Saint-Leu : au troisième jour de grève chez Derichebourg AOI, les salariés réclament des garanties pour leur avenir

Les salariés de Derichebourg AOI, en charge de la distribution d’eau potable sur la commune de Saint-Leu restent mobilisés en ce troisième jour de grève. Les négociations, entamées ce matin concernant l’avenir des salariés, se poursuivront demain auprès des membres du Territoire de l’Ouest. 

Depuis lundi, seize salariés de la société Derichebourg AOI (Aqua Océan Indien), en charge de la distribution d’eau potable sur la commune de Saint-Leu, sont en grève. En ce troisième jour de mobilisation, ni les inquiétudes ni la détermination ne faiblissent. Le point de friction : l’absence de garantie sur le maintien des emplois alors que le contrat avec le Territoire de l’Ouest (TO), principal donneur d’ordre, traverse une phase critique.

Une revalorisation salariale insuffisante

« Nou tienbo, nou larg pa », affirme Félicité Sully, délégué syndical UR 974. Ce salarié de longue date, en poste depuis 25 ans, résume l’état d’esprit des grévistes : détermination et inquiétude. Selon lui, une liquidation judiciaire pourrait intervenir dès le 17 juin – une éventualité que la direction dément, mais qui plane comme une menace sur le quotidien des salariés.

Les négociations entamées depuis le mois de mai n’ont pour l’heure rien donné de concluant. La direction propose une augmentation salariale de 30 euros et quelques primes ; les salariés en réclament 100, au nom de l’inflation, de la reconnaissance du travail fourni, et d’un besoin urgent de stabilité.

Mais au-delà du salaire, c’est l’avenir des postes qui cristallise toutes les tensions. « On veut que les emplois soient préservés, qu’il y ait un repreneur ou pas », insiste Sully. Cette demande semble rester sans réponse claire de la part de la direction, qui renvoie la balle au TO, seul à pouvoir acter la reconduction ou non du contrat.

Un contrat déficitaire depuis la mise en service de l’usine de Maduran

Le cœur du problème réside dans la rentabilité du contrat liant Derichebourg AOI au Territoire de l’Ouest (TO). Depuis la mise en service de la station de traitement de Maduran à la fin 2024, les charges auraient explosé, rendant le contrat déficitaire pour l’entreprise. Le directeur du site, Nicolas Touzet, reconnaît cette situation et indique avoir demandé, dès la fin de l’année dernière, une renégociation tarifaire. « On espère que le TO tiendra ses engagements, mais les discussions avancent lentement », explique-t-il.

Du côté syndical, on pointe du doigt un manque de transparence. « Nous, on est clean. Mais on a été tenus dans l’ombre. Maintenant, on nous reproche les mauvais résultats », déplore un salarié. L’amertume est palpable chez ceux qui ont vu leur engagement professionnel remis en cause sans avoir été associés aux décisions clés.

Une démarche vers le Territoire de l’Ouest

Clara Derfla, membre de la commission exécutive de l’UR 974, annonce un déplacement des représentants syndicaux au siège du TO. « Demain nou viens », lance-t-elle, bien décidée à faire entendre la voix des salariés auprès des décideurs politiques et institutionnels. Elle appelle les élus – notamment le président du TO et le maire de Saint-Leu – à s’engager concrètement pour garantir la pérennité des 16 emplois, même en cas de changement d’opérateur.

Pour Jimmy, salarié depuis 2017, le recours à la grève n’a rien d’un caprice. « C’est malheureux pour les abonnés, mais c’est le seul moyen qu’il nous restait. On a toujours voulu dialoguer. » Son témoignage met en lumière un sentiment de résignation mêlé à la peur de voir s’effondrer des années d’investissement professionnel.

Locaux de Saur Derichebourg AOI
Locaux de Saur Derichebourg AOI
Sully, délégué syndical
Grève devant l’entreprise
Nicolas Touzet, directeur général

En attendant des réponses

En toile de fond, ce conflit révèle l’extrême vulnérabilité des salariés face aux déséquilibres économiques des contrats publics-privés. Si Derichebourg dépend du TO, ce sont d’abord les salariés qui en subissent les répercussions. Et, par ricochet, plus de 10 000 usagers à Saint-Leu, qui risquent de faire les frais d’un bras de fer sans résolution.

Les grévistes promettent de rester mobilisés jusqu’à l’obtention de garanties. « On ne demande pas la lune, juste de savoir si demain, on aura encore un emploi », conclut sobrement l’un d’eux.

Texte : Olivier Ceccaldi

Vidéos et photos : Etienne Satre

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Olivier Ceccaldi

Photoreporter.

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