À la veille de la célébration de la fèt Kaf, la mairie de Saint-Paul dévoile le projet de réhabilitation du cimetière des esclaves et des oubliés. Projet qui vise à sanctuariser et unifier par un mur d’enceinte ce lieu mémoriel autrefois banalisé.
Protéger la mémoire des esclaves et mettre fin à la discrimination post-mortem, tels sont les objectifs de ce projet de réhabilitation qui rend hommage à ces femmes et hommes marginalisés toute leur vie. « Cette clôture marque une délimitation et montre aussi notre respect à ceux qui ont connu la domination et qui aujourd’hui peuvent reposer en paix », rappelle le maire de Saint-Paul Emmanuel Séraphin, devant le mur de gabions fraichement monté autour du cimetière des esclaves.
Une vérité mise au jour en 2007
En 2007, le cyclone Gamède révèle une vérité longtemps enfouie : des esclaves enterrés hors du cimetière marin, à l’écart du cimetière officiel qui existe depuis 1788. Les fouilles archéologiques menées en 2011 par Sudel Fuma, la mairie et l’université de La Réunion confirment l’ampleur du site : entre 2000 et 4000 sépultures réparties sur 7 niveaux d’empilement. Des esclaves identifiés grâce à des pratiques dentaires spécifiques à l’Afrique de l’Est notamment des dents ciselées retrouvées sur la mâchoire d’une femme.
Un lieu parfois profané…
Pendant longtemps, ce cimetière a servi de parking avant d’être perçu comme un simple jardin. Des pratiques inappropriées s’y sont développées : séance de yoga, rituels occultes, rendez-vous amoureux… « Ça ne peut pas continuer comme ça », insiste le maire. Aujourd’hui la municipalité compte rétablir l’ordre et la dignité du lieu.

Vers un cimetière unifié
La construction des murs de clôture n’est qu’une première étape. Le véritable enjeu ? Abattre le « mur de la discrimination », ce mur blanc qui sépare encore aujourd’hui le cimetière officiel du cimetière des esclaves. « La loi dit que dans un cimetière il ne peut y avoir de discrimination entre communautés » souligne Emmanuel Séraphin. Des percées seront donc réalisées dans ce mur pour créer un cimetière unique avec une seule entrée où chaque sépulture bénéficiera du même respect. Ces travaux entamés s’inscrivent dans le respect de la réglementation du patrimoine et de l’état civil.
Une visite symbolique pour le 20 décembre
La commémoration de l’abolition de l’esclavage ce 20 décembre prendra une dimension particulière à Saint-Paul. La vice-ministre de la Culture des Arts et du Sports, Peace Bertha Mabe effectuera une visite symbolique sur le site. Au-delà de la célébration officielle, le 20 décembre se vivra aussi dans la convivialité. Traditionnellement à Saint-Paul, quartiers et familles organisent leurs propres manifestations. La programmation inclut des concerts, expositions, projections et ateliers culturels, mettant en avant la mémoire vivante, la création artistique et l’expression culturelle. Ce rendez-vous populaire et politique vise à honorer l’histoire tout en regardant vers l’avenir. Les habitants sont invités à participer activement aux événements et à célébrer ensemble cet engagement collectif et mémoriel.
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NB: En marge de la visite organisée par la mairie de Saint-Paul, nous avons remarqué que le caveau qui défigure le carré le plus historique du cimetière, construit illégalement avec la complicité de l’ancien maire Joseph Sinimalé, était toujours en place, huit ans après que la direction des affaires culturelles ait déposé un recours pour sa démolition. « Il y a une procédure en cours », confirme Emmanuel Séraphin, sans pouvoir en dire plus sur l’avancée de la justice.







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