N’AYONS PAS PEUR DES MOTS
Ah, Pâques ! Ses tonnes de cacao englouties sans modération, ses joyeuses chasses aux œufs dans la fraîcheur du matin, ses vacances pour les petits, son lundi férié pour les plus grands… Me remontent à la mémoire les souvenirs de mon enfance, époque bénie où, naïvement, je pensais encore que l’agneau que l’on dégustait le dimanche en famille se prénommait Pascal. Ce week-end, j’irai déjeuner chez belle-maman et, sacrilège, il y aura au menu le confit d’un canard dont j’ignore le prénom. Les temps changent, les coutumes se perdent et le prix des cocottes garnies n’en finit plus de flamber. Plus très catholique tout ça. Mais au diable la nostalgie ! Il y a beau temps que je ne crois plus que les mamans des œufs de Pâques sont des poules en chocolat.
Comme chaque année, la fête pascale va donc être célébrée un peu partout dans le monde. Avec des traditions, des dates mais aussi des règles orthographiques différentes selon les religions : la pâque juive (Pessah), sans « s » final et le plus souvent sans majuscule, fêtée le quatorzième jour de la lune qui suit l’équinoxe de printemps pour commémorer la sortie d’Égypte du peuple hébreu, la pâque russe, souvent qualifiée de « grande », sur fond d’Ukraine chocolat, la pâque copte, la pâque grecque, et bien sûr, Pâques (avec une majuscule et un « s »), moment de partage pour tous les chrétiens en l’honneur de la résurrection du Christ.
Pour satisfaire votre appétit de savoir, j’ajouterai que Pâques n’a pas mis tous ses ovules dans le même panier. À l’instar d’amour, d’orgue et de délice, il (ou elle, ou encore iel) présente la particularité de posséder les deux genres. Il est masculin – et singulier – quand il est employé sans article (Noël au scanner, Pâques au cimetière, Desproges), mais devient féminin – et pluriel – dès lors qu’il est accompagné d’une épithète ou d’un déterminant (L’herbe est douce à Pâques fleuries, Brassens). Quel pâquaquès, n’est-ce pas !
Sachez enfin que Pâques est relégué au rang de nom commun dans l’expression « faire ses pâques », qui consiste, en cette période sainte, à aller communier et confesser ses péchés, ce que, je l’avoue devant Dieu, je n’ai plus fait depuis une lointaine et brutale crise de foi. Sur ces bonnes paroles, je n’ai plus qu’à vous souhaiter à toutes et à tous de joyeuses Pâques (selon Larousse et Robert) ou de joyeuses pâques (selon l’Académie).
K.Pello
Pour poursuivre le voyage dans le labyrinthe de la langue française, consultez le blog : N’ayons pas peur des mots