LE CONCERT DE FRED BANOR ET IMPOSTER RACONTÉ PAR LE BISIK
Vendredi 20 octobre, le Bisik accueillait deux projets inclassables à haute valeur émotionnelle ! Le premier projet solo et très personnel de Fred Banor, « L’Affection » qui nous a entraîné au cœur d’une créolité féroce mais souvent fragile et Imposter qui a fait résonner ses titres froids et intenses, qui oscillent entre claustrophobie et célébration entre rock et électro indé.
Malgré le Grand Raid et la coupe du monde de rugby, une centaine de spectateurs a ainsi été témoin de deux performances uniques qui ont réussi à tisser une ambiance singulière pour une soirée haute en couleur.
Entre poésie créole rock et électro indé psyché, le Bisik a une fois de plus entraîné les spectateurs dans des univers musicaux inattendus hier soir.
Comme toujours notre dj résident, Joan’r, a lancé la soirée accompagné de ses platines, nous plongeant dans l’atmosphère idéale pour l’attente frémissante qui précédait le début des concerts. Alors que la salle commençait timidement à se remplir pour accueillir nos artistes, la tension était palpable et pleine de promesses.
Dès 20h15, Fred Banor, membre du groupe Thermoboy, nous a offert la première interprétation publique des titres de son tout premier album solo, intitulé « L’Affection » et composé de chansons acoustiques lo-folk qui nous ont plongés dans un univers musical qui raconte une créolité incarnée et soulignée par les thèmes de l’isolement, de la santé mentale et du consumérisme rampant. Le contenu de ce premier album, composé de chansons lo-folk, dévoile une poésie créole d’un genre nouveau, et d’une sobriété instrumentale inspirée par la folk de Nick Drake et le mouvement lo-fi des années 90, touche au cœur.
Véritables créations artisanales, ces chansons acoustiques dévoilent un artiste heureux de pouvoir enfin laisser parler son héritage musical aux multiples personnalités. L’émotion est à son comble dans la familiarité de la proposition où chacun semble en prière.
Des chansons intimes, mélancoliques, qui puisent leur inspiration dans la vie de Fred mais qui nous ressemblent, de ses souvenirs à Saint-Denis, des nôtres aussi, avec les chansons « 2h30, Deux canons » interlope, ou l’inquiétant « Kartier Renésens », à une chanson touchante, écrite par son père, présent dans la salle et qu’on sent ému, intitulée « Ni mort Ni réveillé ». Fred Banor se livre, exprime le souhait de dévoiler de nouvelles perspectives et thèmes au sein de la nouvelle génération du maloya, invitant à la réflexion à travers des compositions comme « Zwazo Nwar » premier extrait de cet album et premier clip envoûtant fabriqué à base d’images Super 8 inédites de La Réunion qui avait retenu tout notre intérêt et que nous vous invitons évidemment à découvrir.
Un concert passé trop vite face à un public captivé par les mélodies ensorcelantes et émouvantes d’un artiste majeur que nous reverrons forcément et qui nous transperce de ces créations poétiques rares.
« Zwazo Nwar », « Dark Moon »… Une beauté froide
Le temps d’un changement de plateau histoire de se remettre de nos émotions et la soirée peut reprendre son cours avec passion.
Changement d’esthétique mais pas de sensibilité, le rock d’Imposter a pris d’assaut la scène avec l’entrée du trio encore trop méconnu ! La formation minimaliste composée de Austin Kehoe au chant, de Yann Cadet à la guitare et de Guillaume Futhazar aux machines, dispense des titres puissants et planants. Il puise ses influences dans le rock et l’électro indé, se situant à la croisée de Nine Inch Nails, Depeche Mode, LCD Soundsystem, Radiohead ou encore Kely Lee Owens.
Portées par la voix puissante et le charisme incroyable de l’irlandais de la bande, Austin, ces créations sont les bandes-son de films qui n’existent pas, ou pas encore, mais nous plongent au cœur de l’action avec une énergie incroyable. Une couleur année 80 marquée avec « Replicant » sans doute inspiré par un Blade Runner sombre et glacial…
Ici aussi l’atmosphère est sombre et mélancolique, « Dark Moon », froide et imperceptible, « The Spaces in between »…
Yann Cadet, figure centrale du métal réunionnais (Vacuum Road), s’aventure ici sur d’autres terrains musicaux avec toujours le même talent ; Guillaume Futhazar, compositeur et autodidacte obsessionnel, nous plonge dans ses nappes déchirantes.
Le groupe a amorcé son set en douceur, puis a savamment intensifié l’expérience musicale au fil des titres en anglais, of course, pour trouver aisément « The point where all things meet ».
Incontestablement, leur performance a captivé les spectateurs de tous âges, transportant petits et grands dans l’énergie des riffs de guitare et dans la voix envoûtante du chanteur. Du début à la fin, Imposter a su maintenir une tension palpable dans la salle, nous transportant sans relâche dans leur propre réalité musicale parallèle. Une expérience musicale qui restera gravée dans les mémoires des spectateurs comblés.
Lucie Mazeau et Pascal Saint-Pierre