N’AYONS PAS PEUR DES MOTS
Pas de titi parisien ni de coq gaulois, mais deux souriants bonnets phrygiens anthropomorphes aussi rouges que leurs yeux sont ronds. « Phryges », les mascottes de Paris-2024, ont débarqué à la darse Titan du Port au son des grands titres d’Édith Piaf repris par Nicole Dambreville. Si la célèbre coiffe recourbée vers l’avant est devenue le symbole de la Révolution et de la République française, le bonnet phrygien n’est pas né au pied de la Bastille un soir de 1789. Certains historiens prétendent qu’il aurait été observé pour la première fois en Phrygie, ancien pays d’Asie Mineure situé sur la partie occidentale du plateau anatolien, l’actuelle Turquie. Ce qui est indéniable, c’est qu’il y a puisé son nom.
Pourtant, selon d’autres sources, son origine serait plus ancienne. Le bonnet phrygien aurait été porté par plusieurs peuples indo-européens avant de faire son chemin tout au long de l’histoire de l’humanité. Ainsi, Henri III le choisit comme emblème. Au XVIIe siècle, il incarna la « révolte des Bonnets rouges », mouvement populaire breton contre les taxes royales. Mais c’est à la révolution française que, ironie du sort, il acquiert ses lettres de noblesse. Symbole de la liberté, il est adopté par les Sans-Culottes qui l’assortissent d’une cocarde bleu-blanc-rouge. À partir de là et jusqu’à nos jours, il coiffera Marianne, figure allégorique de notre bonne vieille république.
À l’étranger, la « mode » du bonnet phrygien gagna plusieurs pays d’Amérique latine (Brésil, Paraguay, Colombie, Argentine) ou centrale (Haïti, Salvador) qui l’inclurent dans certains de leurs emblèmes nationaux. Enfin, au XIXe siècle, l’emblématique couvre-chef apparaît sur les timbres-poste de la République du Liberia.
Il n’y a plus qu’à espérer qu’avec des mascottes aussi symboliques, nos Jeux olympiques parisiens seront à la hauteur du succès populaire escompté et que nos sportifs tricolores y feront le plein de médailles. Dans le cas contraire, je le crains, il faudra s’attendre à voir des têtes tomber.
K.Pello
Pour poursuivre le voyage dans le labyrinthe de la langue française, consultez le blog : N’ayons pas peur des mots