Céline Viry, voix du silence, lumière du maloya, s’est éteinte ce 2 août à 81 ans et laisse derrière elle un chant que nul oubli n’effacera. Elle était la gardienne d’un feu ancien, transmis avec une constance d’âme. Une mémoire vive, tissée de courage, de sa terre et d’amour. La Réunion perd une racine, une sève, un cœur. Mais la chanson qu’elle portait continue de vibrer, dans l’air et dans les corps.
Le décès de Céline Vitry laisse un vide chez ceux qui l’ont connue. « C’est la mort d’une personne qu’on a connue, donc on a forcément un petit peu de tristesse » réagit Thierry Gauliris de Baster, encore ému. Depuis quelques semaines, il participait à la création d’un documentaire sur elle avec son mari. « On voit le succès sur scène, puis son engagement, mais avant d’être l’artiste, on est des hommes et des femmes. » précise-t-il. Ce film, bientôt terminé, retrace son parcours humain et artistique, en abordant aussi ses convictions profondes.
Depuis fin juillet, un hommage à Céline et Firmin Viry sous forme d’exposition porté par le Collectif pour le Maintien des Activités au cœur de La Réunion (CMAC), est visible rue Martinel Lassay au Tampon. Un kabar y sera organisé les 10 et 24 août, date de clôture.
Jean Fauconnet
Réactions diverses
J’apprends avec tristesse le décès de Céline Viry, femme de Firmin Viry, fille de Henri Lagarrigue et soeur de Simon Lagarrigue.
Céline Viry n’était pas seulement la compagne d’un grand artiste. Elle était aussi la gardienne d’un combat : celui de la reconnaissance et de la valorisation du maloya, musique de résistance, de douleur, mais aussi d’espoir et d’identité. Je me souviens que c’est chez le couple Viry que furent enregistrés, en 1976, par Jacqueline Meppiel, les deux premiers disques de maloya.
Le maloya perd aujourd’hui un matrimoine de haute valeur, une chanteuse de talent, une femme dont le parcours a été tissé de courage, de dignité et d’un amour inébranlable pour les siens et pour sa culture.
La Réunion se souviendra de Céline Viry comme d’une soeur de cœur, dont la vie fut intimement liée à l’histoire d’un patrimoine devenu universel.
Lo kèr i plèr, maloya i plèr. Mais notre reconnaissance, elle, restera bien vivante !
En ce moment douloureux, j’adresse, au nom de la Région Réunion et en mon nom personnel, mes plus sincères condoléances à Firmin Viry, à ses enfants, à l’ensemble de ses proches ainsi qu’à toutes celles et ceux qui sont touchés par cette perte.
Huguette BELLO | Présidente de la Région Réunion
La Réunion perd une Femme Courage, dont le souvenir restera lié à la richesse de notre culture.
C’est avec une immense tristesse et une profonde émotion que j’ai appris le décès de Madame Céline Viry, épouse de Firmin Viry, figure essentielle du maloya et de la mémoire vivante réunionnaise
Chanteuse et militante profondément attachée à la terre, Madame Viry a partagé la vie d’un homme engagé pour la culture, et elle a su, tout au long de son parcours, jouer un rôle fondamental au sein de sa famille, dans la transmission des valeurs, des repères et de la force qui lient les générations. Son engagement au sein de son foyer et sa place dans l’histoire de notre île sont indissociables de l’élan collectif qui a porté le maloya au rang de patrimoine mondial.
Elle a été le cœur d’une famille profondément enracinée dans le maloya, dont elle a porté les fondements avec dignité et détermination. Aux côtés de son époux, elle a contribué à faire rayonner une culture longtemps marginalisée, aujourd’hui pleinement reconnue comme l’âme de notre île.
En ce moment de deuil, je tiens à adresser à Firmin Viry, à ses enfants, petits-enfants, ainsi qu’à l’ensemble de sa famille, mes condoléances les plus sincères. Mes pensées les accompagnent avec émotion et respect.
La Réunion perd une Femme Courage, dont le souvenir restera lié à la richesse de notre culture et à l’amour profond de la famille.
Cyrille Melchior | Président du Département
Aujourd’hui, La Réunion perd une mémoire. Un fanm dobout, forte et discrète. Une gardienne des racines.
Céline VIRY s’en est allée.
Elle était l’épouse de Firmin. Mais elle était d’abord Céline Lagarrigue, fille d’Henri, née dans le berceau du maloya. Elle était l’héritière d’une culture transmise par le geste, par la terre et par le cœur.
Dans sa cour de la Ligne Paradis, elle n’a jamais chanté pour qu’on l’écoute mais elle a vécu pour que le chant continue. Elle a élevé ses enfants, nourri les kabars, veillé à ce que le feu reste allumé, même quand le maloya était interdit et quand notre identité était muselée.
« Ti pa ti pa, narivé ». Ce refrain de Firmin résonne aujourd’hui avec une autre force. Parce que Céline faisait partie de celles qui ont marché lentement et patiemment pour que nous arrivions là où nous sommes. Et quand la reconnaissance est enfin venue — avec la fin de l’interdiction de faire vivre le maloya, sous la présidence de François Mitterrand — elle était là ; présente, fidèle et indispensable.
Elle incarnait la puissance tranquille des femmes réunionnaises. Celles qu’on ne filme pas. Elle n’a jamais cherché la lumière, mais elle faisait rayonner La Réunion. Aujourd’hui, je veux lui dire merci. Merci pour ce qu’elle a transmis, pour ce qu’elle a porté et pour ce qu’elle laisse.
Au nom de la Ville de Saint-Denis, du Conseil municipal, et en mon nom personnel, avec respect et émotion, j’adresse mes condoléances les plus sincères à sa famille, à ses proches, à tous ceux qui continueront à faire vivre son héritage.
Céline VIRY ne disparaît pas. Elle entre dans le patrimoine de notre île.
Ericka Bareigts | Maire de Saint-Denis
Dernier hommage à Céline VIRY hier à Saint-Pierre
Depuis son décès une foule immense est venue rendre hommage à ce zarboutan nout kiltir.
De nombreux artistes dont Danyel WARO, Zean Marie BARRET, Thierry GAULIRIS …. étaient présents.
Céline était aussi une militante politique (UFR, PCR) . Pour le Parti, outre de nombreuses et nombreux militants-es étaient venus-es , on notait la présence de
Elie HOARAU, Maurice GIRONCEL et Jean Michel FOLIO qui ont présenté à la famille de Céline les condoléances du Parti.
Bureau de presse du PCR
Céline Viry s’est éteinte, et avec elle, une page du maloya s’est refermée. Mais sa voix, elle, ne s’éteindra pas. Elle résonnera dans chaque roulèr qui bat, dans chaque kayamb qui lutte, dans chaque kabar où la terre vibre sous les pas des enfants de l’île. Céline n’était pas seulement l’épouse de Firmin Viry, ce zarboutan que tout le monde reconnaît : elle était elle-même une figure debout, une militante, une gardienne inflexible d’un patrimoine trop souvent effacé, minoré, folklorisé.
Elle n’a jamais couru après les projecteurs. Elle préférait la lumière des veillées, les silences complices dans lakour, les regards chargés de mémoire qu’on échange entre vieux complices du combat culturel. Car oui, Céline Viry était une combattante. Une combattante de l’ombre, de l’intérieur, de ces luttes qui ne font pas la une, mais qui façonnent les fondations invisibles de ce qui tient debout.
Son engagement n’était pas un slogan, mais un mode de vie. Elle portait le maloya comme une seconde peau, non comme un costume de scène. Pour elle, cette musique n’était pas un divertissement, mais un acte de résistance. Dans ses gestes, ses paroles, ses choix de vie, elle défendait un monde, un langage, une vision de La Réunion que tant ont tenté de gommer : celui d’une culture vivante, populaire, enracinée, insoumise.
Dans l’ombre de Firmin, disaient certains. Mais qui écoute les kabars sait bien que Céline était la sève. Elle tenait la case, nourrissait le collectif, tissait les liens de transmission. Elle était cette mémoire incarnée qui, sans jamais hausser le ton, donnait aux jeunes la force de relever la tête. Il n’y avait pas chez elle de folklore pour touristes, seulement la dignité nue d’un peuple qui refuse de se taire.
Elle appartenait à cette génération de femmes réunionnaises que l’histoire officielle a souvent invisibilisées : des femmes de combat, de silence et de feu, qui ont tenu debout les cases, les familles, les savoirs, les rituels. Ces femmes qui n’ont jamais attendu l’autorisation d’exister pour prendre toute leur place.
Aujourd’hui, les institutions salueront sa mémoire, sans doute. Elle appartient à celles et ceux qui, dans les quartiers, les hauteurs, les champs de canne et lakour, continuent de faire vivre la Réunion qui ne se renie pas, ne s’aligne pas.
Ceux qui l’ont connue, aimée, accompagnée, savent qu’elle était une mère, une sœur, une militante, une musicienne, une passeuse de feu. Elle laisse derrière elle une Réunion qui lui ressemble : fière, blessée, résistante, belle, debout.
Repose en paix, Céline Viry. Et que les tambours te portent jusqu’aux étoiles. Là où le maloya ne meurt jamais.
Toutes nos condoléances à notre potomitan Firmin VIRY ainsi qu’à tous les membres de la Rolev Viry.
Natou et Patrice SADEYEN | Nout Farfar lémisyon radyo
⚠︎ Cet espace d'échange mis à disposition de nos lectrices et lecteurs ne reflète pas l'avis du média mais ceux des commentateurs. Les commentaires doivent être respectueux des individus et de la loi. Tout commentaire ne respectant pas ceux-ci ne sera pas publié. Consultez nos conditions générales d'utilisation. Vous souhaitez signaler un commentaire abusif, cliquez ici.