Etudiants

[Québec] Des études payées mais pas de diplôme valide

150 BACHELIERS RÉUNIONNAIS PARTENT AU QUÉBEC CHAQUE ANNÉE

Chaque année, près de 150 bacheliers et jeunes Réunionnais partent étudier au Québec. Cette expérience, encadrée par la Région Réunion, offre une cinquantaine de formations dans 15 établissements différents de cette région du Canada. Un rêve, pour de nombreux jeunes assez courageux pour franchir le pas. Un cauchemar pour ceux qui espèrent revenir travailler au pays.

Les jeunes Réunionnais partent, comme l’explique l’intitulé du programme, pour « vivre et étudier au Québec ». Mais le retour au pays risque d’être douloureux.

Depuis une quinzaine d’années, la perspective canadienne séduit les jeunes qui souhaitent découvrir une autre culture, un autre art de vivre. C’est le cas de Théo, 20 ans, qui a grandi au quartier de la Montagne à Saint-Denis. Il a tout misé sur ce programme d’études. 

Je suis parti de La Réunion en 2021 après mon Bac car j’avais besoin de partir loin. Que ce soit sur internet ou à la télé, les paysages du Canada m’ont tapé dans l’œil. Je me suis renseigné, et je suis parti.

Théo

Cette région du monde est une des rares à avoir un tel écart de températures entre les deux grandes saisons. En été on peut se croire à La Réunion avec des températures avoisinant les 30 degrés. Six mois plus tard on peut se retrouver au milieu de montagnes enneigées à -25 degrés. Ce contraste peut charmer mais peut aussi faire fuir. 

Place D’Youville, Québec, Canada

L’entente franco-canadienne facilite l’accès

La France et le Canada ont un accord en ce qui concerne la scolarité post-bac. Les étudiants réunionnais peuvent bénéficier d’une bourse d’en moyenne 700 euros par mois durant leurs études ainsi que d’une prime d’installation de 800 euros. Ce dispositif est encadré par la Région et financé par des fonds européens. Le billet d’avion, à l’aller, est pris en charge tout comme le retour à la fin des études. Les frais de scolarité et d’inscription sont réduits à quelques centaines d’euros quand les étudiants venant d’Afrique par exemple payent le double voire le triple.  

Les formations proposées vont du domaine paramédical à la foresterie, en passant aussi par les métiers de l’informatique et bien d’autres. Pour intégrer ces formations, la motivation prime. Un étudiant issu d’un bac technologique (STI2D) peut très bien intégrer un cursus de kinésithérapeute, là où dans le système français il aurait dû passer par la première année de médecine pour espérer avoir une place.  

Au risque de faire échouer les étudiants, le système québécois attire et donne aux étudiants le cursus voulu.

C’est vrai qu’avec ce dispositif, on a de la chance. On se sent privilégié comparé aux autres étudiants internationaux. Ca nous laisse du temps en plus car on a pas l’obligation de travailler en parallèle de nos études. Après, si on veut un peu plus de confort, on trouve facilement un job étudiant ici. Moi je travaille à H&M.

Théo
québec

Cette formation prépayée, un réel cadeau ? 

Les formations partiellement prises en charge durent trois ans. Elles mènent à un diplôme délivré par l’Etat canadien. Au risque de décevoir, ce diplôme ne comporte pas d’équivalence juridique en France. Non, les étudiants diplômés ne pourront pas retourner chez eux pour travailler, qu’ils soient nés à Paris où à Saint-Pierre. Le billet retour payé par la Région sert donc à revenir, mais sans le moindre espoir de trouver du travail pour les professions médicales.

Ces cursus qui durent aussi longtemps qu’en France, comme le diplôme de soins infirmiers, sont inutiles sauf si l’on souhaite rester à jamais au Québec.

Bon, il y a quand même un moyen d’exercer sur le territoire français en ayant étudié au Québec  : faire deux ans supplémentaires à l’université québécoise. Ces deux ans permettent aux étudiants de se spécialiser dans une branche de leur domaine. Pour rester sur l’exemple de l’exercice infirmier, ils pourront passer un diplôme canadien d’infirmier anesthésiste.  

Mais, suite à ces cinq années, leur diplôme n’est reconnu sur le sol français que comme un titre de simple infirmier. C’est décevant, après cinq ans d’études au Québec, d’avoir l’équivalent d’une licence française…  

À noter que ces deux ans représentent jusqu`à 10 000 $CA (6 800 €) de frais de scolarité qui ne sont pas pris en charge par l’Union européenne cette fois-ci. Ces frais varient selon les situations.

Si tu décides de venir étudier ici au Canada, il faut être sûr de vouloir y rester. Moi j’ai comme ambition de faire cinq ans d’études ici et de m’y établir. Si un jour je veux revenir en France ou à La Réunion, je peux demander à passer une équivalence.

Théo

Partir étudier au Québec est un projet formidable pour les jeunes Réunionnais qui souhaitent se dépayser. Seulement, un projet clair et net, avec toutes les informations concernant les équivalences est primordial au péril de se retrouver avec un diplôme non valide à son retour à La Réunion.

Etienne Satre

A propos de l'auteur

Etienne Satre | Journaliste

Etienne Satre a rejoint l'équipe en janvier 2024 en tant qu'apprenti journaliste.