Dimanche dernier, le 6 mars, les habitants de Manapany ont organisé une journée de botanique destinée à sensibiliser à la nécessaire préservation des espèces animales et végétales et à y répertorier les plantes sauvages de la baie de Manapany.
« Aucun inventaire de la faune et de la flore n’a été réalisé avant d’entreprendre les travaux », dénonce Tiphaine, une habitante de Manapany. La quiétude du quartier chanté par Luc Donat pourrait bien souffrir des aménagements à venir, tant la mairie de Saint-Joseph semble vouloir en faire un nouveau Saint-Gilles.
En effet, petit à petit, les locations saisonnières remplacent les pieds de vacoa dans les cours, les restaurants s’installent et la construction d’un hôtel quatre étoiles est prévue avec son cortège de routes et de parkings. C’est quand la mairie a décidé d’interdire l’accès aux jardins tellement appréciés des pique-niqueurs du week-end que la contestation a pris corps. D’abord initiée par le Collectif des Usagers des Jardins de Manapany, avant que l’ADPRH de Manapany (association des propriétaires, riverains et habitants de Manapany) ne lui emboite le pas.
Ils dénoncent de concert la construction d’un hôtel en zone rouge et sur une Znief (Zones Naturelles d’Intérêt écologique faunistique et floristique) de type 1. Ils dénoncent également la fermeture des jardins et leur possible privatisation. Ils s’inquiètent encore de la transformation de deux chemins de terre en routes goudronnées. « Ce chemin sera élargi à quatorze mètres, avec ses voies de circulation et ses trottoirs », montre Tiphaine, qui couvre de ses bras écartés toute la largeur du chemin actuel. Plus haut, une autre voie d’accès à l’hôtel mangera une bande de deux mètres cinquante sur la cour de la petite école maternelle.
Patrimoine en danger
Tout ça en faisant fi de la présence d’une espèce de lézard endémique, le célèbre et très menacé Phelsuma inexpectata, autrement nommé gecko vert de Manapany. Faisant fi également de la présence de végétaux indigènes ou endémiques tout aussi rares dans leur milieu naturel. C’est ainsi que, dimanche dernier, une animation à destination du public et de la connaissance scientifique a été organisée: l’inventaire de la flore, notamment dans la zone sub-littorale de la baie de Mananpany. On ne pourra plus dire que l’on ne savait pas, ou comme le maire de Saint-Pierre pour Casabona qu’ « il n’y avait que de la savane ».
Sous la houlette d’un botaniste de profession, les techniques scientifiques de comptage et de géolocalisation ont été exposées au public et des dizaines d’espèces végétales ont été répertoriées. Dont des pieds sauvages de latanier rouge, de palmiste blanc, de saliette, de takamaka bord de mer, ou encore du côté du four à chaux des très discrètes mais très rares Euphorbia viridula ou encore Dichondra repens. Quelque soixante-dix espèces ont été dénombrées, sans compter quelques jeunes lézards verts, peut-être les derniers de leur espèce, emportés avec leur milieu naturel dans le tourbillon des toupies à béton.
Trois plaintes ont été déposées, afin de tenter de contrer la construction de l’hôtel, mais aussi demander la réouverture des jardins. La première pour accéder aux titres de propriété des jardins que la mairie prétend détenir mais ne fournit pas, une deuxième pour faire reconnaitre le caractère public dudit jardin, et enfin l’illégalité des travaux de murs et de barrières qui interdisent l’accès aux jardins.
Philippe Nanpon