ur 974 grève à Soliha

[Social] 5 semaines de grève « pour sauver Soliha »

LE NOUVEAU DIRECTEUR CONTESTÉ

Ils sont une dizaine d’agents de Soliha (ex Pact-Réunion) à s’être mis en grève fin avril. Ils sont déterminés et demandent le départ du nouveau directeur général, Mikaël Sihou, également conseiller régional de la majorité.

Les agents de Soliha, en grève depuis fin avril, risquent fort de ne toucher aucun centime à la fin de ce mois de mai. Ils sont une dizaine et ont déjà battu le record de l’année en entamant la cinquième semaine de leur mouvement.

Ils passent leurs journées sur le front de mer de Saint-Pierre à Ravine Blanche. Ce n’est pas de l’argent qu’ils demandent. Mais le départ du nouveau directeur général, Mickaël Sihou, en poste depuis septembre 2020.

Pourquoi entamer un mouvement aussi dur pour une question de personne ? A l’écoute des grévistes, il apparaît qu’un profond malaise s’est installé au sein de Soliha. Cette association institutionnelle, anciennement appelée Pact Réunion, est chargée de l’amélioration de l’habitat insalubre pour le compte des pouvoirs publics (Département, Région, Etat).

grève à Soliha ex pact Réunion avec UR974 avec Clara Derfla, Nicole Hoareau
Piquet de grève des agents de Soliha à la Ravine Blanche (Saint-Pierre). © Franck Cellier

Les « anciens », ceux qui pendant des décennies ont visité les familles les plus mal logées de La Réunion, ont vu débouler une nouvelle façon de faire. S’est alors enclenché un scénario assez typique de ce genre de « révolution managériale » avec la montée des tensions, la commande d’un audit sur les risques psychosociaux, la multiplication des arrêts maladie pour arriver, finalement, à une situation de blocage. Puis la grève et une négociation dans l’impasse.

L’UR974 accompagne seule les grévistes depuis que la CFDT s’est retirée du mouvement. Sa secrétaire générale Clara Derfla explique avoir refusé de signer le protocole de fin de grève après avoir découvert l’existence d’un réseau de favoritisme profitant à certains prestataires et régissant les derniers recrutements.

Occultisme et peur d’être liquidé

Le directeur général Mikaël Sihou, par ailleurs conseiller régional de la majorité, ainsi que la présidente Viviane Payet Ben Hamida, conseillère départementale de Saint-André, s’en remettent au conseil d’administration convoqué ce vendredi, avant de s’exprimer sur le sujet. Sur les réseaux sociaux, des accusations concernant l’influence d’associations occultes commencent à circuler… 

Ces éléments font basculer les sujets de revendication dans un domaine dépassant largement les limites habituelles du dialogue social. Ce qui explique le caractère, assez exceptionnel, de la grève à Soliha. Ainsi, portant la parole de ses collègues grévistes, Nicole Hoareau, chargée d’opération à Soliha, dit « se battre pour sauver l’entreprise » : « On ne peut pas accepter de voir notre outil de travail se dégrader du fait de la gestion du nouveau directeur. Nous devons sauver notre société ». (Ecoutez la vidéo)

Selon les grévistes, la nouvelle organisation donnerait la part belle à des prestataires, bureaux d’études, au détriment des techniciens salariés de Soliha. « Ils ne savent pas faire et les dossiers n’avancent pas. Nous ne pouvons plus travailler et nous sommes confrontés au mécontentement des familles bénéficiaires, raconte un agent en grève. Avant Pact-Réunion traitait près de 1 000 dossiers par an. L’an dernier Soliha en a finalisé moins de 500 ». Selon lui, cette baisse d’activité, combinée au recrutement de 10 nouvelles personnes en 18 mois, mettrait en péril la survie de Soliha.

Franck Cellier

A propos de l'auteur

Franck Cellier | Journaliste

Journaliste d’investigation, Franck Cellier a passé trente ans de sa carrière au Quotidien de la Réunion après un court passage au journal Témoignages à ses débuts. Ses reportages l’ont amené dans l’ensemble des îles de l’océan Indien ainsi que dans tous les recoins de La Réunion. Il porte un regard critique et pointu sur la politique et la société réunionnaise. Très attaché à la liberté d’expression et à l’indépendance, il entend défendre avec force ces valeurs au sein d’un média engagé et solidaire, Parallèle Sud.