[Tourisme] Le jardin des tortues aux Avirons

ZOOLOGIE

Tout le monde ou presque à la Réunion connaît Kélonia. Ce jardin des tortues, situé, lui, à l’entrée des Avirons, mérite vraiment le détour !

Ouvert au public depuis moins de cinq ans, on y trouve plus de 400 spécimens de tortues terrestres et quelques tortues aquatiques, sur un magnifique terrain d’environ deux hectares parfaitement aménagé et comportant de nombreuses espèces endémiques. Le jardin y accueille des visiteurs, mais aussi des groupes, et notamment des classes, des animations et un local dédié sont prévus à cet effet. Et ce qui ne gâche rien, ce jardin étant situé sur le versant côté mer, la vue sur mer est à couper le souffle !

Un projet de vie

Ce jardin tropical, c’est un peu un aboutissement, un projet de vie, celui d’Alfred Rivière, ancien enseignant (et fils d’enseignant). Comme il le dit si bien : « Je suis surtout un passionné de botanique et de plantes endémiques. Je suis l’un des membres fondateurs de l’APN, les amis des plantes et de la nature. Chez nous, on ne vend rien, on donne tout ! Et puis j’avais des tortues, je ne voulais pas risquer de me les faire prendre ou de les perdre, j’ai donc eu l’idée de ce jardin ». C’est lui qui a à la fois imaginé et aménagé ce jardin au prix de dix-sept ans de travail et avec pour seule aide financière, une subvention de la Région Réunion, le reste se faisant uniquement sur fonds propres ! Il explique : « Ma maison est là, j’habite là, on a juste aménagé les enclos et des sentiers pour accueillir du public, même des gens porteurs de handicap peuvent descendre ».  

Une douzaine d’espèces différentes

« Au début, j’avais les tortues de mes parents, j’ai récupéré une tortue géante avec l’ancien maire de la commune. Ensuite, il y a beaucoup de naissances ». Parfois des gens apportent des tortues, en particulier quand ils s’en vont ou souhaitent simplement s’en séparer. Il faut savoir que la DEAL et la Préfecture ne veulent pas que les gens en aient chez eux et pourtant, par tradition souvent, de nombreux Réunionnais possèdent des tortues. « Autrefois, explique monsieur Rivière, la tradition voulait qu’on offre une tortue à la naissance d’un enfant. Et il ajoute que certaines tortues auraient des vertus reconnues notamment dans le traitement de l’asthme », elles seraient friandes d’acariens ! . 

Au jardin, il y a même eu quelques spécimens qui avaient été saisis par les douanes. Monsieur Rivière raconte à c e propos l’anecdote suivante : « Une saisie avoisinait les 1000 tortues. On les a nettoyées, on les a soignées, on les a nourries, on les a pucées, et on les a ramenées sur Madagascar pour qu’elles retrouvent leur milieu naturel ».

La passion avant tout

Plus on écoute monsieur Rivière, plus on comprend que l’objectif de ce jardin n’est pas une affaire financière. C’est avant tout un partage de culture, de connaissances, de passion. Et puis il y a cette envie de faire découvrir, aux plus jeunes notamment, les espèces endémiques de la Réunion, et ces tortues, en particulier ces tortues géantes des Seychelles. Mais pas que… Il y a aussi cette « maternité des tortues » où l’on peut à travers des vitres regarder les œufs, et les petits spécimens qui grandissent. Il faut savoir qu’une fois que les tortues ont pondu leurs œufs, elles ne s’en occupent plus !

Aux classes qui viennent de plus en plus nombreuses visiter ce jardin sont proposées des animations (grands panneaux, livrets) encadrées notamment par un professeur des écoles, capable de s’adapter aux différents niveaux des classes accueillies. Un local spécifique est d’ailleurs destiné à l’accueil des classes.

Le « clou de la visite »

En particulier lorsqu’on visite le jardin avec des enfants, le clou de la visite est situé au bas de celui-ci. Un grand enclos accueille plusieurs dizaines de tortues terrestres géantes des Seychelles. On peut tout simplement se balader dans l’enclos et les observer, mais on peut aussi les caresser, et même leur donner à manger ! Autant dire que pour des enfants, ces moments-là sont assez magiques !

Réintroduire des tortues géantes pour favoriser la repousse d’espèces endémiques

Au moment de ma visite, trois chercheurs, dont un botaniste de renom, sont en train de trier des graines qu’ils vont ajouter à la nourriture des tortues. Comme l’explique monsieur Rivière : « le binôme tortue – biodiversité est intéressant. Quand une tortue avale des graines de plantes endémiques, ces graines avec un tégument très épais finissent par avoir beaucoup d’humidité dans le transit intestinal de la tortue, et d’après de nombreux scientifiques, 95% de ces graines ingérées par les tortues ont un pouvoir de germination beaucoup plus important ». L’idée est donc de réintroduire des tortues de terre géantes pour progressivement faire repousser dans les Bas surtout (forêts sèches de basse altitude) de nombreuses espèces endémiques aujourd’hui rares.

L’entretien se termine sur l’évocation de ce beau projet. Il est donc assez probable que dans quelques années, des promeneurs puissent croiser des tortues de terre en se promenant dans les Bas !

Dominique Blumberger