Embarcation de personnes exilées abandonnée au large des côtes tunisiennes près de la frontière avec la Libye.© Olivier Ceccaldi

SOS Méditerranée dépose plainte suite aux attaques contre l’Ocean Viking

Lors d’une conférence de presse organisée par SOS Méditerranée, l’ONG a annoncé avoir déposé plainte suite à l’attaque subie par l’Ocean Viking et son équipage le 24 Août dernier lors d’une mission de sauvetage en Méditerranée. 

Une vidéo pour appuyer les faits

Le 24 Août 2025, l’Ocean Viking, bateau humanitaire de l’ONG SOS Méditerranée était attaqué par un bateau des gardes-côtes Libyens alors qu’il se trouvait dans les eaux internationales avec à son bord 87 rescapé.es et qu’il menait une opération de recherche de personnes en détresse. 

Ce jour-là vers 12h30, les équipes à bord prennent contact avec le centre de recherche et de sauvetage de Rome (ITMRCC) pour avoir l’autorisation d’entreprendre des recherches pour retrouver un bateau de personnes exilées suite à un appel de détresse. C’est aux alentour de 15h, qu’un patrouilleur Libyen de type Corrubia s’approche à grande vitesse et leur intime l’ordre de partir de la zone. L’ONG, toujours en contact avec Rome, alerte sur la situation et prend contact avec le bateau des gardes-côtes pour leur expliquer qu’ils ont l’autorisation de Tripoli et de Rome d’être dans ce secteur. 

Quelques minutes plus tard, alors que l’océan Viking décide d’obtempérer et de mettre cap vers le Nord, les garde côtes ouvrent le feu et vont tirer plusieurs centaines de balles. Dans le même temps, le chef de bord sera en contact direct avec le coordinateur de l’ITMRCC mais personne ne viendra à leur secours. La scène va durer près de 10 minutes avant que le patrouilleur Libyen décide de changer de cap. Suite à cet incident, les personnes rescape.es seront débarquées dans le port italien d’Augusta le 25 Août au soir. 

SOS Méditerranée porte plainte 

Lors d’une conférence de presse organisée ce vendredi 5 septembre, la porte-parole de SOS Méditerranée, Bianca Benvenuti, condamne un attaque qui n’est que le fruit « d’une campagne de criminalisation des organisations humanitaires qui aident les personnes exilées perdues en mer de la part de nombreux États européens » et annonce que l’ONG, qui a fourni une nouvelle preuve vidéo, a déposé ce matin-même une plainte au pénal auprès des procureurs italiens qui ont déjà ouvert de leur côté une enquête. 

Par cette action, l’ONG internationale demande que soient reconnus pénalement plusieurs cas de tentatives d’homicide, souhaite une prise de conscience et un changement de politique des autorités européennes et des États qui la composent ainsi «  qu’une prise en compte du statut des ONG comme des sauveteurs et qu’aucune persécution ni attaque ne soit admise à leur encontre » ajoute Bianca Benvenuti. 

L’Union européenne complice de « crimes contre l’humanité »

Egalement présent, lors de cette conférence, l’eurodéputé français, Mounir Satouri avait dès le lendemain de l’attaque, demandé à la Commission européenne de condamner ouvertement les faits. Depuis, silence radio. 

Lors de la visioconférence, il dénonce la complicité de l’Union européenne avec les « crimes contre l’humanité qui ont lieu en Libye à l’encontre des personnes exilées »  faisant référence aux nombreux témoignages de captures par les gardes-côtes libyens, la réduction en esclavage de nombreuses personnes exilées et de nombreux cas de tortures révélés depuis des années par de de multiples rapports internationaux. « Tout est fait pour que ceux qui cherchent refuge n’arrivent pas jusque chez nous ». 

Vers « une normalisation de la maltraitance des personnes exilées »

Marc Tilley, chercheur indépendant spécialisé dans les migrations à travers la Méditerranée, rappelle que l’incident survenu le 14 Août « ne doit pas être regardé comme un fait isolé » mais que « les dynamiques actuelles remontent au protocole d’accord passé entre l’Italie et la Libye ». Un accord qui a rendu formel l’externalisation de la gestion des politiques migratoires qui est devenu aujourd’hui la base même de la politique migratoire européenne.

Mounir Satouri alerte d’ailleurs sur des accords similaires passés depuis avec la Tunisie ou encore avec l’Egypte qui « normalisent la maltraitance des personnes exilées ». Une stratégie qui vise à financer ou à donner du matériel de surveillance ( comme c’est le cas du patrouilleur libyen Corrubia qui avait été donné par l’Italie en juin 2023 ) mais aussi par la formation des équipes censées assurer cette mission. 

Selon l’eurodéputé, ne pas sanctionner l’attaque envers l’Ocean Viking serait « un renoncement total aux valeurs de l’Europe » dans une période qui voit aujourd’hui une collusion entre les droites et extrêmes droites européennes pour accentuer la lutte contre l’immigration. Dernièrement, c’est même neuf nations européennes qui ont demandé à ce que les pouvoirs de la Cour européenne des Droits de l’Homme soient réduits. Une inquiétude partagée par Bianca Benvenuti : « Quand est-ce-que les décisionnaires vont-ils comprendre que le produit de cette politique n’est que la violation du droit maritime et des droits de l’Homme? »

Olivier Ceccaldi

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A propos de l'auteur

Olivier Ceccaldi

Aujourd'hui journaliste, Olivier a tout d'abord privilégié la photographie comme support pour informer notamment sur les réalités des personnes exilées face à la politique migratoire de l'Union européenne. Installé sur l'île de La Réunion depuis 2024, il travaille principalement sur les questions de société.

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