettant de faire émerger, au-delà des quêtes identitaires, un « récit commun » de notre histoire, en rendant plus visibles les vestiges encore trop discrets de notre passé.
— Pour des mesures locales de lutte contre les discriminations issues de la période esclavagiste et coloniale (accès à la réussite scolaire et aux postes de responsabilité) ;
— Pour l‘édification d’un lieu de mémoire monumental et d’un musée rendant hommage à celles et ceux qui, à La Réunion, au péril de leur vie, se sont concrètement battus contre l’esclavage et pour l’émancipation humaine, — et dont quelques-uns de nos sommets gardent haut le souvenir.
En cette année où les registres de l’esclavage de l’empire colonial français sont inscrits au Patrimoine mondial de l’UNESCO et où l’on commémore l’anniversaire de l’appellation de notre Île de La Réunion, il est temps de faire « Réunion » sur ces sujets.
Le bureau de la Ligue des Droits de l’Homme à la Réunion
Chaque contribution publiée sur le média nous semble répondre aux critères élémentaires de respect des personnes et des communautés. Elle reflète l’opinion de son ou ses signataires, pas forcément celle du comité de lecture de Parallèle Sud.