La Région défend son bilan et ses comptes

L’assemblée plénière de la Région du 26 juin a adopté le compte administratif 2024 mais elle a aussi révélé un peu plus la fracture de la majorité de gauche.

« Vous annoncez des premières pierres, mais les Réunionnais attendent la dépose de la dernière pierre ». La formule sort de la bouche du principal opposant régional, Jean-Jacques Morel, mais elle résume assez bien la situation de la Région a mi-mandat. Ça va bien, ça va mieux que du temps de l’ancienne mandature embourbée dans son endettement et le chantier inachevable de la nouvelle route du littoral. Mais le bilan à mi-mandat de la majorité élue en 2021 à un goût d’inachevé. Logique.

Quelques minutes avant l’ouverture des débats.

L’assemblée plénière de ce jeudi 26 juin avait l’examen du compte administratif 2024 à son ordre du jour.

Le premier vice président, chargé des comptes, Patrick Lebreton, de son propre aveu, a des courbes et des tableaux plein la tête. Ses chiffres montrent que la capacité d’endettement de la Région Réunion est revenue à un niveau correct, 7 ans au lieu de 12 ans lors de la précédente mandature. Et les agences de notation ont remonté sa note à A3 saluant sa stabilité financière.

Finances redressées

Profitant de la pause du chantier de la NRL, les caisses régionales sont assez pleines pour financer le programme de la mandature essentiellement tourné vers le développement humain.

Deux films d’animation ont montré la construction virtuelle des futurs lycées de la mer et du tourisme.

Mais la situation reste fragile, ne serait-ce qu’à cause du contexte national et international : réduction du fonds de soutien à l’apprentissage, recul des produits de la fiscalité locale, taux d’intérêts élevés. Ce jeudi 26 avril, les conseillers ont adopté le compte administratif 2024 : 1,254 Md€ dont 738M€ en investissement et 516M€ en fonctionnement. Les opposants issus de la liste menée par Didier Robert se sont abstenus à l’exception notable — pour qui se soucie de ce genre de détail — du maire Rassemblement National de la Plaine des Palmistes, Johnny Payet.

Jean-Jacques Morel
Johnny Payet

« Nos recettes de fonctionnement ont progressé de 4% malgré le désengagement de l’Etat. Nous avons redressé nos finances pour pouvoir dérouler notre programme », s’est félicité Patrick Lebreton. Aux élus de la majorité décrivant une « collectivité bâtisseuse » (gratuité des cars jaunes, multiplication des places en formation professionnelle, aide à 10 000 entreprises, relance imminente de l’achèvement de la NRL, etc.) l’opposant, devenu RN, Jean-Jacques Morel a moqué l’absence de projet en les résumant aux deux films d’animation projetés pendant la séance et montrant la construction virtuelle des deux prochains lycées : celui de la mer au Port et celui du tourisme à Saint-André : « Votre bilan de mi-mandat, c’est 4 ans pour rien ».

Danse ternaire autour de Zetwal

Huguette Bello
Fabrice Hoarau, Virginie Gobalou, Wilfrid Bertil, Christian Annette
Jean-Pierre Chabriat

Réponse cinglante de la présidente Huguette Bello : « Tout ce qui est excessif est insignifiant ». Et précision de Céline Sitouze annonçant le début des travaux des lycées à la fin de l’année pour des livraisons en 2027 et 2028.

En fin d’assemblée, la création de la régie Zétwal, chargée de gérer les équipements et biens culturels de la Région, a révélé les dissensions au sein de la majorité. D’abord une différence de point de vue sur la diversité culturelle. Frédéric Maillot souhaite un directeur ou une directrice qui soit imprégné.e du caractère « ternaire » de la musique locale. « Pa fasil a konprand kan ou lé pa né dedan », a-t-il précisé.

Huguette Bello lui a répondu qu’elle veut que toutes les musiques et tous les arts soient valorisés : « Tous les Réunionnais doivent connaître les autres musiques et les autres langues régionales ». Et de déplorer l’absence d’apprentissage du malgache par exemple : « On ignore les autres langues. On a un seul malheureux prof de portugais pour toute La Réunion, c’est honteux. »

Ericka Bareigts, Karine Nabénésa et Normane Omarjee
Patrice Boulevart

Mais l’opposition est surtout venue du groupe d’Ericka Bareigts qui a voté en bloc contre la régie Zétwal, craignant qu’elle ne génère de nouvelles dépenses. Ce « Non » a pu surprendre, il s’expliquerait par le désaccord qui s’est fait jour ces derniers temps autour de la nomination de Patrice Boulevart (issu de la liste Bareigts) à la tête de la SPL Estival dont la Région déplore l’évolution de société d’économie mixte en société publique locale. En guise de représailles, Patrice Boulevart va perdre sa délégation aux mobilités.

Un signe de plus de la fracture de la gauche réunionnaise à moins d’un an des élections municipales. Ça aussi, ça fait partie du bilan de mi-mandat.

Franck Cellier

A propos de l'auteur

Franck Cellier

Journaliste d’investigation, Franck Cellier a passé trente ans de sa carrière au Quotidien de la Réunion après un court passage au journal Témoignages à ses débuts. Ses reportages l’ont amené dans l’ensemble des îles de l’océan Indien ainsi que dans tous les recoins de La Réunion. Il porte un regard critique et pointu sur la politique et la société réunionnaise. Très attaché à la liberté d’expression et à l’indépendance, il entend défendre avec force ces valeurs au sein d’un média engagé et solidaire, Parallèle Sud.

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