Dans quel état est notre planète ?

LIBRE EXPRESSION

QUELLES SONT LES RÉPERCUSSIONS DE L’ACTIVITÉ HUMAINE ?

LES 9 PROCESSUS du SYSTÈME TERRE

Ce tableau se veut une synthèse du livre d’un enseignant1 qui prend ses sources dans les articles écrits par des groupes de très grands scientifiques mondiaux, publiés par des revues reconnues internationalement pour leur sérieux2. Donc, à priori, c’est du lourd !

Tous ces prestigieux chercheurs savent, évidemment, que la planète Terre fonctionne comme un système, un système composé de nombreux sous-systèmes.

Or, le propre d’un système (ou d’un sous-système) est de changer d’état, si une ou plusieurs limites (ou seuils) qui le caractérisent sont franchies. Est-ce ce que l’on appelle « l’entropie » ?

Un exemple : le corps humain.

Notre température corporelle est régulée à plus ou moins 37°C. À 38,5°C, chacun(e) sait que nous « fonctionnons » différemment : fatigue, maux de tête, courbatures, sueurs, frissons, …

À 41°C, nous sommes au bord d’un seuil, à l’approche d’une limite.

À 42°C, celle-ci est franchie et nous ne nous en remettrons pas. C’est ainsi !

Eh bien, pour le système Terre, c’est pareil !

Avec, présentement, les gaz à effet de serre (GES) à l’origine du réchauffement climatique.

Après s’être mis d’accord sur la liste incontournable des 9 processus du système Terre (voir tableau ci-dessus), nos scientifiques de référence affectent, à chacun de ces processus, une limite qu’ils prennent soin d’estimer à une distance de sécurité d’un seuil aux conséquences dangereuses pour l’humanité (responsables, ils s’interdisent de faire dans le catastrophisme).

Chacune des limites est alors proposée, exposée, à partir d’un indicateur, d’un curseur dont il est possible de suivre l’évolution au fil des années, des décennies, voire des siècles.

À ce propos, les auteurs attirent tout particulièrement l’attention de leur public sur la limite propre au changement climatique, matérialisée ici par le taux de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère. Taux normal qu’ils ont fixé à 350 ppm (parties par million). Taux dépassé depuis longtemps, puisque, après 387 ppm en 2009, il a atteint 395,5 ppm en 2015 ! Qu’en est-il début 2023 ?

Au vu de ce dépassement, ils affirment que la transgression de cette limite augmente le risque de changement climatique irréversible, amenant, entre autres conséquences, des perturbations brusques dans le fonctionnement des systèmes forestiers et agricoles sur l’ensemble de la planète.

Sans détour, les auteurs accusent notre dépendance totale et gravissime à l’égard des énergies fossiles (pétrole, charbon et gaz) et de l’agriculture industrielle (l’un des fleurons du productivisme occidental).

Le deuxième seuil, longuement présenté par nos scientifiques, est celui du taux de perte de biodiversité (au niveau mondial) qui ne cesse s’élever, et qui est de 100 à 1 000 fois supérieur à un taux « naturel » d’extinction des espèces.

À quoi cela est-il dû ?

Les chercheurs identifient, entre autres causes, la transformation des écosystèmes « naturels » en zones agricoles (ex. : Amazonie) et urbaines (ex. : métropoles), ou encore les feux de forêt (dont la fréquence, la durée et l’ampleur augmentent dramatiquement chaque année).

Si le taux actuel de perte de biodiversité demeure aussi élevé, il leur parait évident que la résilience des écosystèmes « naturels » sera gravement affectée.

En effet, la biodiversité assure la résilience aux changements du système Terre. Elle participe d’un maintien des conditions favorables à la vie humaine en société. Plus la température terrestre augmente, plus le taux d’extinction des espèces est élevé. Et donc, plus le taux d’extinction des espèces est élevé, plus les écosystèmes sont vulnérables aux différents changements climatiques.

Ils sont fragilisés, c’est prouvé !

Remarque :

De notre côté, en tant qu’êtres humains, nous avons besoin des écosystèmes. Ils nous sont non seulement nécessaires, mais indispensables ! C’est d’eux que nous recevons de quoi vivre, jour après jour, grâce à l’alimentation, l’accès à l’eau et à l’air.

L’article en question conclut sur le délicat équilibre du système Terre. Au-delà de leurs limites respectives, chacun des 9 processus de la planète (voir tableau ci-dessus) ne cesse d’interagir avec les autres.

Un exemple : les changements actuels dans l’utilisation des sols en Amazonie — la déforestation visant à augmenter les espaces agricoles (pour la culture du soja et pour l’élevage de bovins) — affectent, déjà, les ressources en eau du Tibet. Incroyable mais authentique !

En clair, tant qu’une limite n’est pas atteinte, tant qu’un seuil n’est pas franchi, nous avons la possibilité de faire « marche arrière », en cessant d’altérer l’un des 9 processus de la planète. Comment ?

Par exemple, par une diminution drastique de nos consommations en tout genre, voire par un changement radical de société !

Sommes-nous prêts à accepter la « décroissance », ou faudra-t-il nous l’imposer, qu’on le veuille ou non ?

A l’opposé, si nous continuons sur la lancée consumériste actuelle, très rapidement, au moins une limite sera franchie, provoquant une rupture brusque et irréversible, puisqu’il n’y aura pas de retour en arrière possible. Nous sommes prévenus.

Remarque :

Au vu du tableau récapitulatif ci-dessus, 5 limites ont été atteintes en 2015, l’année de l’Accord de Paris3. Qu’en est-il début 2023 ? En 8 ans, combien de nouveaux seuils ont été franchis ?

Déjà, nous devons vivre avec un nouvel état du système Terre, un état dégradé : des températures moyennes nettement plus élevées que dans un passé relativement récent, des périodes de sécheresse plus longues et plus fréquentes, des incendies de forêts inhabituels un peu partout sur la planète, des cyclones et autres tempêtes plus nombreuses et plus violentes, la fonte des glaciers et calottes glaciaires et son corollaire, la montée des eaux océaniques, etc.

Autant dire que, bientôt, si nous ne faisons rien (ou pas grand-chose), nos conditions de vie sur Gaïa risquent d’être profondément modifiées …

Ensemble, vite, réagissons pour ne pas avoir à subir trop de changements radicaux !

Demain ?

NON, DÈS AUJOURD’HUI !

Michel Boussard

Notes :

  1. Docteur en sciences de l’environnement, en science politique et en sciences de l’éducation, Nathanaël WALLENHORST travaille, comme enseignant chercheur à l’université de l’Ouest, sur les incidences de l’entrée dans l’Anthropocène. Il est l’auteur, au Pommier, de L’Anthropocène décodé pour les humains.

Présentement, le texte ci-dessus est un résumé de son ouvrage intitulé La vérité sur l’Anthropocène, publié au Pommier, en janvier 2020 (120 pages, 8€ dans l’Hexagone).

  • Les revues s’appellent : Nature, Science, The Anthropocène Review, Environmental Research Letters, Science Advances, etc. D’une très grande qualité, les articles sont lus et relus, non seulement par les groupes d’auteurs, mais aussi — et surtout — par deux, trois ou quatre experts du domaine exploré, experts qui n’ont pas connaissance de l’identité des auteurs. Autant dire que ces documents sont fiables !

Tous sont écrits en anglais. Exceptionnellement, certains sont traduits en français.

  • L’Accord de Paris, adopté par les 196 parties de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP 21), à Paris, le 12 décembre 2015, est entré en vigueur, officiellement, le 4 novembre 2016. Depuis, les États travaillent à sa mise en œuvre. Assidument ? Certainement …

Chaque année, ils se retrouvent pour faire le point. Fin 2022, c’était en Égypte.

Début décembre prochain, la COP 28 se déroulera aux Émirats arabes unis, à Dubaï.

Quelles nouvelles décisions (radicales !) seront prises ?

Bonus :

Qu’est-ce que l’Anthropocène ? Littéralement : « l’âge de l’Homme ».

Constat ; depuis la fin du 18e siècle, l’être humain est devenu l’acteur central de la biosphère.

Définition :

  1. L’Anthropocène désigne l’ère géologique actuelle qui se caractérise par les signes visibles de l’influence de l’homme sur son environnement, notamment sur le climat et la biosphère (ensemble des êtres vivants qui se développent sur la planète Terre).
  2. C’est la période actuelle des temps géologiques où les activités humaines ont de fortes répercussions sur les écosystèmes de la planète et les transforment à tous les niveaux. Exemple : le réchauffement climatique.

Nota bene :

Pour de nombreux chercheurs, le début de l’Anthropocène est situé précisément en 1784, date de l’invention de la machine à vapeur par l’Écossais James WATT (1736-1819).

Découverte mécanique à l’origine de la première révolution industrielle.

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Kozé libre

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