ENVIRONNEMENT
Le 3 septembre dernier, sur la plage de sable noir de L’Etang-Salé, une cinquantaine de citoyen.e.s se sont rassemblé.e.s pour demander la libération du président de l’assocation Sea Shepherd, Paul Watson. Le collectif datant d’une semaine “Free Paul Watson 974”, qui a appelé à manifester, porte la voix réunionnaise de défense des cétacés, et appelle à continuer la lutte contre cette arrestation considérée tout autant injuste que scandaleuse. Plusieurs manifestant.e.s nous ont livré leur point de vue sur la question.
En cette fin d’après-midi, sur la plage de L’Etang-Salé, les manifestant.e.s se rejoignent par petites vagues. Certains se connaissent déjà, d’autres se rencontrent pour la première fois, mais tous.tes partagent la raison de leur déplacement: apporter un soutien à Paul Watson, le président de l’association Sea Shepherd, prendre position contre cette arrestation jugée injuste, et montrer que la lutte pour la protection des cétacés et plus largement des éco-systèmes à La Réunion et partout dans le monde continue.
Pour rappel, l’arrestation de Paul Watson est survenue le 21 juillet dernier, au Groenland alors que son navire , le “John Paul DeJoria”, alors en escale, se rendait dans les eaux arctiques du Pacifique pour arrêter un navire baleinier japonais. Le Japon réclame l’extradition du fondateur de l’ONG, pour des faits ayant eu lien en 2010 lors d’une campagne de Sea Shepherd. A l’époque, on lui reproche d’avoir été co-responsable pour des “dommages et blessures” sur des membres de l’équipage de ce baleinier japonais.
Âgé de 73 ans, la décision du gouvernement danois sur l’extradition de Paul Watson pourrait être lourde de conséquences pour le militant écologiste.
Ce 3 septembre à L’Etang-Salé, plusieurs manifestant.e.s sont venu.e.s habillé.e.s de pulls, de T-shirts, et chemises au logo de l’ONG “ Sea Shepherd”, pour afficher leur soutien, tandis que les membres du collectif “ Free Paul Watson 974” ont dessiné sur le sable en grosses lettres l’intitulé du collectif.
Tristan Simille fait partie du petit groupe ayant créé le collectif, une semaine auparavant, en réponse à l’arrestation de Paul Watson. Passionné de biodiversité marine et militant écologiste, il nous livre son état d’esprit le 3 septembre, veille de la décision judiciaire prise par le Danemark sur le sort du militant arrêté. “ Demain, le 4 septembre, on attend une décision radicale pour le sort de Paul Watson. On sait que la justice du Japon n’a pas bonne réputation: On est très inquiets pour lui, car il a 73 ans, s’il se fait extradé à son âge, il pourrait finir ses jours en prison. Cette arrestation est largement politique, en réalité, on lui reproche d’être un militant écologiste.”
Johny Lebon, venu manifester ce jour-là, est lui aussi indigné par cette arrestation qu’il qualifie de scandaleuse. “Si je suis là, c’est parce que je suis Paul Watson. Les baleines ont juste demandé le droit de vivre, elles n’ont rien demandé d’autre. De quel droit un pays peut emprisonner un héros, c’est quelqu’un qui s‘est mis debout contre le Japon et Danemark pour dire stop à ce crime, car c’est un acte criminel de tuer les baleines.”
Le 4 septembre dernier, la justice danoise a finalement tranché pour prolonger de vingt-huit jours la détention de Paul Watson, et avec elle, le suspense quant à la décision d’une potentielle extradition vers le Japon. Lourde de symboles, cette actualité judiciaire résonne chez les manifestant.e.s réunionnais venus porter leur voix pour protéger des espèces animales ancrées dans le patrimoine naturel de l’île.
Tristan m’explique avec émotions ce que représente les baleines pour lui : “Les baleines font partie du patrimoine naturel réunionnais, comme le tuit tuit ou certaines autres plantes endémiques, et il ne faut pas oublier le fait que derrière ce retour en masse des baleines depuis les dernières années, se cachent des choix qui ont été faits. Paul Watson est le symbole de ces choix, et du combat qui a été mené et qui continue de l’être pour protéger les cétacés.”
Frédéric, militant réunionnais aborde également le sujet avec ferveur : “De savoir que ce protecteur des océans et des cétacés est arrêté, ça me sidère. J’espère que les bonnes consciences et les États vont faire que cet homme sera libéré le plus vite possible. Il faut préserver cette chance que l’on a de pouvoir accueillir les baleines sur notre île, en tant que réunionnais, nous devons aussi être concernés par ce problème, et faire en sorte que Paul Watson soit libéré au plus vite.”
A la fin du discours de certains membres du collectif présents au rassemblement, les applaudissements retentissent et les pancartes se lèvent. Dans le groupe de citoyen.e.s présent ce jour-la, les générations se mélangent, comme en témoignent deux jeunes garçons portant à bout de bras une pancarte sur laquelle on peut lire “ Free Paul Watson”.
Agathe, quant à elle, est arrivée il y a deux semaines à La Réunion pour s’y installer, attirée notamment par la beauté de la nature de l’île, et les efforts déployés par la population réunionnaise pour la protéger. “Je suis attirée par la biodiversité, la nature, La Réunion fait partie de ces endroits ou on la défend. Comme aujourd’hui, on le démontre, il faut que l’opinion publique se bouge, que l’on montre que ce n’est pas impuni d’emprisonner quelqu’un parce qu’il défend quelque chose auquel il croit et auquel beaucoup de gens croient. À force, on finira par nous entendre”.
Un message d’espoir donc, illustré par le souffle d’une baleine venue faire une apparition à la fin du discours de Tristan Simille, comme pour apporter son approbation à ce qui venait juste d’être dit. Une image symbolique, en cette période de mise bas et reproduction des baleines, à La Réunion, tandis qu’elles prendront bientôt le départ pour la grande traversée vers les eaux de l’Antarctique. En attendant, les manifestant.e.s suivront toutes et tous avec attention la suite des évènements quant à l’arrestation de Paul Watson et croiseront les doigts pour ne pas voir cette figure emblématique de la protection des cétacés injustement punie.
Sarah Cortier